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Les familles des moines de Tibéhirine dénoncent une "confiscation des preuves" par Alger

Pour la première fois depuis le début de l'enquête, des juges français ont pu se rendre dans le monastère où résidaient les moines de Tibéhirine.

Pour la première fois depuis le début de l'enquête, des juges français ont pu se rendre dans le monastère où résidaient les moines de Tibéhirine. - Fayez Nureldine - AFP

Les familles des moines français assassinés en 1996 en Algérie ont exprimé jeudi leur déception, alors que les autorités algériennes empêchent le rapatriement des crânes en France pour effectuer des analyses.

Les dernières avancées de l'enquête permettaient de faire renaître un peu d'espoir chez les familles des moines de Tibéhirine. Un optimisme que vient de doucher Alger en interdisant aux enquêteurs de ramener en France les crânes de ces religieux assassinés en Algérie en 1996.

Aujourd'hui, les proches des victimes dénoncent une "confiscation des preuves" car selon leur avocat Me Patrick Baudouin, la version algérienne "officielle" et "simpliste" serait mise à mal. Selon lui, ce refus "ne repose sur aucune justification juridique". Avant de poursuivre sur un appel aux autorités algériennes : "Si vous poursuivez cette obstruction, c'est parce que vous avez des choses à cacher."

Trois hypothèses étudiées

Enlevés dans la nuit du 26 au 27 mars 1996 dans leur monastère, où ils avaient souhaité rester malgré la guerre civile en Algérie, seuls les crânes de Christian de Chergé, Luc Dochier, Paul Favre Miville, Michel Fleury, Christophe Lebreton, Bruno Lemarchand et Célestin Ringeard avaient été retrouvés le 30 mai 1996, neuf jours après l'annonce de leur assassinat.

Revendiqué dans un communiqué attribué au Groupe islamique armé (GIA), ce massacre aurait pu être le résultat d'une bavure de l'armée algérienne ou l'objet d'une manipulation des services militaires algériens pour discréditer le GIA. Des pistes de travail étudiées par deux juges français Marc Trévidic et Nathalie Poux.

Décapitation post-mortem 

Dix ans après l'ouverture d'une enquête en France, les deux magistrats ont enfin pu se rendre sur le site du monastère Notre Dame de l'Atlas de Tibéhirine pour exhumer les têtes des religieux. Me Baudouin reconnaît une certaine "satisfaction d'avoir enfin pu avoir cette visite", marquée par une "terrible déception". "On est en train de nous priver des preuves", a dénoncé l'avocat des parties civiles, accompagné de plusieurs proches des moines. 

Les premières constatations réalisées sur place révèlent des indices sur les conditions d'exécution des moines. Selon les experts, leur décapitation aurait pu être réaliser après leur mort, ce qui conforterait l'hypothèse d'une mise en scène. Toutefois, l'absence d'impact de balles dans les crânes affaiblirait la thèse d'une bavure de l'armée algérienne. Selon un témoignage, cette dernière aurait tiré depuis un hélicoptère sur le bivouac où auraient été détenus les moines.

Face à ces nouveaux éléments, les proches des moines insistent pour découvrir la vérité. "On n'est pas du tout dans un esprit de vengeance mais pour pardonner on a besoin de savoir", témoigne Elisabeth Bonpain, la soeur de l'une des victimes. Des familles qui en appellent désormais à François Hollande pour débloquer la situation. 

J.C. avec AFP