Syrie : la victoire des Kurdes à Kobané dérange la Turquie

Syrie : la victoire des Kurdes à Kobané dérange la Turquie

    La défaite à Kobané des combattants de Daech (ou groupe Etat islamique), chassés de la ville par les Kurdes syriens et les raids aériens de la coalition, a provoqué un mouvement de liesse dans le sud-est de la Turquie, frontalier de l'Irak et de la Syrie et peuplé majoritairement de Kurdes. Des milliers de personnes sont ainsi descendues dans les rues à Diyarbakir et Hakkari mais aussi à Istanbul pour fêter la victoire. Cette victoire et la mobilisation qu'elle a suscitée n'ont pas manqué de faire réagir le président turc Recep Tayyip Erdogan, qui redoute de voir se créer en Syrie une zone kurde autonome.

    «Nous ne voulons pas une (répétition) de la situation en Irak (...) c'était le nord de l'Irak. Nous ne pouvons accepter la naissance maintenant du nord de la Syrie», a-t-il déclaré à un groupe de journalistes dans l'avion le ramenant à Ankara au terme d'une tournée en Afrique. «Nous devons conserver notre position à ce sujet, sinon ce sera un nord de la Syrie comme un nord de l'Irak. Cette entité est source de gros ennuis dans l'avenir», a poursuivi le président turc, cité par le quotidien Hürriyet.

    Les Kurdes qualifiés de «terroristes»

    Recep Tayyip Erdogan a une nouvelle fois défendu devant les journalistes sa thèse d'une «zone d'exclusion aérienne» et d'une «zone de sécurité» à la frontière syrienne, réaffirmant sa farouche hostilité au régime du président Bechar al-Assad ainsi qu'à l'administration de cantons mis en place par les Kurdes syriens. «Notre objectif est le régime. Avec le régime actuel rien ne peut continuer en Syrie», a-t-il dit, critiquant la position de son allié américain consistant à ne pas «viser directement le régime» de Damas. «On ne peut pas aboutir à une solution par cette méthode. Il se produira en Syrie exactement ce qui s'est produit en Irak», c'est-à-dire la création d'une zone d'autonomie, même si la Turquie entretient une étroite collaboration avec les Kurdes d'Irak, a ajouté le président turc.

    Défendant une position ambigüe, la Turquie a refusé de participer à la coalition internationale menée par les Etats-Unis contre les jihadistes en Irak et Syrie et de renforcer le camp des Kurdes de Syrie. Recep Tayyip Erdogan avait qualifié de «terroriste» le principal parti kurde de Syrie (PYD), à la pointe du combat contre l'EI, au même titre que le mouvement frère du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qui mène depuis 1984 la guérilla sur le sol turc. Pressé par ses alliés d'intervenir, le régime islamo-conservateur d'Ankara a finalement fait un geste en autorisant le passage par son territoire d'un symbolique contingent de kurdes irakiens pour renforcer la défense de Kobané.

    AVANT / APRES. Kobané, ville martyre