Procès DSK : où sont les femmes ?

Procès DSK : où sont les femmes ?
Dominique Strauss-Kahn (MARTIN BUREAU / AFP)

Sur la dizaine de femmes auditionnée pendant l’enquête, seule deux doivent témoigner lors du procès. Deux autres veulent se constituer partie civile lundi.

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Elles ne sont parfois connues que sous leur pseudo. "Jade" pour Sandrine, "Marion" pour Marie-Anne, "Estelle" pour Aurélie. Lors des soirées "libertines" à Lille, Paris ou Washington, d’autres ne dissimulaient même pas leur prénom. Mounia. Florence.

Au cours des longs mois d’enquête de l’affaire du Carlton, toutes ces jeunes femmes qui se qualifient "d’escort girl" ont été interrogées parfois à de nombreuses reprises par les juges sur ces soirées "libertines" organisées autour de DSK par ses amis Lillois.

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Etaient-elles rémunérées ? Oui, chaque fois, répondent-elles. DSK était-il au courant de leur statut de prostituées ? Une des participantes est formelle : il le savait, elle lui en a parlé.

Les autres sont plus nuancées, et préfèrent répondre qu’il ne pouvait pas l’ignorer. Aujourd’hui, c’est notamment sur la base de ces témoignages féminins que Dominique Strauss-Kahn se retrouve devant le tribunal correctionnel de Lille pour proxénétisme en réunion. Pour les juges d’instruction, DSK n'ignorait pas que les filles qui participaient aux soirées étaient des prostituées. Les magistrats considèrent même que l’ancien patron du FMI était l’instigateur de ces soirées qualifiées "d'abattage" par certaines participants… La preuve ? Ces SMS où celui qui est alors le patron du FMI demandent à ses amis Lillois d’organiser des rencontres avec du "matériel."

"Il fallait dire que nous étions les amies de Fabrice"

Pourtant, sur cette petite quinzaine de femmes entendues pendant l’enquête, seules deux ont prévu de venir témoigner. Mounia et Sandrine, dite "Jade", sont les seules jeunes femmes à s’être portée partie civile. Et encore, elles ne veulent pas parler en public. Me Gérald Laporte, leur avocat, a demandé le huis clos pour protéger la vie privée de ses clientes… Deux autres jeunes femmes ont décidé a la dernière minute de se porter partie civile, mais peut-être trop tard pour que le tribunal accepte de les faire témoigner a la barre.

Pendant l’instruction, "Jade" a été la plus directe :

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Si ce monsieur considère qu’il ne pouvait savoir la qualité des filles présentes, c’est vraiment nous faire croire qu’il est naïf et nous prendre tous pour des cons, raconte-t-elle par exemple lors d’une audition. Toutes ces filles bien faites de leur personne, jeunes, complètement destinées à le satisfaire, il croyait quoi ? [...] Dans le libertinage il n’y aurait pas toutes ces filles sur un seul homme."

Parmi les autres filles entendues, toutes livrent peu ou prou les mêmes témoignages. Toutes expliquent qu’on leur demandait expressément de ne pas divulguer leur statut de prostituées. Elles devaient se faire passer pour des secrétaires, des décoratrices, des employées dans la pub… et des libertines. "Il fallait dire que nous étions les amies de Fabrice [Fabrice Paszkowski, NDLR] c’était ridicule, avait par exemple témoigné "Estelle". Elle poursuit : DSK "se rendait bien compte qu’on ne venait pas à Paris pour ses yeux." Un soir, DSK lui a même demandé combien elle était payée car "il voulait m’avoir en direct".

Inutile "d'avoir bac+10 pour comprendre"

Une jeune standardiste de radio, qui reconnaît avoir accepté de participer aux soirées avec DSK en espérant que des portes allaient s’ouvrir plus rapidement, ironise aussi devant les policiers : 

Je n’ai pas la preuve qu’il le savait mais franchement, patron de la banque du monde, il ne faut pas exagérer ni avoir bac +10 pour comprendre ce qu’il se passait. Il aurait été patron d’une boucherie, je peux vous dire qu’il n’aurait pas eu toutes ces filles autour de lui."

Concernant les soirées au Murano, du nom d’un hôtel parisien, "les participants ne pouvaient avoir aucun doute sur la qualité des prostituées", ajoute une autre. Pourquoi demandent les juges ? Dans les clubs libertins, il y a des couples, et pas des femmes seules.

Violette Lazard

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