Publicité

Le livre numérique séduit peu les Français... sauf s'il est gratuit

ROBERT MICHAEL/AFP

Un Français sur dix affirme lire des livres numériques, surtout s'ils sont gratuits. Le prix des ebooks, vu comme trop élevé, reste un frein au développement de ce mode de lecture et encourage le piratage, selon une étude Ifop pour Hadopi.

Le livre numérique entre doucement dans les habitudes des Français. Selon une étude Ifop menée pour l'Hadopi, 11 % de la population, et plus particulièrement les jeunes urbains issus des catégories socio-professionnelles supérieures, lit désormais des romans, BD ou mangas sur écrans. Hormis les gros lecteurs, qui, à 47 %, ont délibérément choisi de lire des ebooks, une majeure partie des utilisateurs ont découvert les plaisirs de la lecture numérique un peu par hasard: un ouvrage à acheter de toute urgence et introuvable en magasin, une valise à alléger avant un départ en vacances… Le fort taux d'équipement en smartphones et tablettes, qui permettent de lire ces fichiers, facilite le passage à l'acte, tout comme l'existence d'une large offre gratuite.

L'existence de ces milliers de livres gratuits, le plus souvent des classiques tombés dans le domaine public, est le premier argument (44 %) en faveur de la lecture numérique, devant le gain de place et la facilité de transport. Près d'un tiers des lecteurs numériques ne lisent d'ailleurs que des ebooks gratuits, qui leur permettent de «découvrir des livres qu'ils n'auraient pas lus s'ils avaient dû les acheter» (38 %). Mais si le gratuit plaît, c'est aussi parce que le prix du livre numérique paraît trop élevé (33 %). Un quart des sondés déclare même préférer acheter un ouvrage en version papier si sa version numérique n'est pas disponible gratuitement.

Dix euros, seuil psychologique

Des revendeurs, comme Fnac ou Amazon, le répètent et l'étude d'Hadopi le confirme: le prix des ebooks reste un frein important au développement du marché. Bien que le prix des fichiers ait baissé en France ces derniers mois - environ 13€ pour les nouveautés -, l'écart de prix avec le livre physique n'est pas suffisant: les lecteurs estiment que les ebooks doivent coûter moins de dix euros (7,5€ pour les romans, 5€ pour les BD et manga, 9,5€ pour les essais). Deux arguments sont principalement mis en avant: les coûts de fabrication et de distribution sont perçus comme inférieurs à ceux d'un «vrai» livre (56 %) et les lecteurs ne souhaitent pas payer cher quelque chose qui ne leur appartient pas vraiment (39 %). Aux yeux des sondés, qui citent en exemple le marché de la musique, le dématérialisé se doit d'être bien moins cher que le physique.

Les tablettes sont également beaucoup utilisées pour la lecture de BD numériques. JOHN MACDOUGALL/AFP

Ce déséquilibre entre valeur perçue et valeur réelle encourage le piratage, auquel un tiers des sondés reconnaît avoir recours. Si 23 % des adeptes de l'offre illégale disent télécharger «par habitude» ou par refus de «payer ce qu'on peut trouver gratuitement», l'étude Hadopi dresse un portrait nuancé des «pirates». Nombre de lecteurs passent par ces solutions, faute d'offre légale satisfaisante (23 %). C'est notamment le cas des lecteurs de mangas (37 %), qui pointent du doigt les délais parfois importants entre la sortie de l'oeuvre et son éventuelle traduction en français. Autre enseignement, les «pirates» ne sont guère différents des lecteurs «légaux»: ils sont autant à acheter des livres numériques (64 %) pour un panier moyen identique (26€ dépensés sur un an).

Un mode de lecture complémentaire au papier

L'attrait du livre numérique pourrait être renforcé si les éditeurs proposaient des offres «bundles», où, pour tout achat d'un livre, sa version numérique serait offerte (78 % intéressés). Les sondés se déclarent également intéressés (56 %) par un «Netflix du livre», leur permettant de lire autant qu'ils le souhaitent contre un abonnement mensuel. Une donnée qui devrait intéresser Amazon, à l'origine d'une offre similaire baptisée Kindle Unlimited et déjà disponible aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en Allemagne.

Mais que les adeptes du livre physique se rassurent, ce dernier ne semble pas prêt de disparaître. Près de 45 % des lecteurs disent préférer lire sur papier, tandis que 34 % des sondés voient le livre numérique comme un mode de lecture complémentaire, notamment en mobilité. Une proportion égale affirme que la lecture sur écran est plus fatigante et que le contact avec le papier leur manque. Enfin, les lecteurs soulignent une des faiblesses de l'achat dématérialisé: l'absence de découverte. Près de la moitié des lecteurs savent précisément quel livre ils veulent lorsqu'ils se rendent sur une boutique en ligne. Les systèmes de recommandation, qui affichent les ouvrages les plus suspectibles de plaire en fonction des achats précédents, n'ont pas la cote: les lecteurs les trouvent intrusifs et estiment qu'ils ferment leur horizon. Alors que la librairie, au contraire, est perçue comme un lieu de flânerie et de découverte, où le regard est accroché par certaines couvertures. Une expérience que n'arrivent pas à reproduire les magasins virtuels.

Le livre numérique séduit peu les Français... sauf s'il est gratuit

S'ABONNER
Partager

Partager via :

Plus d'options

S'abonner
49 commentaires
  • JACKLAB

    le

    Et pour tout arranger ce jour annonce "Livres numériques : la justice européenne ordonne à la France de passer la TVA de 5,5% à 20%"

  • bea31

    le

    C'est bien M.Sicambre de faire la promotion des appareils d'Amazon et de son formats propriétaire, savez vous qu'il existe des liseuses français au format ouvert epub.
    Sur votre kindle commencez par lire La Boétie

  • Nector

    le

    Perso mon seuil de tolérance ce serait plutôt qu'un ebook soit moins cher qu'un livre papier au format poche (vu qu'on économise le papier, c'est plus écolo). En gros, à 5€ j'achète...

À lire aussi