Radars embarqués : l'espionnite aiguë organisée sur les routes

Les automobilistes dénoncent la délégation à des sociétés privées des mesures radars "en roulant", mettant en place une implacable logique du rendement.

Jacques Chevalier avec AFP

Les radars embarqués pourraient être
Les radars embarqués pourraient être "gérés" par des sociétés privées qui seront payées à l'heure. Une logique du rendement s'installe. © DR

Temps de lecture : 3 min

Le rendement, c'est le rendement. Sous-utilisés, les radars embarqués à bord de voitures banalisées, prenant des mesures dans les deux sens, vont être confiés à des sociétés privées. Le but est de multiplier leur usage, d'à peine plus d'une heure en ce moment à une journée de travail et, pourquoi pas un jour si le budget entrant le permet, à des 2 X 8 voire 3 X 8. L'association 40 Millions d'automobilistes s'en alarme et dénonce cette « privatisation » des radars embarqués, dictée par l'« excellente opération financière » pour l'État qui engrangera selon elle 2,2 milliards d'euros par an de recettes issues des amendes.

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Si on ne peut reprocher à l'État de mettre des fonctionnaires de police sur des missions plus urgentes que celles qui consistent à traquer les conducteurs, on peut en revanche s'étonner que la procédure soit reportée sur des sociétés privées. Le gouvernement avait en effet annoncé le 2 octobre 2015 l'« externalisation » du pilotage des voitures transportant les radars mobiles nouvelle génération (RMNG), confiée à des « prestataires agréés » par l'État afin de multiplier le nombre de contrôles. Un appel d'offres a été lancé, avant une expérimentation puis une généralisation.

« La privatisation des radars embarqués n'a d'autre but que de générer, grâce aux amendes issues des contraventions, d'importantes sommes d'argent qui finiront dans les caisses de l'État [...] En revanche, il n'existe aucune preuve que cette mesure ait un quelconque effet positif sur la sécurité routière », affirme le président de 40 Millions d'automobilistes, Daniel Quero.

Pompes à fric

L'association estime que, à plein régime, ce dispositif permettra à l'État d'engranger 2,2 milliards d'euros par an. Après avoir réuni près de 300 000 signatures dans une pétition contre cette « mesure scandaleuse », elle appelle les automobilistes à lui faire parvenir leurs photos qui seront ensuite diffusées pour une « manifestation numérique ».

Le ministre de l'Intérieur Bruno Le Roux a annoncé le 8 janvier que l'appel d'offres avait été lancé « pour que ces radars [embarqués, NDLR] soient confiés à des sociétés qui vont uniquement les faire rouler. Ils resteront sous la responsabilité de l'État », a-t-il assuré, puisque les infractions sont constatées par le radar automatique embarqué et que le PV est rédigé par un officier de police au centre de traitement des infractions routières de Rennes.

Logique du rendement

« La moyenne d'utilisation d'un de ces radars est d'un peu plus d'une heure par jour [1 h 13, NDLR], c'est du matériel qui est sous-utilisé. Il faut beaucoup plus l'utiliser pour faire en sorte que les comportements de dépassement de vitesse soient sanctionnés », a expliqué M. Le Roux, qui découvre manifestement la sécurité routière. Chacun sait que les gains énormes obtenus en termes de mortalité routière l'ont été par l'amélioration des routes et des voitures elles-mêmes, avec des aides à la conduite (ABS, ESP, etc.) qui corrigent les erreurs des conducteurs mal formés ou distraits. De plus, grâce à la ceinture et aux airbags, en cas de choc, les dégâts sont minimisés et les structures de véhicules plus résistantes font le reste.

Les sociétés privées « ne seront pas rémunérées au nombre d'infractions mais au temps que le radar aura passé sur la route », a-t-il rappelé. Ce qui revient à la même chose avec la mise en place d'une logique du rendement. Cette mesure s'inscrit dans une stratégie pour tenter d'enrayer la hausse de la mortalité routière enregistrée depuis 2014. En 2016, 3 469 personnes sont mortes sur les routes, pour la troisième année consécutive, une première depuis 1972. Mais c'est toujours ériger la vitesse en principal facteur d'accidents, alors que les causes sont clairement situées en amont (drogue, alcool, faute de conduite, etc.). La vitesse n'est donc qu'une conséquence pour bon nombre de spécialistes de la sécurité routière et non la cause. C'est en s'attaquant à ces dernières que les progrès sont à espérer, mais le gouvernement préfère faire rentrer l'argent dans les caisses pour quelques km/h de trop.

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Commentaires (47)

  • Statler&Waldorf

    Et comme l'a dit un autre commentateur, allez aux US, là-bas ils ont peut-être TRUMP, ils ont des radars qui ne sont pas signalés, et les policiers tirent un peu trop facilement sur les noirs. Cependant, sur une route où la vitesse est de 90, 110 ou 120 km/h, si vous êtes devant et respectez la limitation, la grande majorité ne vous dépasse pas. Les fous du volant sont attrapés régulièrement et n'ont leur mot à dire que devant un juge, ou uniquement au fonctionnaire du bureau si vous n'êtes pas récidiviste. J'ai appris sur le tas, ça m'a coûté 200 dollars, et je n'avais pas envie de discuter, devant un policier aussi correct que des policiers ou gendarmes français, qui m'a demandé trois fois si j'avais bien compris ce qu'il venait de m'expliquer. De plus, je n'étais pas obligé de payer et je pouvais rentrer en France. Sauf que l'on vous explique, que si vous ne payez pas, ou ne vous présentez pas à la convocation d'un juge, ce n'est pas la peine de revenir là-bas, même si vous acceptez par la suite de payer pour l'infraction. Moi je trouve ça très moral et le citoyen américain aussi.

    Lorsque vous quittez un stationnement en marche arrière en vous signalant, le conducteur "américain" ou "latino-americain" ou "sino-americain" et meme franco-américain" s'arrête pour vous laisser manoeuvrer. Pour le bon français "moralisateur et râleur" c'est indmissible.

    Donc comme dit @happifefeet, respectez le code de la route, et ces nouvelles entreprises feront vite faillite.

    Je précise que les relevés de vitesse par entreprise privée, auront "une tolérance" de dépassement tout à fait acceptable, alors qu'aujourd'hui la tolérance pour tous excès de vitesse est de 6 km/h pour les relevés terrestres.

    Quand vous avez un véhicule qui roule devant vous à une vitesse autorisée ou réduite, eh bien prenez votre mal en patience et respectez la limitation.


    C'est surprenant pour les Français "moralisateurs" ?

  • JVA

    Les saints existent. J'en ai rencontré un !...

  • Damien56

    Vous avez raison sur l alcool. J'espère que dégager la gendarmerie des contrôles de vitesse leur permettra de mieux contrôler l alcool.
    et vous avez peut-être aussi raison sur les ressources qui font vivre les gens de la sécurité routière. Et alors ? Cela n'empêche pas la cause qu'ils défendent d'être bonne.