Communauté d'agglomération : Manhac sous pression

  • Christian Teyssèdre et Jacques Barbezange : les regards tournés vers l'avenir avec deux visions différentes.
    Christian Teyssèdre et Jacques Barbezange : les regards tournés vers l'avenir avec deux visions différentes. Photos DDM, J.-L. P.
Publié le , mis à jour
Propos recueillis par J.-L.P.

Le feuilleton Baraqueville, Camboulazet, Manhac, communauté d'agglomération du grand Rodez continue. Face à la complexité de la situation, rappelons ce qui alimente la chronique politique depuis le début de l'année.

Au 1er janvier 2014 les communes de Baraqueville et Manhac (par choix des élus de l'époque) et celle de Camboulazet (contrainte par le préfet) ont rejoint la communauté d'agglomération du grand Rodez, portant cette dernière à 11 communes, affaiblissant du coup la communauté de communes du Pays baraquevillois (CCPB) qui est passée de 10 à 7 communes et a surtout perdu sa commune la plus importante, Baraqueville. Aux élections municipales du mois de mars Jacques Barbezange a été élu maire de Baraqueville, battant le maire sortant Marie-José Marty, avant d'organiser le 29 juin, comme il s'y était engagé, une consultation de la population baraquevilloise pour savoir si elle souhaitait rester ou sortir du grand Rodez. À 66,38 % elle a souhaité quitter l'agglomération ruthénoise.

À Manhac, qui est aujourd'hui au cœur du dossier, Bernard Calmels a été élu maire sans jamais cacher son intention de vouloir rester au grand Rodez. Il faut préciser que le seul candidat qui s'est présenté contre la liste de Bernard Calmels, favorable au retrait de Manhac du grand Rodez, a lui aussi été confortablement élu. Devant la volonté de la nouvelle majorité des élus Barquevillois et des élus de Camboulazet (qui ont toujours été favorables) de vouloir sortir du grand Rodez, les deux conseils municipaux ont pris majoritairement une délibération en ce sens. Manhac, dont la décision est très attendue, ne s'est toujours pas prononcé et a jusqu'au 25 décembre pour le faire.

Du côté de la CCPB, qui est passée de 9500 à 5000 habitants, on souhaite ardemment faire revenir les trois communes précitées avec, en point de mire la création d'une entité grand Ségala qui, des portes du Tarn aux portes de Rodez, pourrait regrouper la CCPB, la communauté de communes du Naucellois, la communauté de communes Viaur-Céor-Lagast, la communauté de communes Aveyron-Ségala-Viaur et, pourquoi pas, Rieupeyroux. Aujourd'hui, les trois communes, pour des raisons administratives et techniques ne peuvent pas quitter le grand Rodez avant le 31 décembre 2015. Ce qui n'a pas empêché la CCPB de délibérer le 25 septembre pour revenir à 10 communes, le grand Rodez ayant un délai de trois mois (jusqu'au 25 décembre…) pour se prononcer à son tour. Lundi dernier les élus de la CCPB ont organisé une réunion d'information auprès de la population du Ségala qui a attiré 900 personnes. Ce jeudi, c'était au tour des élus des communes du grand Rodez à êtres invités pour écouter les arguments de Didier Mai-Andrieu (président de la CCPB) et de Jacques Barbezange notamment. Deux maires étaient présents : Florence Cayla (Sébazac) et Patrick Gayrad (Druelle) ainsi que de nombreux élus des communes du grand Rodez. Maintenant place va être donnée aux décisions politiques. Ce mardi 4 novembre le conseil d'agglomération du grand Rodez (qui avait jusqu'au 25 décembre) va délibérer pour savoir s'il accorde ou non le bon de sortie à Baraqueville et Camboulazet. Un vote pour rien, Manhac ne s'étant pas encore prononcé ? Et une décision qui ne préjuge en rien de l'avenir, les communes devant à leur tour se prononcer (lire encadré) ! La séance de mardi soir, au grand Rode, z risque, sinon d'être agité, d'être au moins très suivie…


Comment ça marche ?

Pour que Baraqueville, Camboulazet, Manhac quittent le grand Rodez, plusieurs conditions doivent êtres remplies, avec plusieurs cas de figure.

1 : Manhac décide de rester au grand Rodez, les deux autres communes ne peuvent plus partir car Manhac deviendrait enclave du grand Rodez ce qu'interdit la loi.

2 : Manhac décide de partir, il faut que les élus du grand Rodez soient majoritairement favorables au départ des communes, mais ça ne suffit pas. Il faut, après, que chaque conseil municipal des communes du grand Rodez délibére. Et là, il faut que les 2/3 de la population représentée sur le territoire de l'agglo soit favorable au départ. Mais les élus ruthénois représentent plus d'1/3 de la population (de fait les autres communes n'atteignent pas les 2/3), s'ils votent contre le départ de Baraqueville, Camboulazet et Manhac, le grand Rodez restera avec ses 11 communes. Pas simple, on vous l'accorde.


B. Calmels : «On va consulter la population»

Maire de Manhac depuis le mois de mars, Bernard Calmels avoue «être pris dans le feu de l'action, avec le conseil municipal on a les nerfs à vif…» Le maire, qui précise avoir toujours dit pendant sa campagne qu'il souhaitait rester au grand Rodez argumente : «Quand je me projette dans l'avenir je ne peux pas éviter le grand Rodez, les enfants de Manhac naissent à Rodez, beaucoup de Mahnacois finissent leurs jours à Rodez, les courses sont faites à Rodez, les gens travaillent à Rodez. Face à cette pression exercée, on est en train de préparer un communiqué que l'on va distribuer dans toutes les boîtes aux lettres, mercredi je rencontre le préfet et, en suivant, on va organiser une consultation de la population pour qu'elle se détermine. Ensuite le conseil municipal votera. Dites bien que je ne veux la guerre avec personne...»


Ce qu'ils en pensent

Didier Mai-Andrieu (président de la CCPB) : «Jeudi soir, on a pu expliquer les problématiques financières liées au départ de Baraqueville, Camboulazet et Manhac. Je ne comprends pas cette précipitation de Christian Teyssèdre à vouloir délibérer mardi, il avait jusqu'au 25 décembre. En plus Manhac ne s'est toujours pas prononcé.»

Christian Teyssèdre (maire de Rodez, président du grand Rodez) : «Si on délibère ce mardi c'est à la demande de Jacques Barbezange qui a souhaité qu'une délibération soit prise le plus rapidement possible. Au 1er janvier 2018 les critères pour les communautés de communes seront fixés par les bassins d'emplois. Chiffres de l'INSSE, 1,3 % de baraquevillois travaillent à Naucelle, 33 % à Barqueville, 48 % sur le grand Rodez. Ou est la cohérence territoriale, aller vers Naucelle ou rester au grand Rodez ? Au niveau financier, entre les recettes liées à la venue des 3 communes et les dépenses, ça coûte 175 725 € au grand Rodez, j'aimerais qu'il y ait une sincérité sur les chiffres. Je rappelle aussi qu'à la réunion de la CDCI (commission départementale de cohérence intercommunale) où ont été évoquées ces arrivées, elle a été d'accord.»

Jacques Barbezange (maire de Baraqueville, vice président du grand Rodez) : «C'est vrai, j'ai demandé qu'une décision soit prise sans attendre fin 2015, mais on pouvait attendre le 25 décembre et la décision de Manhac. Le fait d'être au grand Rodez coûte 460 000 € en reprise de charge à la commune. De 2014 jusqu'en 2020, du fait que le grand Rodez est une «communauté riche» Baraqueville perdrait 1 million d'euros de dotation de l'État. Je rappelle que l'INSEE qualifie Baraqueville de bassin de vie, ça a été redit jeudi soir. Enfin la délibération de mardi soir sera illégale, Manhac ne s'étant toujours pas prononcé.»

Bruno Bérardi (conseiller communautaire d'opposition au grand Rodez) : «Depuis 2011 je me suis exprimé, et voté, contre l'entrée des 3 communes au grand Rodez, c'était un vote à l'aveugle, on n'avait aucune connaissance des impacts financiers. Il faut prendre en compte l'expression des Baraquevillois, les écouter, ce sont eux les mieux placés pour savoir par qui ils veulent être gérés. Je regrette aussi que Christian Teyssèdre ait refusé à Jacques Barbezange de venir s'expliquer devant le conseil municipal de Rodez, il a été reçu dans d'autres mairies.»

Florence Cayla (maire de Sébazac, vice-présidente du grand Rodez) : «En allant à la réunion de jeudi, où j'ai répondu de façon républicaine, je n'ai pas appris grand-chose sur les aspects financiers, je les connaissais, Jacques Barbezange a été reçu par mon conseil municipal. Je trouve que dans ce contexte la décision des élus de Manhac est difficile à prendre. Pour le vote de mardi ? C'est une décision qui n'a pas été prise par le bureau du grand Rodez… Il n'y avait pas urgence. Pour moi la question du vote ne se pose pas, Manhac n'ayant pas pris sa décision le vote ne pourra être pris en compte, donc ça sert à rien de voter.»


Deux collectifs

Il semblerait que deux collectifs sont en train de se constituer : «Baraqueville actif» serait favorable à la situation actuelle alors que le collectif «Sauvons le Ségala» voudrait revenir à la situation d'avant le 1 er janvier 2014. Un communiqué reçu de la part de ce dernier collectif mais dont les auteurs veulent rester anonymes ne nous permet pas de le publier.