Tesson : Hollande, le stratège de l’illusion

Immobile face aux réformes, le président joue les illusionnistes avec la réforme du collège et celle du mariage pour tous. Trois ans pour rien.

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"Se pose la question de la légitimité, non pas juridique évidemment, mais politique et morale d’un président au pouvoir depuis trois ans", lâche Philippe Tesson. © AFP

Temps de lecture : 4 min

C’est un sentiment mêlé d’écoeurement et de lassitude qu’on éprouve au lendemain de la fièvre qui a saisi le pays à propos de la réforme des collèges. Non seulement le président de la République et le Premier ministre ont cautionné une décision culturellement désastreuse, mais ils ont géré la crise qu’elle a engendrée dans des conditions inadmissibles, au mépris de la plus élémentaire concertation. Ce coup de force, dont la brutalité traduit la faiblesse de ceux qui l’ont commis, n’ira pas sans conséquences. Il met en effet au jour une fracture qui intéresse la morale et la culture, bien au-delà des engagements politiques. À la faveur de cet accident, la gauche elle-même, traversée depuis trois ans par des doutes et des inquiétudes portant sur les vertus de l’homme qu’elle a installé au pouvoir, prend une conscience plus aiguë de l’ambiguïté de celui-ci et de celle de son entourage.

Cette fois, c’est une partie précieuse d’elle-même, et qui dans sa majorité lui était historiquement acquise, on veut parler des élites intellectuelles, qui se sent atteinte voire insultée par un acte régressif et une méthode irrespectueuse.

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Au fait, où en est le pacte de responsabilité ?

Et se pose ici de nouveau la question de la légitimité, non pas juridique évidemment, mais politique et morale d’un président au pouvoir depuis trois ans et qui, de son propre aveu, ambitionne de s’y maintenir au-delà de son mandat en dépit du désaveu qu’il n’a cessé de subir de la part de l’opinion. Comprendra-t-on enfin qu’il n’a cessé de gouverner en donnant le change de son incapacité à le faire que par une stratégie de l’illusion dont la "réforme" est le maître mot qui le tient quitte de tout résultat ? Aurait-il réformé et réformerait-il dans le sens de l’intérêt commun et sur des enjeux essentiels qu’on lui en ferait crédit, même s’il l’avait fait dans des directions idéologiques qu’on réprouverait. Au moins saluerait-on alors son énergie et son courage. Mais quelle réussite peut-il porter à son actif en regard des engagements majeurs qu’il avait pris ? Et auxquels de ceux-ci a-t-il donné priorité, à commencer par l’emploi, la croissance, la compétitivité, la fiscalité, la justice sociale, la jeunesse, tous domaines dont il avait juré de résoudre les problèmes ? Et lorsque priorité fut donnée, à quel prix ce fut, au prix de quelles hésitations et de quels louvoiements ? Au fait, où en est le pacte de responsabilité ? Quels authentiques succès peut-il revendiquer, sinon en matière de politique militaire, terrain sur lequel il a efficacement agi, mais qui, serviraient-ils l’honneur de la France, ne servent pas les conditions de vie matérielle des Français ?

La stratégie de l'artifice jusqu'à la caricature

Que de prolixité, en revanche, que d’annonces s’agissant de réformes catégorielles sur les chapitres les plus divers ! Que d’intentions exprimées ! C’est la société qu’on allait transformer. Faisons aujourd’hui le bilan de la réforme : combien d’avortements, combien d’ajournements, et pour si peu d’authentiques mises en chantier, la caricature de cette stratégie de l’artifice restant le fameux mariage pour tous ?

Alors est apparue la réforme des collèges. Celle-ci avait un sens. Elle s’attaquait à un problème essentiel : le savoir, son apprentissage et l’avenir des enfants, un problème qu’aucun gouvernement n’a réussi à résoudre depuis plus d’un demi-siècle. Un terrain de choix pour la gauche, l’occasion d’un rachat après trois années d’approximations et de faux-semblants dans sa politique de réforme.

Or cette occasion, elle vient de la manquer. Le pire est qu’elle disposait pour la saisir du matériel humain le plus acquis pour réaliser ce projet, le plus capable de s’y associer et le plus intéressé à son succès. Imposée par décret sans que les représentants du peuple aient été consultés et dans le mépris absolu des praticiens de l’enseignement, cette réforme a d’ores et déjà échoué. Sous le couvert d’une double volonté d’excellence et d’égalité, deux ambitions illusoires, elle a essentiellement répondu à un souci idéologique. Nourrie par le sectarisme haineux de ses auteurs, elle a été encouragée par la lâcheté d’un pouvoir préoccupé par ses seuls calculs politiques.

Cette histoire illustre et résume celle de l’actuel mandat présidentiel. Un mystificateur rusé aura gouverné durant trois ans la France au moyen de trois procédés : la tromperie sur la marchandise, la fuite devant la réalité et l’arrogance joviale.

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Commentaires (36)

  • chrisyl

    Aucune alternative possible... Le RPS (ex UMPS) s'annonce de cette trempe dont sont fait les incapables. Beaux parleurs et inaptes. Nous ne parlerons pas des alternatives... Bref, rien ne changera ici. Le bateau France continuera droit vers l'iceberg machines avant toute...
    Aucune réforme digne de ce nom car contre électorale dans un pays fonctionnarisé où les derniers votants profitent des largesses du système...
    Mêmes les canots de sauvetage sont insuffisants...
    Que d'analogies avec ce joyau des mers...

  • voltairius

    Les politiques sont nos boucs émissaires, les responsables des malheurs de la France et des français, la perte de beaucoup d'industries, la décadence de notre éducation nationale, de tout ce qui va mal depuis longtemps, depuis que droite et gauche se sont succédé... Alors à qui la faute ? Il y a quelque temps, nos voisins suisses ont, par une de leurs "votations" refusé une baisse de leur temps de travail et pourtant leur salaire moyen tourne autour de 5000 euros/mois !
    Nous avons eu les gouvernements que nous avons voulu et mérité alors ne nous plaignons pas, profitons de nos ponts, du soleil, des RTT et votons pour tous ces "incapables "qui nous gouvernent en vilipendant ces grecs qui ne veulent pas rembourser leurs dettes. Peut-être viendra un jour où nous devrons aussi rembourser les nôtres alors profitons en "laissant le temps au temps" comme disait Tonton qui "avait tout essayé contre le chômage". Vive la France, la République et les aviateurs... !

  • Pseudolulu

    Et, F. HOLLANDE s'apprête à en remettre une deuxièle couche. 33% de socialios-communistes - 33% de droite républicaine - 33% de droite extrème... Même, minoritaire, pour la gauche, toutes tendances confondues, la partie est jouable. (pourcentage approximatif... )

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