Boyan Slat, 20 ans, nettoyeur des océans

« Adieu l’ado inventeur. Bonjour la carte senior » : c’est par ce tweet humoristique que Boyan Slat a, le 27 juillet dernier, signalé son entrée dans l’âge adulte à ses quelque 8.000 abonnés. A vingt ans, ce Néerlandais au look de surfeur californien a déjà un palmarès à faire pâlir d’envie ses ainés. En novembre, il est devenu le benjamin des "Champions de la Terre" jamais distingués par le Programme des Nations Unies pour l'environnement. Quelques mois plus tôt, il faisait déjà partie des vingt finalistes du concours EYE50 d’Intel, réservé aux Géo-Trouvetou de moins de 30 ans férus d’innovation technologique.

Pourquoi tant d’honneurs? Alors que les experts établis répètent que débarrasser les océans de leurs déchets plastiques est «irréalisable », Boyan veut démontrer le contraire, avec toute la fougue de la jeunesse…et la caution d’une centaine de scientifiques et d’ingénieurs internationaux bénévoles, autrement plus expérimentés que lui. « Je ne suis ni pas spécialiste en tout », reconnaît-il volontiers, ayant abandonné ses études d’ingénierie spatiale à l’Université de Technologie de Delft en première année. Ces dernières semaines, il s’est lancé dans une phase active de recrutements pour étoffer son équipe (jusqu’à 15 entretiens d’embauche par jour !). C’est pour mieux se consacrer à la mise en place de cette nouvelle organisation qu’il a décliné notre demande d’entretien."Plus aucune interview dans la presse dans les trois prochains mois", s'excuse l'agence de presse néerlandaise du jeune homme.

Son TED a été vu 1,6 million de fois

Avec son enthousiasme très communicatif et sa maîtrise des réseaux sociaux, cet utopiste a réussi à embarquer une partie de la planète dans son beau projet de récupération des déchets maritimes. Boyan a été frappé par la gravité de la situation il y a trois ans, lors d’une expédition plongée en Grèce. Il y a « vu plus de sachets en plastique que de poissons». Ses 200 euros d’économies ne lui permettant pas de s’attaquer à la question, il démarche 300 entreprises dans l’espoir de financer une première étude sur la faisabilité de son projet. Il compte déployer d’immenses bouées pour capturer les déchets en se servant des courants, avant de les récupérer dans une tour flottante vidée deux fois par an. Face à l’indifférence des sponsors corporate, Boyan crée sa fondation, Ocean Cleanup, qu’il promeut auprès des internautes et lors de deux conférences TED, à Delft puis à New York. Sa première intervention est regardée 1,6 million de fois ! Une bonne base pour sa campagne de crowdfunding, lancée en septembre dernier. En 19 jours, plus de 2 millions de dollars sont levés auprès de 38.615 donateurs originaires de 160 pays.

Cet argent va désormais servir au démarrage de la phase pilote du projet destinée à mesurer l’efficacité et la résistance d’un premier dispositif de quelques dizaines de mètres dans des conditions météo réelles entre les côtes d’Hawaï et la Californie. Les tests dureront trois ans. S’ils sont concluants, une structure de cent kilomètres de longueur sera installée d’ici à 2020. Malgré les doutes et les réserves de nombreux scientifiques, Boyan estime qu’il lui faudra dix ans pour récupérer la moitié des plastiques qui souillent le gyre du Pacifique Nord, cette zone de croisement des courants marins tristement célèbre pour son taux de pollution.