Gilles Poux, maire de La Courneuve : « On ne peut plus gérer les bidonvilles roms »

 

Gilles Poux, maire de La Courneuve : « On ne peut plus gérer les bidonvilles roms »

    Une semaine après l'évacuation du bidonville rom du Samaritain à La Courneuve, le maire (PCF) Gilles Poux, à l'origine de la procédure d'expulsion, a été reçu jeudi à sa demande au ministère de l'Intérieur par deux membres du cabinet de Bernard Cazeneuve. Pour la première fois depuis le début de l'été, il accorde un entretien sur ce démantèlement qui fait polémique.

    Pourquoi ce rendez-vous au ministère de l'Intérieur ?

    Depuis dix ans, l'Etat nous laisse gérer seuls la problématique des bidonvilles roms, avec pour seule alternative, l'expulsion. Or, l'expulsion ne règle rien, comme on le voit encore aujourd'hui puisque les habitants du Samaritain campent depuis vendredi dans les jardins de la mairie ! Il faut trouver une réponse globale, politique, au niveau national, voire international.

    Le ministère de l'Intérieur est d'accord pour une table ronde. Vous réclamez depuis des années la tenue d'une table ronde au niveau régional. Avez-vous cette fois été entendu ?

    Oui. Pour la première fois, j'ai eu une réponse ferme : le ministère se dit disposé à organiser, dans un délai raisonnable, une conférence régionale avec les différents interlocuteurs, les villes, les associationsâ?¦ C'est une vraie satisfaction.

    Il y a eu cet été une très forte mobilisation du monde associatif pour empêcher cette expulsion. L'expulsion a malgré tout eu lieuâ?¦

    Depuis 10 ans, des centaines de familles roms s'installent régulièrement à La Courneuve sur des terrains inoccupés. En 2013, on recensait 11 campements, soit 2 000 personnes. Une commune comme la nôtre, qui compte 53 % de logements sociaux, ne peut plus gérer les bidonvilles. Les conditions de vie au sein des bidonvilles sont indignes. Ces camps génèrent des charges non négligeables pour la collectivité. Les Courneuviens se plaignent des nuisances : les déchets, la mendicitéâ?¦ C'est la raison pour laquelle j'ai engagé cette procédure d'expulsion, comme je l'ai fait à chaque fois. Ces deux dernières années, nous avons eu recours 20 fois à la force publique pour évacuer des bidonvilles.

    La Courneuve, ce jeudi. Une partie des roms évacués du bidonville du Samaritain se sont installés sur le parvis de la mairie. (LP/ Nathalie Perrier.)

    Médecins du Monde et la Fondation Abbé Pierre défendaient un projet de résorption progressive de ce bidonville en trois ans. Vous n'y avez pas cru ?

    Croire qu'on peut résorber un bidonville en trois ans, sans un engagement fort de l'Etat, c'est de la naïveté ! Il y a 15 000 roms en Ile-de-France. On sait très bien que dès qu'une place se libère dans un bidonville, elle est occupée par une autre famille.

    Vous avez pourtant soutenu les projets de village d'insertion mis en place depuis 7 ans sur le territoire de Plaine commune.

    Oui, mais justement. On a bien vu que ces villages ne marchaient pas si bien que ça. Il y a très peu de sorties vers un logement pérenne, l'accès au travail est très difficile. Au bout d'un moment, l'Etat ne finance plus, et les communes se désengagent à leur tour. Ce sont des micro-expériences qui finalement tournent courts. C'est pour cela qu'il faut créer une dynamique régionale, nationale, voire européenne pour trouver enfin des solutions à la question rom.

    2 000 Roms vivent toujours dans le 93, quatre fois moins qu'en 2012

    Le préfet de Seine-Saint-Denis Philippe Galli s'était engagé en avril 2014 à procéder à « une évacuation quasiment chaque semaine, ou au moins une toutes les deux semaines ». Il a dans les grandes lignes tenu parole. Ces derniers mois, les évacuations de campements roms se sont multipliées dans le département. « Depuis janvier, 72 expulsions ont eu lieu dans le 93 », rappelle Didier Leschi, le préfet délégué pour l'Egalité des chances.

    Conséquence logique, le nombre de bidonvilles a fortement diminué. Il reste aujourd'hui dans le 93, selon la préfecture, 40 campements illégaux, qui accueillent environ 2 000 personnes. Pour rappel, au printemps 2014, la préfecture recensait 3 500 ressortissants roms, répartis sur 38 camps, dans le département. Elle en comptabilisait plus de 8 000 (implantés sur 135 camps) fin 2012 !

    1 000 personnes vivent dans des bidonvilles à Saint-Denis

    Saint-Denis reste la ville qui compte le plus de ressortissants roms. Environ 1 000 Roms vivent dans 8 bidonvilles. La ville des Rois abrite notamment un important bidonville de 300 personnes près de la Porte de Paris. Les deux autres villes les plus concernées par la question rom sont Montreuil (300 ressortissants, 6 bidonvilles) et Stains (250 personnes, 7 bidonvilles). La Courneuve elle ne compte plus désormais aucun campement, hormis celui des anciens du Samaritain à l'hôtel de ville.

    N.P.