Dépêche

Au Bataclan, au milieu des hommages anonymes et officiels, "la vie continue"

Paris (AFP) - Ce fut le lieu d'un massacre. Autour du Bataclan, où quelque 90 spectateurs d'un concert de hard-rock ont été tués par les tirs des jihadistes, la vie reprend pourtant doucement, entre visites de chefs d'Etats et hommages de simples citoyens.

Sur le boulevard Voltaire, dans l'est de Paris, une dame demande son chemin. "C'est où le Bataclan s'il vous plaît?".

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Remedios Rodriguez, Espagnole installée en France depuis 45 ans, connaît très bien cette salle de spectacle. "J'ai passé ma jeunesse à danser au Bataclan. On venait pour les bals espagnols, ça nous rappelait le pays. J'ai même rencontré mon mari ici!", confie la dame de 63 ans. "C'est terrible ce qui s'est passé, j'ai envie de me recueillir pour les victimes".

Comme elle, des dizaines de personnes affluent tous les jours devant la salle pour rendre hommage aux victimes de l'attentat du 13 novembre revendiqué par le groupe Etat islamique. Pendant le concert d'un groupe de rock américain, les Eagles of Death Metal, trois jihadistes avaient tiré dans la foule.

Aujourd'hui, la façade bariolée et en arcades de ce bâtiment édifié en 1864 contraste avec l'ambiance lourde qui y règne. L'entrée est cachée par une longue bâche blanche qui enserre tout l'immeuble. Le trottoir est jonché de fleurs, de photos de victimes, de bougies. Certains visiteurs, les larmes aux yeux, ont du mal à cacher leur émotion.

Un livreur sort la tête de son camion pour demander à une dame de se pousser. "Il y a des voitures ici, je comprends que ce soit un lieu de recueillement mais il faut faire attention quand même!".

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Malgré les barrières mises en place par la police, les piétons empiètent sur la chaussée. Entre coups de klaxons d'automobilistes pressés et invectives des policiers, l'ambiance n'est pas très propice au recueillement.

Un défilé de chefs d'Etats

Soudain, la police demande à la foule de s'écarter et interdit la circulation dans un rayon de 30 mètres. Des voitures noires aux plaques diplomatiques se garent à hauteur du Bataclan.

Le Premier ministre slovaque, Robert Fico, s'extirpe de l'une d'elles et s'avance vers le tapis de fleurs pour y déposer à son tour un bouquet. Après un bref recueillement, son convoi repart à toute allure, mais la police conserve le périmètre de sécurité en prévision d'autres visites.

A l'occasion de la conférence sur le climat COP 21, de nombreuses personnalités font le déplacement au Bataclan pour rendre hommage aux victimes.

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Dans la nuit de dimanche à lundi, juste après son atterrissage à Paris, Barack Obama est venu y déposer une rose blanche en compagnie du président Hollande. Plus tôt, le Premier ministre japonais Shinzo Abe, la présidente chilienne Michelle Bachelet et le premier ministre canadien Justin Trudeau, avaient fait le déplacement. Tout lundi après-midi, les délégations ont continué de se succéder.

Malgré ce va-et-vient de personnalités et l'impressionnant déploiement de policiers, les habitués du quartier ne cachent pas leur envie de reprendre le cours normal de leur vie.

Cynthia Saliba, 21 ans, étudie dans une école de commerce située à deux pas, rue Saint Pierre Amelot. C'est dans cette ruelle que donnent les issues de secours du Bataclan, par lesquelles de nombreux rescapés, certains en sang, ont pu prendre la fuite. "Quand j'ai vu les vidéos de l'attaque, j'étais choquée, j'ai tout de suite reconnu la rue. D'habitude on s'assoit sur les marches des issues de secours. C'est là qu'on fait nos pauses clope", explique la jeune fille.

Les murs de l'école sont parsemés d'impacts de balle, que quelques passants prennent en photo. Mais toute cette agitation ne perturbe pas l'étudiante pour autant. "C'est vrai qu'il y a plein de gens qui défilent, mais maintenant on n'y pense plus. La vie continue. On a des études à faire, c'est normal qu'on veuille avancer".

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Reprendre la vie, c’est aussi ce que souhaite Jesse Hugues, le chanteur des Eagles of Death Metal. Dans une interview accordée mercredi dernier à Vice, il a déclaré vouloir "être le premier groupe à jouer au Bataclan quand il rouvrira".

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