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Le grand invité Afrique

Nucléaire: pourquoi l'Afrique du Sud a choisi la Russie?

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L'Afrique du Sud a finalement choisi la Russie pour son futur parc nucléaire. Un protocole d'accord signé à Vienne par les deux pays prévoit jusqu'à huit réacteurs. C'est un désaveu pour la France, qui convoitait depuis longtemps le plus grand marché public de toute l'histoire de l'Afrique du Sud - il pourrait porter sur 40 milliards d'euros. Le ministre russe des Affaires étrangères Serguei Lavrov rentre tout juste d'une longue tournée en Afrique. Moscou, après avoir longtemps délaissé le continent, manifeste de plus en plus un regain d'intérêt pour l'Afrique.Eugène Korendyasov a été ambassadeur de la Russie dans trois pays d'Afrique. Il dirige le Centre de recherches sur les relations russo-africaines à l'Académie des sciences de Moscou.

Centrale nucléaire.
Centrale nucléaire. lenergeek.com
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RFI : Eugène Korendyasov, en quoi est-ce que le contrat nucléaire sud-africain est une importante victoire pour Moscou?

Eugène Korendyasov : C’est très important. C’est un accord qui était très, très attendu. La Russie a beaucoup d’expérience et beaucoup de maîtrise en ce qui concerne l’énergie atomique.

Le document n’exclut pas un éventuel transfert de technologie?

D’après le texte, si on participe à une création industrielle dans le domaine de l’énergie atomique, certainement des technologies, le transfert des technologies ou d’une partie des technologies est absolument prévisible.

Et au-delà, l’Afrique du Sud avait-elle des raisons politiques selon vous, de se tourner vers Rossatom en Russie et non vers le Français Areva par exemple, qui convoitait également cet important contrat?

Je crois qu’il y a des sentiments politiques peut-être liés avec la solidarité dans la lutte contre le régime d’apartheid. Comme l’Union soviétique de l’époque a puissamment aidé les luttes pour l’élimination du régime d’apartheid, peut-être que les sentiments ont joué.

C’est vrai que la Russie durant le régime apartheid a accueilli des boursiers de l’ANC qui sont ensuite devenus, pour certains ministres, pour d’autres présidents. Est-ce que ce n’était pas aussi important pour le forum des Bricks qui regroupe le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud ? Car ce contrat finalement est signé par deux membres des Bricks. Cela donne de la substance à ce forum?

Vous avez absolument raison. Cet élément appartient à ce nouveau centre de politique internationale que constitue aujourd’hui les Bricks. Cela a joué un rôle positif et peut-être un rôle simulateur.

La Russie s’est désintéressée de l’Afrique durant les années 90. Est-ce qu’on peut désormais parler d’un regain d’intérêt 

C’est absolument vrai. Il y a un grand regain d’intérêt de la part des grosses compagnies de Russie envers l’Afrique. Il y a beaucoup de facteurs qui jouent. D’abord l’Afrique c’est un grand continent. Ensuite, nos deux parties ont beaucoup en commun dans le domaine international, l’hostilité aux tentatives d’hégémonie.

Et il est important de pouvoir s’afficher avec des partenaires en Afrique, notamment au moment où la Russie est mise au banc par les pays de l’Union européenne et par les Etats-Unis?

Vous savez, c’est une histoire à part tout à fait passagère. Mais avec l’Afrique c’est depuis très longtemps que ce regain d’intérêt se prépare et actuellement les plus grosses sociétés russes sont déjà impliquées dans le business en Afrique.

Et de façon plus générale, comment décririez-vous l’approche de la Russie en Afrique ? En quoi est-ce qu’elle se distingue de l’approche de la France, des Etats-Unis, de la Chine ou encore du Brésil?

Les hiérarchies de priorité sont forcément différentes. Avec la France pas toujours, mais le plus souvent on était ensemble pour la cause africaine. Mais, on ne comprend pas. On est ces derniers temps un peu surpris de certaines escapades. C’est peut-être des incidents de parcours.

Vous parlez de la Libye?

Je parle surtout de la Libye. Ça m’a surpris personnellement quand j’ai regardé à la télévision les embrassades de l’ancien président avec Kadhafi. Et deux mois après, ou presque, il y a les rafales qui arrivent et qui bombardent. Ça m’a un peu surpris.

Votre ministre des Affaires étrangères, Serguei Lavrov, s’est rendu au Zimbabwe où des contrats d’exploitation minière ont été signés. La question du non respect des droits de l’homme dans certains pays africains n’empêche pas la Russie de faire des affaires avec ces régimes?

Vous savez, nous avons certaines différences de position. Nous respectons la souveraineté des Etats africains. Et puis les problèmes de droit de l’homme dans le contexte de chaque pays, surtout en Afrique, se pose d’une façon différente. Les Français s’embrassaient avec les Zaïrois à l’époque de Mobutu. Et on ne pouvait pas dire que Mobutu était le champion dans le domaine de la démocratie. Et puis le business et le problème politique... Nous respectons la politique et les positions de nos partenaires africains si ça ne porte pas atteinte au droit international et à d’autres normes généralement admises dans le monde.

Est-ce que la Russie envisage de vendre des armes, par exemple au Zimbabwe, en échange des concessions minières?

Vous savez, dans les technologies de commerce il y a ce que l’on appelle les contrats offset, quand un contrat est accompagné d’un autre contrat de compensation. Si le Zimbabwe s’intéresse aux armes et achète les armes, et s’il les paie avec les concessions, pourquoi pas.

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