Crèche : l'appli pour garder ses enfants à l'oeil

Pour la première fois, des crèches proposent aux parents des photos quasiment en direct de ce qui se passe en leur absence.

Crèche : l'appli pour garder ses enfants à l'oeil

    Quel parent n'a pas rêvé d'être une petite souris quand il dépose son enfant à la crèche ? Est-il aussi grognon qu'à la maison ? Avec qui joue-t-il ? S'occupe-t-on bien de lui ? Pour leur permettre de jouer les passe-murailles, le groupe privé de crèches Babilou teste depuis décembre dans ses 300 établissements une application gratuite, BabilouApp, qui permet aux familles de suivre, en photos, la journée de leurs tout-petits. Une première en France sous cette forme.

    En 2001, une crèche d'Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine) avait installé, comme aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne, une webcam pour que les parents puissent jeter un oeil sur leurs rejetons. Suscitant un tollé, l'expérience a tourné court.

    L'appli de Babilou répond au même objectif -- rassurer les familles --, mais sans que le personnel se sente épié. « Hier, on a posté la photo d'anniversaire de deux enfants à leurs parents. Et ce matin, on a immortalisé la visite de Benoît, un musicien venu initier les moyens à la guitare. On fait ce genre de clin d'oeil aux familles deux à trois fois par semaine, quand on a le temps », explique Julien Rouzière, directeur de la crèche Babilou Saint-Lazare à Paris. Les clichés postés sont soigneusement sélectionnés : « On s'interdit les images d'enfants dénudés ou en pleurs », précise-t-il.

    Et les parents, qui doivent donner leur accord, en redemandent ! Leurs mails en témoignent : « Supers instants ! Ã?a aide à traverser la journée sereinement. Continuez ! » écrit François. « Le sourire que vous donnez à nos enfants est un merveilleux réconfort ! » s'enthousiasme Camille. « Je suis vraiment heureuse pour Emile. Contente et sereine de le laisser à votre équipe », dit Françoise. Visiblement, ces images ont un effet souverain sur leur moral, d'autant que la crèche leur fait partager les progrès de leurs petits : une maman a ainsi pu constater quasi en direct que son bébé de 6 mois commençait à se retourner tout seul. Une autre a pu découvrir quelle était la bonne position pour que sa fille s'endorme facilement. « Pour nous, cette appli est aussi très gratifiante, même si, parfois, on doit prendre sur nos temps de pause pour l'alimenter, on a vraiment l'impression d'aider les parents », souligne Catarina, l'une des nounous.

    Il est vrai, ce fil de photos permet de lever le voile sur le jargon des pros de l'enfance : avant, quand on lui parlait « transvasements », « motricité fine » « latéralité acquise », Cédric, papa de Diane, 2 ans et demi, faisait semblant de comprendre. « En fait, c'était pour moi du chinois, avoue cet informaticien. Là, quand je la vois manipuler ses petits gobelets, enfin, je comprends ! C'est concret. L'autre jour, quand j'ai reçu une photo de Diane à l'aise dans un parcours difficile, j'ai réalisé qu'elle avait un bien meilleur équilibre que nous le pensions. Du coup, à la maison, quand elle commence à faire de l'escalade dans le salon, on lui donne plus de latitude », explique ce père, qui confesse se servir aussi de BabilouApp pour rappeler sa fille à l'ordre. Ce jeune papa a découvert que sa petite, au tempérament tonique, pouvait se concentrer sur un livre. « Alors, parfois, quand elle est trop excitée à la maison, on lui montre la photo : tu vois, là-bas tu peux rester calme, alors pourquoi tu n'y arrives pas à la maison ? » C'est bien ce genre d'utilisation qui fait tiquer des psys (voir l'encadré ci-contre), pour qui ce genre d'outil numérique risque d'inciter -- inconsciemment -- les parents à vouloir des « enfants modèles ».