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"Les victimes d'erreurs médicales veulent juste comprendre pourquoi"

L'accident d'anesthésie a eu lieu dans cette maternité, à Orthez.

L'accident d'anesthésie a eu lieu dans cette maternité, à Orthez. - Street View

Mardi soir, une jeune femme est décédée après un accident d'anesthésie. Entretien avec Me Philippe Courtois, spécialiste de ces dossiers.

Mardi soir, une jeune femme de 28 ans est morte d’un arrêt cardiaque peu après avoir accouché à Orthez, dans les Pyrénées-Atlantiques. Un drame qui aurait pu être évité, selon les premiers éléments de l’enquête: la jeune femme a subi une anesthésie générale pendant une césarienne. Or, l'anesthésiste, âgée de 45 ans, souffre d’un "problème d’alcool pathologique", et n’était pas dans son état normal au moment de l’intervention.

Entretien avec Me Philippe Courtois, spécialiste du droit de la santé, et défenseur de nombreuses victimes d’erreurs médicales.

L’anesthésiste peut-elle être poursuivie pour homicide volontaire si elle était réellement ivre?

Non, cela reste un homicide involontaire, avec circonstances aggravantes cependant. Sauf si l’instruction démontre qu’elle voulait délibérément tuer cette patiente, mais selon les premiers éléments de l’enquête, nous sommes très loin de ce cas de figure. Elle risque jusqu'à cinq ans d'emprisonnement.

Si sa culpabilité est reconnue, l’hôpital peut-il être poursuivi pour l’avoir laissé exercer?

Tout dépend si l’hôpital connaissait son état d’ivresse ou non. L’hôpital est responsable de ses salariés, donc dans tous les cas, s’il y a une condamnation au civil, l’assurance de l’établissement devra indemniser les proches de la victime. Au pénal, si l’hôpital ne connaissait pas son état, seule l’anesthésiste peut être condamnée. En revanche, si l’on démontre que la direction connaissait son "problème d’alcool pathologique", c’est gravissime et leur responsabilité au pénal peut être engagée.

Que doit-on faire en cas d’erreur médicale?

Il faut décider si l’on veut engager des poursuites au pénal ou au civil. Ces procédures judiciaires sont longues, principalement au pénal, où il faut attendre plusieurs années avant une éventuelle condamnation, et où il y a des frais parfois importants. Mais on peut aussi accepter une indemnisation à l’amiable, ou bien saisir la commission régionale de conciliation et d’indemnisation, qui prendra en charge le coût des expertises médicales. Je conseille toujours de saisir cette commission avant d’attaquer en justice, afin d’avoir déjà des expertises contradictoires dans le dossier. On économise ainsi du temps et de l’argent.

Que veulent les proches des victimes d’erreurs médicales que vous rencontrez?

La vérité, tout simplement. Ils n’attaquent pas en justice pour obtenir des indemnisations élevées, ils le font uniquement pour comprendre. Comprendre pourquoi sa femme est morte alors qu’elle donnait naissance à son bébé. Comprendre pourquoi on devient handicapé après une opération banale aux cervicales. Je regrette d’ailleurs qu’une grande partie des médecins ne sortent pas plus souvent du bloc opératoire pour expliquer aux familles ce qu’il s’est passé réellement. Cela éviterait de nombreuses poursuites judiciaires.

Pour plus d'informations, vous pouvez contacter l'association d'aide aux victimes d'accidents corporels, au 05.56.42.63.63.

Alexandra Gonzalez