REPORTAGEQuatre résistants au Panthéon: «Je suis venue accomplir un devoir de mémoire»

Quatre résistants au Panthéon: «Je suis venue accomplir un devoir de mémoire»

REPORTAGE«20 Minutes» est allé à la rencontre des spectateurs venus rendre hommage à Pierre Brossolette, Germaine Tillion, Geneviève de Gaulle-Anthonioz et Jean Zay...
Coline Clavaud-Mégevand

Propos recueillis par Coline Clavaud-Mégevand

Ce mercredi après-midi, une foule clairsemée circulait le long des barricades installées rue Soufflot, près du Panthéon. Dans le public venu assister à la panthéonisation de Pierre Brossolette, Germaine Tillion, Geneviève de Gaulle-Anthonioz et Jean Zay, jeunes et vieux se côtoyaient, pendant que de nombreux touristes tentaient de comprendre la raison d’un tel dispositif policier.

Si Vigipirate était d’ailleurs dans les têtes –quelques personnes évoquaient à mi-voix la possibilité d’un attentat– l’ambiance générale était détendue avant que ne débute la cérémonie. Solennelle d'abord, lorsqu’a retenti Le Chant des Déportés entonné par les chœurs de l’armée française, puis silencieuse quand le Président François Hollande a entamé son discours. 20 Minutes est allé à la rencontre des spectateurs de l’événement…


Jean-Luc, 44 ans, professeur des universités et son fils Nikolaz, 12 ans. « Je sens une sorte de filiation avec les gens qui entrent aujourd’hui au Panthéon : en tant qu’ancien élu local de gauche, universitaire et issu d’une famille touchée par la guerre. Ma grand-mère, institutrice, a été convoquée par la Kommandantur pour avoir continué d’enseigner les valeurs républicaines… Avec mon fils, qui est fan d’histoire, on montre notre attachement non pas au nationalisme mais à la République. »

Colette, 81 ans, retraitée. « J’ai été quelques mois dans un orphelinat du Lot pendant la guerre. Un soir, les Allemands de la Panzerdivision Das Reich, ceux qui ont massacré les habitants d’Oradour, sont passés par là. Les bonnes sœurs nous ont couchées toutes habillées. J’avais seulement 10 ans, je ne comprenais pas, mais aujourd’hui, je sais. Ça donne une portée particulière à la cérémonie. »


Les parents de la famille Semonov, 39 et 34 ans, en vacances à Paris. « Nous revenions de Disneyland quand nous sommes tombés sur cette foule. Notre pays, la Russie, vient de fêter les 70 ans de notre victoire sur les Nazis, mais notre cérémonie était bien plus impressionnante que celle-ci… On comprend l’émotion des gens : chez nous, chaque famille a été touchée par la guerre. Ça n’est pas qu’une histoire russe ou française, c’est l’histoire de l’humanité tout entière. »


Elizabeth, 61 ans, professeure d'Esperanto, et Jean-Claude, ingénieur technico-commercial. « Nous sommes là pour rendre hommage à Jean Zay, qui en 1938 a transmis une circulaire au rectorat pour autoriser l’enseignement de l’Espéranto à l’école. C’est un détail par rapport à tout ce qu’il a accompli par ailleurs, mais il est très important pour nous, qui travaillons à développer l’usage de cette langue. »


Justine, 23 ans, étudiante en communication politique. « Je suis venue accomplir un devoir de mémoire. C’est unique de voir une entrée au Panthéon et le fait d’assister à celle de résistants, dont deux femmes, me touche énormément. Je suis également contente d'entendre le discours de François Hollande, en temps qu’étudiante en communication politique mais aussi en tant que femme de gauche, qui soutient cette présidence. »

Françoise, 53 ans, sans profession. « Mes pas m’ont portée dans le quartier, je n’avais pas prévu d’assister à la cérémonie. Mais je connaissais Germaine Tillon car elle a donné son nom à une bibliothèque du 16e arrondissement, où j’habite. Je trouve très important qu’elle soit célébrée aujourd’hui car si on entend souvent parler des résistants, on connaît beaucoup moins les résistantes. »

Danielle, 69 ans, commerciale. « Mon père était marocain et du fait de son influence politique, il a été arrêté par la milice française. C’est à la suite de ça que le roi du Maroc a donné la nationalité marocaine à tous les juifs pour les protéger. En France, des gens de ma famille ont porté l’étoile jaune. J’avais ce passé familial en tête en venant, mais aussi les récents attentats… C’était important d’être là. »

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