C’est presque une tradition. Avant chaque événement important concernant Force ouvrière (FO), cette confédération fondée en 1948 sur l’anticommunisme, Jean-Claude Mailly accorde un entretien à L’Humanité-Dimanche. Dans l’hebdomadaire communiste du 29 janvier, avant l’ouverture du 23e congrès de FO, qui se tiendra du 2 au 6 février à Tours, le secrétaire général n’y va pas avec le dos de la cuiller : « Toute politique libérale au sens économique s’accompagne d’une forme d’autoritarisme social. »
A Tours, pendant cinq jours, ce sera donc feu sur l’« autoritarisme social » ! Ce congrès, qui va réunir 2 500 délégués, est dépourvu d’enjeux de taille. M. Mailly, 61 ans, élu pour la première fois en 2004, a en effet décidé de rempiler pour un quatrième et dernier mandat de trois ans.
Les deux candidats qui briguent ouvertement sa succession devront patienter jusqu’en 2018. Pascal Pavageau, ingénieur en chef des travaux publics de l’Etat, de facto numéro deux, fait figure de favori, face à Stéphane Lardy, le négociateur en chef de FO venu de l’agriculture. Tous deux sont, comme M. Mailly, des adeptes du « réformisme militant ». M. Pavageau se borne à glisser au passage qu’il n’est pas encarté au PS, comme l’ont été tous les patrons de FO, ce qui n’est pas le cas de M. Lardy. « Il est clair que Jean-Claude a choisi Pascal, note un responsable de fédération, car il le met beaucoup en vitrine. »
« Corde de rappel »
M. Mailly est surtout soucieux de ne pas faire revivre à FO le traumatisme de 1989, quand la bataille pour la succession d’André Bergeron avait opposé Marc Blondel, tenant du « syndicalisme de contestation » et Claude Pitous, supposé défenseur du « syndicalisme d’accompagnement ». Cet affrontement violent entre réformistes et trotskistes avait conduit FO au bord de la scission. Des années avaient été nécessaires pour panser les plaies.
Plus encore que Marc Blondel, dont il était le disciple, à la personnalité plutôt conflictuelle, M. Mailly a su pacifier la mosaïque de sensibilités qu’il dirige et instaurer une sorte de paix des braves entre les réformistes – majoritaires à plus de 60 % au sein de la commission exécutive de 35 membres – et les trotskistes (autour de 30 %).
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A la tête de la fédération de la métallurgie (60 000 adhérents), Frédéric Homez loue sa bonne entente avec « Jean-Claude ». « Le réformisme, on y est très attachés, explique-t-il, mais il faut qu’il apporte un plus aux salariés. » Même musique à la Fédération générale des travailleurs de l’agriculture (FGTA), 21 000 adhérents, qui se présente en « créateur de progrès social » et revendique haut et fort son réformisme. « On signe de bons accords, assure Dejan Terglav, son secrétaire général, on avance moins vite qu’avant mais on avance. Et Jean-Claude m’a toujours dit que la contestation est plus facile que la signature. »
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