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Une guerre des bandes terrorise les jeunes d'Epinay-sur-Seine

La bande du centre ville, ou Super M, est en rivalité avec celle d'Orgemont depuis des années.

ENQUÊTE/INFOGRAPHIE - Malgré plusieurs interpellations, une rivalité entre deux quartiers de cette ville de Seine-Saint-Denis rejaillit régulièrement sur la vie des collégiens et lycéens.

Mardi 3 mars, c'était sortie au forum des métiers pour les jeunes du collège Jean Vigo d'Epinay-sur-Seine, en Seine-Saint-Denis. L'établissement est situé au coeur du quartier populaire d'Orgemont, où s'élèvent de grandes tours construites à la va-vite dans les années 60. Comme tous les adolecents de leur âge, l'heure est venue pour les élèves de 3ème de Jean Vigo de s'interroger sur leur orientation. Reste que le forum des métiers en question se tenait au sein de l'espace Lumière au sein du centre-ville d'Epinay-sur-Seine. Et qu'à la différence de tous les élèves de leur âge, certains jeunes habitants de cette ville de Seine-Saint-Denis risquent tout simplement leur intégrité physique s'ils se promènent dans le centre-ville. Surtout s'ils viennent d'Orgemont, où est situé le collège Jean Vigo, et vice-versa s‘ils font partie de la bande du centre et qu'ils se promènent à Orgemont. Sur le chemin du retour du forum des métier, un adolescent a ainsi été roué de coups, en présence même des accompagnateurs et professeurs. Des jeunes se sont rués sur lui et l'ont tabassé.

Le quartier d'Orgemont à Epinay-sur-Seine.

Le garçon n'a pas porté plainte depuis. En cause, l'éternelle rivalité entre les deux bandes. Depuis aussi longtemps que les habitants de la ville s'en souviennent, les groupes sont en rivalité. Aux périodes d'accalmie succèdent inévitablement des pics de haute tension. «Déjà quand j'étais enfant, c'était compliqué entre les deux», raconte Yannick Trigance, conseiller municipal socialiste (opposition) à Epinay sur-Seine. L'omerta règne pourtant autour de ce conflit ancestral et larvé. «C'est toujours comme ça, confie une source policière au Figaro. Même quand nous parvenons à remonter le fil des évènements, que nous allons voir les victimes, elles refusent de porter plainte. D'autant plus que les agresseurs emploient des méthodes parfois humiliantes. Ils en chopent un et lui volent tous ses habits, par exemple. Le jeune n'aura pas envie que la nouvelle tourne qu'il a dû rentrer nu comme un ver chez lui», poursuit la même source.

«Entre le bac et ma vie, je choisis ma vie»

Depuis un an, le conflit a gagné, perdu, puis re-gagné en intensité. Comme dans un jeu d'échec grandeur nature, chaque camp chercherait à étendre son influence. «Depuis qu'un nouveau centre commercial a ouvert en centre-ville, les deux bandes veulent en gagner le contrôle», analyse Gérald Ascargorta, responsable des parents d'élèves au lycée Jacques Feyder, secoué par les violences.

epinay sur seine securite

En janvier, une délégation de lycéennes de Feyder a ainsi supplié la mairie de sécuriser leur trajet depuis Orgemont jusqu'au lycée, car elles doivent traverser le centre pour se rendre en cours, rapportait France Bleu Seine-Saint-Denis. «Évidemment qu'on est au courant de la guerre des bandes. On ne parle que de ça à Orgemont, confie Isa, devant les grilles du lycée. Ce sont surtout les garçons qui sont en cause. Nous, les filles, on est des victimes collatérales, et tout ce qu'on veut, c'est travailler», indique l'adolescente. «Les lycéennes nous demandaient en janvier d'affréter un car spécial pour pouvoir aller en cours, poursuit Yannick Trigance. Une m'a même dit qu'elle ne voulait plus aller en cours. ‘Entre le bac et la vie, je choisis ma vie', a -t-elle expliqué. C'est terrifiant qu'on en soit arrivé là.» Depuis, une voiture de police est stationnée en permanence devant l'entrée du lycée. «Une dizaine de lycéens ont aussi été transférés dans un autre établissement, avec l'accord de l'académie, ajoute Laurent Nimeskern, proviseur du lycée Feyder. Ils séchaient constamment les cours car ils avaient peur de venir. Après, on ne sait pas à quel point eux aussi étaient impliqués...»

«On peut interpeller le noyau dur, il se reformera inlassablement»

Si les Spinassiens font la grimace quand on leur demande si c'est la «guerre» entre les deux quartiers, l'accumulation des faits le laisse penser. Chaque évènement est tristement annonciateur d'un autre, puisqu'il convient à chaque camp de riposter, et chacun devient tout à la fois acteur et victime d'un engrenage. En janvier, un jeune a ainsi été hospitalisé après une rixe devant le lycée Feyder indiquait alors Le Parisien Seine-Saint-Senis. Les assaillants l'ont volontairement accroché à leur véhicule. Son frère a lui été blessé au visage par un coup de matraque téléscopique. Quelques jours plus tôt, un groupe de jeunes s'en était pris à des lycéens avec des armes blanches. Un jeune avait failli y perdre un doigt. Même sur son lit d'hôpital, le garçon avait refusé de donner le nom de ses agresseurs, indique toujours la presse locale. En mai dernier, une bagarre générale s'était déroulée dans le parc de la Chevrette. Les deux camps s'étaient chauffés à blanc sur les réseaux sociaux. Le lendemain, un match de football entre lycées se terminait à cause d'une attaque à coup de battes de baseball. Le même mois, un collégien était tabassé devant le collège Robespierre.

Sept meneurs de cette guerre ont pourtant été interpellés en février. Quatre d'entre eux sont mineurs, les autres sont de très jeunes majeurs. «On peut interpeller le noyau dur mais il se reformera inlassablement, regrette Mathieu Glaymann, animateur du collectif des parents d'élèves du 93. La jeunesse est tellement démunie ici à Epinay-sur-Seine! Ils ne peuvent même pas s'inscrire à un cours de sport, tout est complet. La mairie conseille aux familles touchées par la rivalité de porter plainte, mais ne met en place aucune politique de prévention.» La municipalité a en effet organisé une réunion publique avec les parents d'élèves en janvier pour inciter les familles à se livrer aux enquêteurs, dont le travail est entravé par la loi du silence. Quant au maire UDI de la ville, Hervé Chevreaux, il n'a pas souhaité répondre à nos multiples sollicitations.

Une guerre des bandes terrorise les jeunes d'Epinay-sur-Seine

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191 commentaires
  • Paco92

    le

    et la mixité sociale vouluepar notre gouvernement d'incompétents ? Là elle est impossible car personne n'a envie de se retrouver dans des quartiers aussi laids et dangereux.

  • belem33

    le

    moi qui cherchait un endroit où passer mes petites vacances d'été... en plus pas mal d'activités de détente de bonne camaraderie de savoir vivre ensemble.... j'ai du bol en plus d'être une femme nan mais vraiment je vais réfléchir j'hésite avec l'Espagne...

  • jai2zail

    le

    Et quand je pense qu'on a investi des milliards dans les banlieues !! de quel côté est venu le laxisme ? hou ! hou ! de quel côté ?? on ne va pas dans le mur, on EST dans le mur ! fracassés !

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