Syrie : la Turquie et les Etats-Unis à la rescousse de Kobané

 

Syrie : la Turquie et les Etats-Unis à la rescousse de Kobané

    La Turquie a largement revu sa stratégie lundi. Elle autorise désormais les renforts des combattants kurdes irakiens à rejoindre, via son territoire, la ville kurde syrienne de Kobané, situé tout près de sa frontière et assiégée par les jihadistes du groupe Etat islamique (EI). Ce revirement intervient alors que les Etats-Unis ont procédé lundi à l'aube à un premier largage aérien d'armes et de munitions pour les forces kurdes à Kobané.

    Malgré la pression de ses alliés, Etats-Unis en tête, le gouvernement islamo-conservateur turc refusait jusque-là d'intervenir militairement pour aider les combattants kurdes -les «Peshmergas»- qui résistent depuis un mois aux forces du groupe Etat islamique, estimant qu'un tel soutien ne pouvait que renforcer le président syrien Bachar al-Assad, bête noire d'Ankara.

    Mais, «nous n'avons jamais voulu que Kobané tombe. La Turquie a mené différentes initiatives pour l'empêcher», a expliqué lundi le ministre turc des Affaires étrangères Mevlut Cavusoglu. «Nous coopérons pleinement avec la coalition», s'est-il  contenté d'indiquer.

    La Turquie aide les Kurdes d'Irak, mais pas militairement

    Ankara reste réticente à l'idée d'armer les Kurdes et d'intervenir militairement contre les jihadistes. Le président turc Recep Tayyip Erdogan avait encore rejeté dimanche les appels en ce sens. Il accuse le principal parti kurde en Syrie, le PYD, d'être une «organisation terroriste» lié au PKK turc, qui mène depuis 30 ans une insurrection pour réclamer l'autonomie du sud-est de son pays. Mais la Turquie du président Erdogan entretient par contre de bonnes relations avec la région autonome kurde d'Irak. Selon l'agence kurde Rudaw, le président du Kurdistan irakien Massoud Barzani a lui-même demandé aux autorités turques de faciliter le passage ces combattants.

    Lundi, le secrétaire d'Etat américain a  souligné que Washington comprenait les défis de la Turquie face au PKK. «C'est un moment de crise, une urgence», a déclaré John Kerry lundi, insistant sur le fait qu'il ne s'agissait «pas d'un changement de politique» de la part des Etats-Unis.

    Ainsi le largage d'armes, de munitions et matériel médical opéré par les Américains ne met pas le gouvernement turc en porte à faux. Cette aide a été fournie par les autorités kurdes d'Irak, selon le centre de commandement américain pour le Moyen-Orient et l'Asie centrale (Centcom). Les trois avions cargos C-130 qui ont largué le matériel n'ont rencontré aucune résistance. Ils n'ont pas été accompagnés par des avions de chasse et ont quitté la zone en toute sécurité, a déclaré un haut responsable de l'administration Obama. Il n'a pas exclu de nouvelles opérations de largages si nécessaire, peut-être dans un proche avenir.

    Les armes larguées seront d'une «grande aide» aux combattants kurdes syriens, a affirmé lundi le porte-parole des Unités de protection du peuple (YPG), Redur Xelil. Elles auront un «effet positif» sur les opérations militaires contre l'EI, a-t-il ajouté.

    Des centaines de jihadistes tués

    Les avions de la coalition ont accru ces derniers jours les raids sur Kobané, ayant désormais frappé près de 140 fois les positions de l'EI dans et autour de la ville depuis fin septembre, selon le Centcom. «Combinées à une résistance continue sur le terrain», ces frappes ont «tué des centaines de combattants (de l'EI) et détruit ou endommagé» de nombreux équipements et positions de l'EI, ajoute le commandement, précisant que la situation dans la ville restait «fragile». Mais désormais «l'équilibre des forces peut basculer à tout moment», a estimé l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

    La bataille pour le contrôle de la troisième ville kurde de Syrie, où les jihadistes sont entrés le 6 octobre, continue à se mener rue après rue, s'apparentant à une guérilla urbaine. L'EI est parvenu à progresser un peu vers le centre tandis que les Kurdes poussaient dans l'est, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

    Confrontés à une forte résistance, les jihadistes ont dépêché samedi de nouveaux renforts à Kobané, dont la prise serait un trophée stratégique et symbolique, sous l'oeil des dizaines de caméras filmant les combats depuis la frontière turque.

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