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L’avenir d’Eric Zemmour à i-Télé semble incertain

La direction de la chaîne d’information où collabore M. Zemmour a remplacé l’émission va s’exprimer devant la rédaction. A RTL, les journalistes se sont désolidarisés de lui

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Publié le 17 décembre 2014 à 20h58, modifié le 08 septembre 2021 à 15h49

Temps de Lecture 5 min.

Le journaliste Eric Zemmour en janvier 2011.

L’avenir d’Eric Zemmour semble de plus en plus compromis : à la suite de l’interview au Corriere della sera dans laquelle le chroniqueur de la chaîne d’information en continu critique les musulmans, la société des journalistes (SDJ) a demandé que la direction s’exprime devant la rédaction, vendredi matin. La directrice de la rédaction Céline Pigalle a expliqué qu’elle avait déprogrammé « Ça se dispute », le rendez-vous hebdomadaire prévu à diffuser le soir, dans lequel M. Zemmour est opposé au journaliste Nicolas Domenach. Et veut le remplacer par un entretien dans lequel le chroniqueur de longue date de la chaîne puisse s’expliquer sur le fond de ses propos polémiques. Elle a ajouté qu’elle aviserait après des éventuelles suites à donner.

Un entretien enregistré

Or, dans l’entretien, enregistré à l’avance et mené par le journaliste Olivier Galzi, Eric Zemmour semble tenir des propos encore plus polémiques, selon une source proche du dossier. En parallèle, la SDJ, très impliquée dans cette affaire, envisage de prendre position publiquement vendredi après-midi, ce qu’elle s’était refusée à faire jusqu’ici.

« Quand on lit les propos d’Eric Zemmour dans son entretien au Corriere della Sera, on ne peut pas se sentir solidaire », explique un membre de la société des journalistes (SDJ) d’Itélé. Lundi 15 décembre, quand a circulé l’interview au quotidien italien, la SDJ a préféré « prendre le temps » de débattre avec les journalistes, notamment de l’éventualité de demander son départ. « Nous attendons une prise de parole forte de la direction devant la rédaction », expliquait ce journaliste.

De son côté, la SDJ de RTL, autre média où travaille Eric Zemmour, a été la première à réagir officiellement à ses propos. Dans un communiqué diffusé mercredi 17, elle estime que « les prises de position d’Eric Zemmour, récurrentes à l’antenne et hors antenne, ternissent les valeurs de vivre ensemble qui ont toujours été défendues par RTL ».

« Discussions dans les couloirs » au « Figaro »

L’entretien d’Eric Zemmour au quotidien italien, paru le 30 octobre, a fait polémique en France après que le coprésident du Parti de gauche Jean-Luc Mélenchon l’a épinglé sur son blog dans un post du 15 décembre intitulé « Zemmour se lâche en Italie : déporter cinq millions de musulmans ? Ça peut se voir ! ».

Le chroniqueur-journaliste-auteur-idéologue n’y prononce pas lui-même le mot de « déportation », comme l’a plus tard expliqué à Figaro Vox le journaliste qui a réalisé l’entretien. Mais M. Zemmour affirme notamment : « Les musulmans ont leur code civil, c’est le Coran. » Ou encore : « Cette situation d’un peuple dans le peuple, des musulmans dans le peuple français, nous conduira au chaos et à la guerre civile. »

Au Figaro, où l’auteur du livre Le Suicide français (Albin Michel, 544 pages, 22,90 euros) collabore au Figaro magazine notamment, « il y a eu des protestations et des discussions dans les couloirs » mais pas de réaction « à chaud », raconte un rédacteur.

Suite à cet entretien, trois associations antiracistes ont annoncé des dépôts de plaintes. Mercredi, Dominique Sopo, président de SOS Racisme, a publié une lettre, cosignée par d’autres associations et des personnalités, demandant au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) de « faire cesser la diffusion de la haine d’Eric Zemmour ». Le CSA a répondu qu’il veillait en cas de propos litigieux. Il est intervenu quatre fois depuis 2010 pour des propos d’Eric Zemmour, la dernière fois en juin pour « mettre en garde fermement » RTL. En 2011, ce dernier a été condamné pour provocation à la haine raciale.

Jeudi matin, Eric Zemmour, interviewé par Yves Calvi sur RTL, a dénoncé une « manipulation fantastique ». A la question de savoir s’il souhaitait le départ des musulmans de France, il a répondu : « Je ne souhaite ni ne demande rien du tout… C’est ridicule… Il y a des citoyens français, on ne va pas faire partir des citoyens français. Il y a des étrangers, un état a le droit de dire aux étrangers : “Bon maintenant vous rentrez chez vous.” » Tout en disant craindre une « libanisation de la France avec en perspective une guerre civile ».

« Il joue la victimisation»

Pour les journalistes des médias dans lesquels collabore Eric Zemmour, le contenu de l’entretien au Corriere della Sera le débat sur son travail n’est pas nouveau. « Nous avons déjà protesté plusieurs fois auprès de la direction mais nous n’avions jamais communiqué à l’extérieur, explique Anne Le Hénaff, présidente de la société des rédactions de RTL. Cette fois-ci, on a senti quelque chose monter dans la rédaction. Cela a été la goutte d’eau… ». « C’est l’énième épisode. A chaque fois, la direction ne tient pas compte de nos protestations. Mais l’image de notre station en prend un coup », déplore un journaliste de RTL.

Une question a particulièrement occupé les collègues d’Eric Zemmour à i-Télé, RTL ou au Figaro : le risque de le placer en victime. En 2010, alors qu’il était menacé de sanction au Figaro, des soutiens étaient venus protester. « Zemmour joue de la victimisation en permanence, estime une journaliste de RTL. Mais on ne pas non plus tout accepter au nom de ce principe. »

Un « intellectuel», « de moins en moins journaliste »

La radio a choisi de ne rien demander de précis. La direction de RTL, justifie la chronique accordée à Eric Zemmour par sa volonté de ne pas apparaître conformiste, de donner le signe que RTL n’appartient pas au système médiatique et politique et que la radio reste proche des gens, en donnant la parole à des gens considérés comme politiquement incorrects. C’est ainsi que se définit l’intéressé, bien qu’il ait un large accès aux grands médias.

Contactée, la direction de RTL n’a pas souhaité commenter. « Zemmour est un intellectuel, sûrement pas un homme politique et de moins en moins un journaliste », a expliqué Christopher Baldelli le patron de RTL, fin novembre sur France 5, rappelant qu’Eric Zemmour intervenait avec d’autres chroniqueurs à 8 h 10, dans « On n’est pas forcément d’accord ». Un glissement de statut qui voudrait, selon plusieurs journalistes, que les médias adaptent la place qu’ils lui donnent.

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