Indonésie : condamnés, les deux journalistes français bientôt libres

 

Indonésie : condamnés, les deux journalistes français bientôt libres

    «Je n'ai plus envie de prendre des risques, je ne veux plus priver mes enfants de leur papa». C'est avec cette jolie phrase, sur LCI, que Thomas Dandois a accueilli sa promesse de libération, dès lundi prochain. Les deux journalistes français arrêtés en août en Indonésie, pour avoir effectué sans autorisation un reportage sur des rebelles séparatistes, ont été condamnés vendredi à deux mois et demi de prison mais seront libérés lundi, a indiqué leur avocat ce vendredi vers 5 heures du matin.

    Thomas Dandois, 40 ans, et Valentine Bourrat, 29 ans, ont été reconnus coupables d'avoir abusé de leur visa de tourisme pour effectuer ce reportage en Papouasie (est), et condamnés par le tribunal de district de Jayapura, capitale de cette province, à deux mois et 15 jours de prison.

    En détention provisoire depuis leur arrestation en Papouasie le 6 août, le duo de journalistes a donc déjà accompli sa peine. «Concrètement, c'est une bonne décision car ils vont rentrer chez eux, mais d'un point de vue juridique, ce n'est pas très bon car cela ouvre la porte à la criminalisation des activités journalistiques», a nuancé maître Aristo Pangarubuan.

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    Détenus «dans des conditions correctes»

    Le procureur avait requis jeudi quatre mois de prison ferme, soulignant que Bourrat et Dandois avaient exercé des activités «incompatibles avec leur visa» de touriste, alors qu'ils auraient dû être en possession d'un visa de journaliste pour se rendre dans cette province à l'accès particulièrement restreint et encadré pour les journalistes étrangers. L'ONG Human Rights Watch (HRW) avait accusé la semaine dernière les autorités indonésiennes de «faire obstacle à toute couverture médiatique indépendante de la province de Papouasie», et réclamé la libération immédiate des deux journalistes.

    «On est très soulagés, et Valentine et moi, a raconté Dandois sur France Info. On a été condamnés mais concrètement on va pouvoir rentrer chez nous retrouver nos familles. Au début, tout était figé, on avait peu d'informations. Dès que la justice a eu le dossier en main, c'est allé très vite. Lundi, le juge nous a dit qu'il allait régler le problème en une semaine, un soulagement».

    Les deux journalistes ont été détenus «dans des conditions correctes», dans une pièce du centre de l'immigration. Certes les conditions d'hygiène n'étaient pas réunies mais au moins n'étaient-ils ni en prison ni séparés. «On a été assez bien traités par les autorités. Ce qui est difficile, c'est de ne pas savoir combien de temps ça va durer». Avec un grand soulagement, Thomas Dandois a vu arriver son frère et Valentine Bourrat sa mère pour la semaine de procès».

    Une province qui réclame l'indépendance

    Les questions sur les motivations de leur condamnation attendront leur retour effectif en France, les reporters étant toujours aux mains des autorités indonésiennes. Alors qu'ils préparaient leur reportage pour la chaîne franco-allemande Arte, Thomas Dandois avait été interpellé le 6 août dans un hôtel de la ville de Wamena en compagnie de trois membres du Mouvement de la Papouasie libre (OPM), et Valentine Bourrat avait été appréhendée peu de temps après. Cinq jours plus tôt, cinq séparatistes avaient été abattus dans un échange de coups de feu avec des militaires; deux policiers avaient été tués peu de temps auparavant dans une embuscade attribuée à l'OPM.

    De nombreux Papous, peuple ancestral de Papouasie occidentale, une ancienne colonie des Pays-Bas rattachée à l'Indonésie en 1969, réclament l'indépendance comme la Papouasie Nouvelle-Guinée, autre moitié de cette grande île qui l'a obtenue en 1975 après avoir été une colonie australienne. L'OPM, qui mène une rébellion armée, accuse les autorités indonésiennes d'entorses graves aux droits de l'homme contre les civils papous, et de corruption massive liée aux importantes ressources naturelles dans cette région riche en minerais.