Mort de Christophe de Margerie : une «négligence criminelle» selon Moscou

 

Mort de Christophe de Margerie : une «négligence criminelle» selon Moscou

    Après s'être réuni à la hâte dans la nuit, les responsables du groupe Total ont confirmé l'information ce mardi matin. Le PDG de l'entreprise, Christophe de Margerie, 63 ans, est décédé quelques heures plus tôt dans un accident d'avion à l'aéroport de Vnoukovo, près de Moscou (Russie). Des questions subsistent sur les circonstances du crash du jet privé, dans lequel trois autres personnes ont trouvé la mort.

    Les médias russes s'interrogent notamment sur la présence d'une déneigeuse sur la piste au moment du décollage. Selon les premiers éléments de l'enquête, le conducteur de l'engin était ivre. «Il ne s'agit pas d'un tragique concours de circonstances, mais d'une négligence criminelle des fonctionnaires» qui ont échoué à coordonner dûment le travail de leurs employés, a affirmé à la mi-journée le comité d'enquête russe. Il a précisé que certains membres de la direction de Vnoukovo qui pourraient tenter d'entraver l'enquête seraient prochainement «suspendus de leurs fonctions».

    Les boîtes noires de l'appareil ont été rapidement récupérées par les experts dépêchés sur place. Le Bureau d'enquête et d'analyse pour la sécurité de l'aviation civile (BEA) français a annoncé qu'il dépêchait dans la journée trois enquêteurs à Moscou pour tenter d'éclaircir les conditions de cet accident. En outre, le parquet de Paris a décidé l'ouverture d'une enquête.

    C'est avec «une grande émotion et une profonde tristesse» que le groupe pétrolier a confirmé la mort de son président-directeur général «cette nuit peu après 22 heures (heure de Paris)» à la suite «d'une collision avec un engin de déneigement».

    VIDEO. Mort de Christophe de Margerie : les employés de Total sous le choc

    Le conducteur de la déneigeuse «en état d'ivresse»

    Le ministère russe des Situations d'urgence a précisé que l'accident du jet Falcon-50, exploité par la compagnie Unijet, était survenu au décollage. L'appareil a heurté l'engin de déneigement, un choc qui a endommagé son fuselage et son train d'atterrissage. Le pilote a réussi dans un premier temps à prendre de l'altitude, mais le Falcon s'est écrasé et a pris feu.

    Un temps annoncé mort, le conducteur du véhicule s'en est finalement sorti. Dans la nuit, les médias russes ont également annoncé que les trois membres d'équipage décédés, deux pilotes et une hôtesse, étaient de nationalité française, citant des sources aéroportuaires et policières. Ce mardi matin, Total n'était pas en mesure de confirmer leur nationalité, indiquant seulement que la compagnie est française.

    VIDEO. Les premières images du crash

    Une enquête a rapidement été ouverte auprès du Comité intergouvernemental d'aviation ainsi qu'à l'agence fédérale d'aviation russe. Le directeur de cette dernière, Alexandre Neradko, a d'ores et déjà évoqué de mauvaises conditions météorologiques, avec un ciel très nuageux, du brouillard et beaucoup de pluie. Soit une visibilité d'à peine 350 mètres. Mais «il a été établi que le conducteur de la déneigeuse était en état d'ivresse», a ensuite précisé le comité.

    Unijet, qui exploitait le Falcon-50, a de son côté indiqué qu'elle collaborerait «étroitement avec les autorités russes et françaises qui sont en train d'analyser les circonstances de l'accident».

    VIDEO. Mort de Margerie : «Une négligence criminelle», selon Moscou

    Margerie sortait d'une rendez-vous avec Medvedev

    Dans son dernier discours prononcé lundi soir en Russie, le PDG de Total appelait Moscou à «faire ce qui est nécessaire pour corriger la situation» liée à la crise ukrainienne. S'exprimant devant notamment le chef du gouvernement russe Dmitri Medvedev, à l'occasion d'un rendez-vous entre officiels russes et grands patrons, Christophe de Margerie avait répété son hostilité aux sanctions imposées à la Russie, qu'il a jugées «à la fois injustes et improductives».

    «Si nous voulons que des investissements étrangers stables et de long terme continuent à arriver en Russie, nous devons restaurer un espace économique stable et pacifique entre la Russie et nos pays», a défendu le patron du géant pétrolier, ajoutant: «Notez que je donne des conseils similaires à mon propre gouvernement». La Russie est très importante dans la stratégie du groupe, qui ambitionne d'en faire sa principale zone de production d'hydrocarbures à l'horizon 2020. Total est également partenaire du russe Novatek dans le gigantesque projet gazier Yamal, dans le Grand Nord.

    Le PDG de Total, qui s'était également entretenu avec le Premier ministre russe Dmitri Medvedev, dans sa maison de campagne près de Moscou, bénéficiait de contacts privilégiés au sommet de l'Ã?tat russe. Des liens dont témoignent l'hommage que Vladimir Poutine a rendu ce mardi à l'homme d'affaires, le président russe insistant sur son rôle dans les relations franco-russes.

    VIDEO. La reconstitution en 3D de l'accident

    VIDEO. Mort de Christophe de Margerie : l'avion a percuté un chasse-neige