La basilique Saint Pierre-Chanel sur l'île de Futuna, le 9 octobre 2014

La basilique Saint Pierre-Chanel sur l'île de Futuna, le 9 octobre 2014

afp.com/Coralie Cochin

Un centre spirituel a été inauguré le 28 avril dernier à proximité de la "basilique" de Poi à Futuna, île de 3.600 âmes, où reposent les reliques du premier martyr d'Océanie, Saint Pierre-Chanel.

Publicité

Les infrastructures construites comprennent notamment une salle de restauration, deux dortoirs de vingt places, une salle de prière et un fale fono (case polynésienne) en bord de mer. Des chambres individuelles, une bibliothèque multi-média et un petit musée dédié à Saint Pierre-Chanel sont en outre en projet.

"L'idée est de faire de Futuna un centre de pèlerinage dans le Pacifique, qui devrait être opérationnel en 2015", explique à l'AFP Monseigneur Ghislain de Rasilly, évêque de l'archipel.

"Je ne m'attends pas à voir débarquer 10.000 personnes. Les pèlerins viendront essentiellement de Wallis et Futuna, de Nouvelle-Calédonie et de Fidji", poursuit-il, conscient de l'enclavement de ce territoire français, le plus éloigné de la métropole avec 22.000 km de distance.

Situé au beau milieu du Pacifique sud, Wallis et ses 8.600 habitants sont reliés deux fois par semaine par une seule compagnie aérienne avec Fidji et Nouméa. Pour gagner Futuna, qui ne compte qu'un seul hôtel, il faut ensuite emprunter un avion d'une douzaine de places.

"Il est envisagé de mettre en place une desserte maritime entre les deux îles, mais le quai de Futuna ne sera pas construit avant 2018 ou 2019", s'inquiète l'évêque.

En 1837, Pierre Chanel, originaire du diocèse de Belley (Ain), fut le premier missionnaire à débarquer à Futuna. Son message ne rencontra pas beaucoup de succès, mais la conversion du fils du roi lui attira les foudres de la population.

Battu à coups de bâton, le prêtre mariste mourut le 28 avril 1841 et fut canonisé en 1954. Malgré ce destin tragique, les îles de Wallis et Futuna furent totalement converties en quelques années. Aujourd'hui, la population est à 99% catholique.

- un archipel sous perfusion -

A l'extrême sud de Wallis, une église monumentale de 2.000 mètres carrés et dédiée à Notre-Dame-de-Lourdes, vient d'être inaugurée dans le village de Lausikula. Bien que le chantier, porté par le vicaire général, ait suscité la polémique dans la population, compte tenu de son coût, l'objectif est également d'en faire un site de pèlerinage.

"Cette église est un peu démesurée, mais maintenant qu'elle est là il faut la prendre en compte", reconnait l'évêque.

Selon certains villageois, le chantier aurait coûté entre 100 et 400 millions CFP (830.000 et 3,3 millions d'euros) alors que l'archipel compte déjà plusieurs dizaines d'églises en plus de la cathédrale de Mata-Utu.

Sous la perfusion des transferts financiers de l'Etat, le territoire de Wallis et Futuna, où les coutumes polynésiennes et la foi catholique sont omniprésentes, ne parviennent pas à se développer. Aussi, la population migre en masse vers la Nouvelle-Calédonie voisine ou la métropole.

"On met la charrue avant les boeufs en construisant ces sites, puisqu'il n'y a pas de desserte", déplore Alosio Sako, chef coutumier de la communauté wallisienne de Nouvelle-Calédonie.

Il regrette aussi que la population soit sans cesse ponctionnée pour bâtir des églises alors qu'elles se vident et qu'aucune activité économique n'émerge.

Conscient de ces dérives, l'évêque de Rasilly tient d'ailleurs à ce que l'organisation des pèlerinages repose sur "une formule qui soit économiquement autonome".

"La dimension spirituelle et intellectuelle de la foi se perd au profit de sa matérialisation et de son extériorisation", admet-t-il.

Publicité