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Rencontres d'Arles 2017, demandez le programme !

EN IMAGES - Au rendez-vous, l'Amérique latine et la Colombie, Audrey Tautou et Dubuffet, la chute de Lénine et la mort de Grace Kelly. Bref, un menu tonique et alléchant qui devrait renforcer la place du plus grand festival photo du monde qui ouvre ses portes aujourd'hui, lundi 3 juillet.

David contre Goliath? On sent d'emblée que les Rencontres d'Arles 2017 ont la rage au ventre et bien l'intention d'exister, malgré le voisinage magistral et un peu écrasant de la toute-puissante Fondation LUMA. Le projet signé Frank Gehry de la mécène suisse Maja Hoffmann pousse à toute allure et redéploie avec force ses ambitions artistiques (son exposition magistrale d'Annie Leibovitz est déjà l'événement annoncé de l'été).

Pour la traditionnelle conférence de presse des 48e Rencontres d'Arles, vendredi 24 mars à 11 h rue de Valois, après un contrôle de sécurité encore plus poussé que de coutume, deux grandes absentes qui donnent le ton du jour et le poids de la culture dans la vie publique française. La brune aux yeux de bronze, Maja Hoffmann, qui était au premier rang, les fois précédentes. Et la brune aux silences éloquents, Audrey Azoulay, la ministre de la Culture trop occupée par son calendrier politique à un mois du scrutin présidentiel.

L'esprit manifestement ailleurs, le socialiste et mitterrandien Hubert Védrine, qui assure sa 3e édition des Rencontres en tant que Président, a fait le minimum syndical, une pirouette oratoire pour rappeler la beauté d'Arles, la force de la photographie et la singularité de ses fidèles. Et s'en est allé. Il y avait eu, la veille, une première conférence de presse à la Mairie d'Arles avec Christian Estrosi en guest-star (il a annoncé une hausse de 30% de la subvention régionale). Deux banquets pour un mariage, c'est peut-être trop.

Challenger de la force publique

Mais Paris vaut bien une messe.

Les Rencontres d'Arles ont un public d'airain dont la foi balaie les temps de crise et les années: 104.000 visiteurs pour l'édition 2016, un record qui a dépassé la barre symbolique des 100.000 ; les analystes multiplient ce chiffre par dix car chaque visiteur voit dix expos en moyenne, soit au final un boom comptable à 1,1 million d'entrées; 8.300 de ces visiteurs sont arlésiens, 15.200 autres sont des professionnels accrédités dont 1.500 journalistes. De nouveaux lieux arlésiens - «La Maison des Peintres» et «Croisières» - permettront à l'édition 2017 de résister à l'érosion du public et à la concurrence du Parc des Ateliers, sublimement réhabilité par les équipes de la fougueuse Maja Hoffmann.

Il restait donc une foule dense d'amoureux de la photo qui sont arrivés pile à l'heure, ce vendredi matin, rue de Valois. Ils se sont retrouvés gaiement entre complices du cliché et nostalgiques de l'argentique comme au début de la semaine professionnelle, sur la Place du Forum toujours bondée à Arles. Puis ils se sont pliés sagement à l'exercice du programme - et de la liste interminable de ses partenaires! - , énuméré avec gourmandise par son pétulant directeur Sam Stourdzé, champion de l'exposition transversale entre les continents, les générations et les disciplines. Parce que l'heure est aux coupes budgétaires, ce challenger de la force publique, pas peu fier de ses trouvailles, a dit très haut et fort: «Je remercie l'État». Il était occupé ailleurs.

Qu'importe, la photo se retrouve en famille. Il faut dire que ce cru 2017 regorge d'idées, de relectures, de belles appropriations, d'invitations et de promesses. «L'amour incroyable de la photo», c'est, a rappelé Sam Stourdzé, «3 tonnes de peinture, 3 km de murs construits pour les expos, 40 expositions, 250 artistes exposés, soit 2500 œuvres accrochées, voire suspendues, empilées, décrochées». Comme le veut le grand vent contemporain qui balaie la photographie, du jeune et formidable Festival Images de Vevey à Kyotographie qui peaufine en artiste son édition 2017 pour la mi-avril.

Petits bars de plage espagnols

Au programme, Latina! met l'Amérique latine au programme cet été avec un focus sur la Colombie. Quatre pistes pour ce voyage par l'image: La vache et l'orchidée sur la photographie vernaculaire colombienne («vernaculaire» est le nouveau mot magique), La Vuelta et ses 28 photographes et artistes colombiens, Pulsions urbaines sur la photographie latino-américaine, 1960-2016, et Paz Errázuriz, une poétique de l'humain. Le 3 juillet prochain est promise une grande fête colombienne dans le nouveau lieu baptisé Croisières. Sam Stourdzé a découvert un nouveau mot d'emprunt qu'il a du mal à prononcer, chiringuito , ces petits bars de plage espagnols qui résonnent comme la joie de vivre.

Deuxième thème, L'expérience du territoire qui balaie large, des Early Works du grand Joel Meyerowitz, street photographer de légende, aux voyages en train superbes et philosophiques de Marie Bovo. Du paysage de la mort accidentelle par Christophe Rihet (Road to Death) à la poésie profonde de feu Kate Barry, la fille aînée de Jane Birkin disparue fin 2013, alors qu'elle avait enchanté la première édition de Kyotographie à Kyoto par son art du portrait, au printemps précédent.

Troisième thème, les Désordres du monde. Voilà une catégorie jamais à court de sujets. Le sud-africain Gideon Mendel avait affiché ses photos du bout du monde sur des panneaux lors de la COP 21 à Paris, mais n'avait pas pu faire la marche prévue à cause des attentats de novembre 2015. Son beau travail, humaniste et profond, sur les rescapés des inondations est donc à redécouvrir à Arles (Un monde qui se noie). Humour de l'histoire avec Niels Ackermann et Sébastien Gobert qui ont pisté Lénine, ce vieux révolutionnaire jeté aux orties, comme ses myriades de statues (Looking for Lenin).

Echo au 40e anniversaire du Centre Pompidou

Le documentaire regarde les gitans avec Mathieu Pernot (Les Gorgan), œil aigu et âme large qui a déjà eu les honneurs du Jeu de Paume. Les voyages des photographes nous porteront en Iran, nouvelle terre promise qui sort de sa prison noire et devient le fantasme d'un monde toujours en manque d'inaccessible (Iran, Année 38 et ses 62 photographes iraniens qui se sont réunis pour l'occasion autour de Sam Stourdzé à l'ambassade de France à Téhéran).

La mise en scène est la marque des artistes. On plongera avec délices dans le monde du sculpteur et peintre Jean Dubuffet (L'outil photographique), déjà à l'honneur au Centre Pompidou-Metz avec Emma Lavigne dans Jardin infini, et dans Le spectre du surréalisme, exposition du 40e anniversaire du Centre Pompidou, nourrie de ses incroyables collections. On retrouvera donc feu Masahisa Fukase, talent fantasque et déchirant au plus près de l'homme (L'incurable égoïste), et le monde bancal de Roger Ballen, le plus sud-africain des Américains (The House of Ballenesque) . On découvrira une jeune photographe impertinente qui s'appelle Audrey Tautou (Superfacial). On restera coi devant la collection de géants et de nains de Claude Ribouillault (Toutes proportions gardées).

On gardera un peu de temps et d'innocence pour aborder Émergences et le nouveau Prix Découverte. De Juliette Agnel, si profondément artiste, à Guy Martin, ils sont dix que le public départagera en votant. Décidément, c'est l'année.

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