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Comment Obama, privé de Congrès, compte agir sur l'immigration

Le président américain, qui n'a plus de majorité législative, peut utiliser des décrets pour régulariser des millions de clandestins aux Etats-Unis.

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Publié le 21 novembre 2014 à 16h11, modifié le 21 novembre 2014 à 18h51

Temps de Lecture 4 min.

Le président américain, qui n'a plus de majorité législative, peut utiliser des décrets, les

Le président américain, Barack Obama, a annoncé jeudi 20 novembre un vaste dispositif, présenté comme temporaire, visant à régulariser des millions de clandestins présents aux Etats-Unis. Le leader démocrate a ainsi envoyé un signal de défi au Congrès, majoritairement républicain depuis la victoire des conservateurs aux élections du 4 novembre.

M. Obama avait prévenu fin juin qu'il userait de ses pouvoirs exécutifs si le Congrès, alors partagé entre un Sénat démocrate et une Chambre des représentants républicaine, ne parvenait pas à un compromis.

Lire l'article de notre correspondant : Barack Obama passe à l'offensive sur l'immigration

Quel moyen Obama va-t-il utiliser ?

Le président américain dispose de plusieurs pouvoirs inhérents à son statut de chef de l'exécutif, parmi lesquels :

  • un droit de veto lui permettant de rejeter une loi du Congrès – ce dernier pouvant tout de même finir par avoir gain de cause s'il rassemble une majorité des deux tiers ;
  • le pouvoir de négocier des traités internationaux, comme cela a été le cas dernièrement avec la Chine sur la réduction des émissions de CO2 – mais la signature dépend du Sénat, dont la majorité des deux tiers est là encore nécessaire ;
  • le pouvoir d'engager des troupes militaires dans le cadre d'une opération – mais c'est le Congrès qui peut, au niveau diplomatique, déclarer ou non la guerre à un pays ;
  • le droit d'émettre un décret présidentiel (« executive order »).

C'est ce dernier droit que Barack Obama va utiliser dans le cas de la réforme sur l'immigration. Distinction subtile, le décret présidentiel n'est toutefois pas au même niveau que la loi – puisque le président ne peut pas cumuler le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.

Le décret présidentiel n'est donc pas une loi mais un complément sur la façon de l'appliquer. Dans le cas de l'immigration, explique le site Vox, Barack Obama n'a pas lui-même le pouvoir d'attribuer un statut légal à quiconque sur le territoire américain mais peut donner des directives pour légaliser en priorité tel ou tel profil.

15 246 Les « executive orders » sont utilisés de manière inégale par les présidents américains. Au total, 15 246 décrets ont été émis depuis le premier président, George Washington, en 1789. Franklin D. Roosevelt a été, de loin, le plus prolifique en la matière (3 522 décrets) mais l'usage intensif qu'il en a fait s'explique par le contexte de la Seconde Guerre mondiale. Plus récemment, les présidents, qu'ils soient républicains ou démocrates, y ont eu recours entre 100 et 250 fois par mandat.

Une étude menée par le politologue Kenneth Mayer et publiée en 2001, couvrant la période 1936-1999, avait montré que l'organisation administrative et la fonction publique étaient les principaux domaines d'intervention (respectivement 25,5 % et 19,6 %).

« Barack Obama se comporte comme un roi »

Les « executive orders » sont depuis longtemps l'objet de vives discussions aux Etats-Unis. Les décrets ne sont pas prévus en tant que tels dans la Constitution, parfois vague dans sa formulation. Les présidents successifs ont ainsi interprété à leur avantage l'article 2, section 3 du texte, qui prévoit que le chef de l'Etat « veillera à la bonne exécution des lois ».

Après l'annonce de Barack Obama sur l'immigration, des républicains ont dénoncé des mesures « anticonstitutionnelles », le président de la Chambre des représentants, John Boehner, affirmant que le locataire de la Maison Blanche se comporte comme « un roi ou un empereur ».

Avant jeudi, des élus avaient même menacé de poursuivre le président en justice pour abus de pouvoir, au motif qu'il prenait une décision que ne souhaitait pas le Congrès.

Selon le Centre national de la Constitution américain, les républicains ont plusieurs options pour tenter de s'opposer à la décision présidentielle :

  • un recours devant la Cour suprême, seule à même d'annuler le décret (recours obtenu en 1952 contre le président Truman, qui avait fait prendre le contrôle d'usines d'acier pendant la guerre de Corée, et en 1995 contre Bill Clinton, qui avait interdit aux administrations de signer des contrats avec des entreprises remplaçant des grévistes) ;
  • une poursuite en justice de la Chambre des représentants contre le président Obama ;
  • une poursuite en justice des Etats contre le président Obama, comme a menacé de le faire le gouverneur du Texas, Rick Perry ;
  • s'attaquer au portefeuille du gouvernement fédéral en réduisant le budget des administrations en lien avec l'immigration ;
  • tenter d'abroger le décret présidentiel par une loi – mais Barack Obama y opposerait probablement son veto, ce qui obligerait le Congrès à tenter de rassembler une majorité des deux tiers.
  • ouvrir une procédure d'« impeachment » (destitution du président), solution la plus radicale et la moins probable car elle requiert une majorité des deux tiers au Sénat après approbation de la Chambre des représentants.

De son côté, Barack Obama a répondu aux critiques en suggérant aux républicains de « voter une loi » sur l'immigration, pour répondre au vaste problème de la clandestinité. Onze millions de personnes séjourneraient illégalement aux Etats-Unis. « Des expulsions de masse seraient à la fois impossibles et contraires à nos valeurs », a assuré le président américain jeudi lors de son allocution.

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