La violation de l’espace aérien turc par des avions de combat russes au cours du week-end des 3 et 4 octobre, près de la frontière syrienne, a suscité de nombreuses réactions, craintives ou hostiles, quelques jours après le début de la campagne de bombardements en Syrie de l’armée russe.
Dans un premier temps, l’ambassadeur de Russie en Turquie a été convoqué par les autorités, qui lui ont fait part de leur « violente protestation », selon le ministère de l’intérieur. Ankara a aussi demandé à Moscou d’« éviter une répétition d’un tel incident » et a fait savoir que, le cas échéant, « la Fédération de Russie serait considérée responsable de tout événement non voulu ».
Lundi, le porte-parole du ministère de la défense de la Russie, le général Igor Konachenkov, a ainsi justifié l’entrée de son avion de chasse « pour quelques secondes » dans l’espace aérien turc :
« Cet incident est le résultat de mauvaises conditions météorologiques dans cette zone. Il ne faut pas y voir un complot quelconque. »
Réunion d’urgence à l’OTAN
Les mots les plus durs sont venus des Occidentaux, qui critiquent depuis près d’une semaine l’intervention militaire russe en Syrie. L’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), à laquelle appartient la Turquie, a qualifié d’« inacceptables » les violations de l’espace aérien turc par des avions de combat russes. « Les actions de la Russie » en Syrie « ne contribuent pas à la sécurité et à la stabilité de la région », a déclaré son secrétaire général, Jens Stoltenberg, qui a convoqué une réunion d’urgence lundi soir pour évoquer « les implications potentielles des dangereuses actions militaires menées par la Fédération de Russie dans et autour de la Syrie ».
Le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, a dit ses craintes de voir des avions russes abattus si de telles situations venaient à se répéter.
« C’est précisément le genre de choses contre lesquelles nous avons mis en garde », a ajouté M. Kerry. Les Etats-Unis, qui doutent que la violation de l’espace aérien turc soit due à une erreur, tentent, depuis le début du mois, d’éviter que des incidents impliquant son armée ou l’armée russe se produisent en Syrie alors que Moscou bombarde les opposants à Bachar Al-Assad. Des frappes qui viennent s’ajouter à celles de la coalition d’une soixantaine de pays emmenée par les Etats-Unis.
« Des risques de confrontation mondiale »
Le régime islamo-conservateur turc s’oppose à la participation de la Russie à la guerre en Syrie. Dimanche, le président Recep Tayyip Erdogan a déclaré que la campagne de bombardements russe en Syrie était « inacceptable » et a estimé que Moscou commettait « une grave erreur ». Ankara propose depuis plusieurs mois la création d’une zone d’exclusion aérienne à sa frontière avec la Syrie. Lundi, le vice-ministre des affaires étrangères de la Russie, Mikhaïl Bogdanov, a rappelé que son pays était « contre cela ».
La Turquie, alliée de la coalition internationale qui procède à des frappes contre l’Etat islamique, et la Russie s’opposent depuis le début du conflit en Syrie, en 2011. Ankara demande le départ de Bachar Al-Assad, qui bénéficie du soutien indéfectible de Moscou.
Interrogé sur le conflit syrien, le ministre des affaires étrangères de la France, Laurent Fabius, a déclaré sur Europe 1, qu’« il y a des risques de confrontation mondiale ».
« Quand vous voyez que ce conflit, qui était une guerre civile, devient une guerre régionale, avec implication de puissances internationales, les risques sont graves. Et le risque le plus effrayant, c’est le risque que le conflit soit totalement religieux (…), avec d’un côté les populations sunnites et leurs alliés, de l’autre les populations chiites et leurs alliés. C’est une conflagration qui risque d’être extrêmement dangereuse. Nous, la France, nous recherchons la paix et la sécurité. »
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