Un couple gay franco-marocain enfin autorisé à se marier

Cette décision de la Cour de cassation était très attendue par les militants de la loi Taubira, dont sont privés une partie des couples binationaux.
par Marie Piquemal
publié le 28 janvier 2015 à 14h26
(mis à jour le 28 janvier 2015 à 17h17)

C’est une décision importante. La Cour de cassation a jugé ce mercredi que le droit de se marier pour deux personnes du même sexe était une liberté fondamentale, et donc l’emportait sur tout le reste, y compris le droit international.

Les juges viennent de donner raison à Dominique et Mohammed, un couple homosexuel franco-marocain qui deux jours avant la célébration de leur mariage, avaient dû annuler suite à l'opposition du parquet de Chambéry.

A l'origine de cette histoire : la circulaire du 29 mai 2013 précisant les conditions d'application de la loi sur le mariage homosexuel. Où il est écrit que pour certains couples binationaux, en vertu de conventions anciennes, le droit du pays d'origine prime sur le droit français même si le mariage a été célébré sur le territoire français. Onze nationalités se sont retrouvé, de fait, privées du droit au mariage. A savoir : les ressortissants d'Algérie, du Maroc, de la Tunisie, du Cambodge, du Laos, de Pologne, de Slovénie, de Bosnie-Herzégovine, du Monténégro de Serbie et du Kosovo.

En découvrant cette circulaire, beaucoup de militants pour le mariage homosexuel étaient tombés des nues. Même en ayant suivi les débats dans l'hémicycle, à aucun moment ils n'avaient entendu parler de ces restrictions au droit commun. Interpellé, le ministère des affaires étrangères avait promis dès l'été 2013 de lever rapidement ce blocage juridique. Mais rien n'a été fait.

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Dominique et Mohammed, soutenus par l'association Ardhis (qui défend les droits des homosexuels étrangers), s'étaient alors tournés vers la justice.  En septembre 2013, le tribunal de grande instance leur a donné raison, tout comme la cour d'appel de Chambéry. Et à présent la cour de cassation qui, dans son arrêt, rappelle que «la loi de l'un des deux Etats désignés par la Convention peut être écartée par les juridictions de l'autre Etat si elle est manifestement incompatible avec l'ordre public». En l'espèce, pour la Cour de cassation, le droit de se marier pour les personnes du même sexe est une liberté fondamentale et, donc, l'empêcher est contraire à l'ordre public.

«Le défenseur des droits ne peut que saluer cette décision de la Cour de cassation qui garantit le droit au mariage des couples de même sexe sans discrimination liée à la nationalité ou l'orientation sexuelle», s'est aussitôt félicité dans un communiqué Maître Spinosi, représentant le défenseur des droits dans ce dossier. De son côté, la manif pour tous, opposé au mariage homosexuel, s'indigne de cette nouvelle «atteinte portée à la famille et aux droits de l'enfant et à la souveraineté du Maroc».

Toute la question à présent est de savoir si cette décision fera jurisprudence pour les onze nationalités concernées par les accords binationaux ou pour une partie seulement d'entre elles. «Il paraît peu probable que si la situation se présente, le parquet s'oppose alors au mariage», assure, confiant, maître Spinosi.

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