De nombreuses associations des quartiers prioritaires sont inquiètes pour leur avenir. En cause, la baisse des subventions ou le désengagement des collectivités locales. Certaines vont même jusqu’à affirmer qu’elles ne pourront pas rouvrir leurs portes à la rentrée 2015.
Une pétition, lancée vendredi 10 juillet, par la coordination nationale du collectif « Pas Sans Nous », qui se positionne comme un syndicat des quartiers prioritaires, a reçu près de 400 signatures. Sa coprésidente, Nicky Tremblay est excédée : « Le budget de la politique de la ville devait être constant, voire en augmentation. C’était une des promesses de Myriam El Khomri [secrétaire d’Etat chargée de la politique de la ville] dans les mesures annoncées par la loi de février 2014 et renforcées par les 60 mesures du comité interministériel du 6 mars dernier. Nous avons constaté une baisse ».
« Pas Sans Nous » recense plus de 200 associations. C’est près de trois-quarts d’entre elles qui ont contacté les membres de la coordination pour les alerter sur le fait qu’elles observaient une diminution des subventions par rapport à l’année dernière. Selon Nicky Tremblay, cette baisse serait le fruit de deux phénomènes distincts. « D’abord les mairies qui ont répercuté les baisses de leurs dotations sur les associations ; ensuite, les préfectures, qui ont diminué les financements provenant de l’Etat », affirme-t-elle.
Budget amputé de 10 000 euros
Exemple : l’association Zonzon 93, qui fait de la prévention de la délinquance, a vu son budget amputé de 10 000 euros par l’intercommunalité. « Sur un total de 12 500 euros, ça fait mal », lance Laetitia Nonone, la présidente de cette association basée à Villepinte (Seine-Saint-Denis).
Une question d’autant plus inquiétante que « la situation se dégrade d’années en années dans les quartiers », reconnaît Almamy Kanoute, président de l’association 83e Avenue à Fresnes (Val-de-Marne), qui œuvre pour promouvoir l’intergénérationnel et l’interculturel. « On coupe l’herbe sous le pied de ceux qui veulent appliquer le “vivre ensemble”. Plus on nous étouffera, plus on laissera place à toutes les formes d’extrémismes », se désole-t-il. Selon lui, seul le travail de terrain – propre aux associations de quartiers – permet d’endiguer les risques de dérives.
Une position que partagent Nicky Tremblay et Mohamed Mechmache, coprésidents du collectif « Pas Sans Nous ». Selon eux, laisser mourir les associations qui œuvrent quotidiennement au sein des quartiers populaires reviendrait à laisser s’installer de vives tensions. « Là c’est la période estivale, c’est calme. Mais à la rentrée scolaire la colère va monter, quelles seront les réponses ? », dit-elle inquiète.
Au cabinet de Myriam El Khomri, on dément catégoriquement d’éventuelles baisses de subventions. « Les moyens d’action sont même en hausse cette année », indique-t-on au contraire. Une enveloppe de 50 millions d’euros (la moitié pour jeunesse et sports et l’autre moitié pour la politique de la ville) a été débloquée le 6 mars, s’ajoutant au budget de 338 millions d’euros destiné à la politique de la ville pour la seule année 2015. « Les seules baisses de subventions enregistrées sont à Mantes-La-Ville [Yvelines] », indique le cabinet de la secrétaire d’Etat. Un cas particulier puisque le maire de la ville Cyril Nauth (FN) a pris personnellement la décision de réduire de 20 % les soutiens financiers accordés aux associations.
Au cabinet de Myriam El Khomri, on comprend mal le cri de détresse lancé par la coordination nationale du collectif « Pas Sans Nous » reçue début juillet, sans que ce point ne soit soulevé. « On s’occupe de 7 000 associations sur tout le territoire. Il y a forcément des associations qui voient leurs subventions augmenter et d’autres se réduire en fonction des projets proposés et du respect des engagements ». Selon le cabinet, 62 % des contrats de ville ont déjà été signés et 70 % le seront d’ici la fin du mois. « Pour tous ces contrats, aucune enveloppe n’était en baisse ». Les diminutions de subventions proviendraient selon le cabinet essentiellement des collectivités locales et des mairies. « Restriction de budget », voilà l’argument soutenu par l’intercommunalité pour justifier la baisse des subventions accordées à Zonzon 93. « C’est tout ce qu’on nous dit », explique Laetitia Nonone. En attendant ce sera le « système D ».
Valentine Arama
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