Un "nouveau chapitre" historique entre les États-Unis et Cuba

VIDÉO. Obama a annoncé mercredi l'ouverture d'un "nouveau chapitre", prévoyant le rétablissement des relations diplomatiques avec l'île communiste.

Source AFP

Les autorités cubaines ont libéré mercredi l'Américain Alan Gross, écroué depuis 2009 pour des raisons humanitaires et à la demande de Washington.
Les autorités cubaines ont libéré mercredi l'Américain Alan Gross, écroué depuis 2009 pour des raisons humanitaires et à la demande de Washington. © AFP

Temps de lecture : 5 min


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Les États-Unis et Cuba ont engagé mercredi un rapprochement spectaculaire après des décennies de tensions héritées de la guerre froide, suscitant l'espoir des Cubains sur l'île, avec les promesses d'un rétablissement des relations diplomatiques et d'une plus grande coopération économique. "Todos somos americanos" (Nous sommes tous américains), a lancé Barack Obama lors d'une allocution qui devrait marquer son passage à la Maison-Blanche.

"Il y a une histoire compliquée entre les États-Unis et Cuba (...), mais l'heure est venue d'entamer un nouveau chapitre", a ajouté le 44e président des États-Unis, constatant sans détour l'échec d'un demi-siècle d'isolement du régime communiste. Au même moment, à La Havane, son homologue cubain Raul Castro confirmait cette percée historique, tout en soulignant que la question de l'embargo économique, imposé à Cuba par John F. Kennedy en 1962, n'était pas résolue. Barack Obama a demandé un débat, qui s'annonce déjà houleux, avec le Congrès américain sur la levée de cette mesure "inscrite dans la loi".

Joie et espoir

Dans les rues de La Havane, la joie et l'espoir étaient sur toutes les lèvres. "Notre vie à tous va changer", s'est exclamé avec enthousiasme Ernesto Pérez, cuisinier cubain de 52 ans. Amelia Gutiérrez, employée de banque enceinte de sept mois, se réjouit que son fils "n'aura pas à vivre dans la même tension". Rappelant que certains Cubains ont "travaillé très dur" pour provoquer ce changement, l'homme d'affaires cubano-américain Hugo Cancio, directeur de la revue OnCuba, voit "le début d'un nouveau rêve".

Des représentants de la dissidence cubaine ont réagi avec moins d'enthousiasme. Pour l'ancien prisonnier politique José Daniel Ferrer, qui préside à Santiago de Cuba (sud-est) l'Union patriotique de Cuba (UPACU), il aurait fallu "attendre un geste de La Havane sur les droits de l'homme". "Le castrisme a gagné", a réagi de son côté la blogueuse Yoani Sanchez, en faisant référence à la libération obtenue par Cuba de trois ressortissants écroués aux États-Unis. "Nous attendent maintenant de longues semaines de réjouissances et de slogans pendant lesquelles le gouvernement cubain se proclamera vainqueur de sa dernière bataille." À Miami, des exilés anti-castristes voient dans le rapprochement entre les deux pays "une trahison". "Les pourparlers ne vont profiter qu'à Cuba", juge ainsi Carlos Muñoz Fontanil.

Ouverture prochaine d'une ambassade

Le pape François, personnellement impliqué dans ces négociations menées dans le plus grand secret depuis le printemps 2013, a salué une "décision historique", louant le rapprochement entre deux pays séparés seulement par les 150 kilomètres du détroit de Floride. Le secrétaire d'État américain John Kerry va entamer "immédiatement" des discussions en vue du rétablissement des relations diplomatiques avec ce petit pays des Caraïbes, interrompues depuis 1961. Perspective longtemps impensable, les États-Unis vont par ailleurs ouvrir une ambassade à La Havane "dans les mois à venir", et Barack Obama n'a pas exclu de se rendre à Cuba : "Je n'ai pas de projet particulier à ce propos pour le moment, mais voyons comment les choses évoluent", a affirmé le président américain sur ABC News.

Parmi les mesures annoncées pour favoriser les échanges économiques, les Américains pourront désormais utiliser leurs cartes de crédit à Cuba et les institutions américaines pourront ouvrir des comptes dans les institutions financières cubaines. L'exportation de certains matériels de télécommunication sera aussi permise, dans le but de développer Internet sur l'île. Les voyageurs américains pourront par ailleurs rapporter depuis Cuba jusqu'à 100 dollars de tabac, ce qui inclut, bien sûr, les célèbres cigares cubains. La prétendante officieuse à la Maison-Blanche Hillary Clinton a salué ce rapprochement, estimant que l'isolement de Cuba "n'a fait que renforcer le maintien du régime Castro au pouvoir".

Signes de détente

Selon un responsable américain, l'ancien président Fidel Castro, qui a cédé la place à son frère Raul en 2006, n'a pas été impliqué dans les discussions. Les pays latino-américains, même les plus critiques envers les États-Unis, ont applaudi ce développement, le Vénézuélien Nicolás Maduro allant jusqu'à saluer "le geste courageux" de Barack Obama. Cette annonce historique est intervenue quelques heures après la libération d'Alan Gross, un Américain de 65 ans détenu depuis cinq ans à La Havane. Washington a toujours conditionné une détente avec Cuba à la libération de cet ancien contractuel de l'Agence fédérale américaine pour le développement international (USAID). Arrêté le 3 décembre 2009 à Cuba, il avait été condamné en 2011 à 15 ans de prison pour avoir introduit du matériel de transmission satellitaire interdit dans l'île communiste.

Parallèlement, un espion à la solde du renseignement américain, écroué à Cuba depuis 20 ans et dont très peu de gens connaissaient l'existence, a été libéré de prison. Trois Cubains, écroués aux États-Unis après avoir été condamnés à de lourdes peines pour espionnage, ont également retrouvé la liberté. Les relations entre Washington et La Havane ont été marquées par une succession d'épisodes tendus depuis le début des années 60. Celui de la baie des Cochons, lorsqu'en avril 1961, près de 1 400 exilés cubains entraînés et payés par la CIA ont tenté sans y parvenir de débarquer sur l'île, a marqué les esprits.

Les tensions entre les deux pays ont connu leur point d'orgue en octobre 1962, lorsqu'un avion-espion américain repère sur l'île des missiles nucléaires soviétiques dirigés vers les États-Unis. Le monde se prépare alors à une guerre nucléaire. Mais le 28 octobre, sans consulter Castro, le dirigeant russe Nikita Khrouchtchev cède et accepte le retrait des missiles en échange d'un engagement solennel des États-Unis de ne pas envahir Cuba. En sous-main, Moscou obtient aussi le retrait des missiles américains déployés en Turquie. Depuis l'arrivée de Raul Castro au pouvoir en 2006, quelques timides signes de détente entre les deux pays étaient apparus. En décembre 2013, MM. Obama et Castro avaient échangé une poignée de main lors d'une cérémonie d'hommage à l'ancien président sud-africain Nelson Mandela. Dans le cadre de la riposte face à Ebola, les États-Unis et Cuba ont multiplié les échanges d'amabilités.


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Commentaires (67)

  • RYME

    La porosité est le meilleur moyen de contaminer le communisme qui ne peut lutter contre l'avidité de liberté... !
    La privation de liberté est un crime contre l'humanité... C'est un acte abject... !
    L'obscurantisme est complice de toutes les idéologies...
    L'embargo... Est le meilleur moyen de faire perdurer ce cancer...
    Le communisme... , cette escroquerie... , trop affaibli par ses échecs... N'est plus à craindre... , par la prolifération de ses métastases... !

  • Le Québécois

    Voici ce que l'on écrit de l'autre côté de l'Atlantique :

    Le monde entier accueillait avec enthousiasme jeudi le rapprochement «historique» entre les États-Unis et Cuba, annoncé de manière simultanée la veille à Washington et à La Havane par Barack Obama et Raul Castro.

    «Décision historique», «geste courageux» : l'annonce du rétablissement des relations diplomatiques, après des décennies de tensions héritées de la Guerre froide, a été saluée de Pékin à l'Amérique du Sud en passant par l'Europe, chacun disant l'espoir de voir Cuba sortir enfin de son isolement.

    Sur l'île, la joie et l'espoir étaient sur toutes les lèvres dans les rues de La Havane. «Notre vie à tous va changer», résumait Ernesto Pérez, un cuisinier cubain de 52 ans.

  • 42lessonless

    Grosse erreur ! Cuba se méfiera toujours des américains.