Le collège nouveau est arrivé, demandez le programme !

Le collège nouveau est arrivé, demandez le programme !
Des élèves de 6e dans un collège du 18e arrondissement de Paris. (JOEL SAGET/AFP)

La réforme qui entre en application à la rentrée 2016 dans les 7.000 collèges de France parie sur la bonne volonté des professeurs.

Par Caroline Brizard
· Publié le · Mis à jour le
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Dans sa conférence de presse, la ministre Najat Vallaud-Belkacem s’est moquée des tombereaux de critiques dont le collège nouveau avait fait l’objet : "Oui, à force d’entendre annoncer, avec cette réforme, la fin des temps et la disparition de toute civilisation, je crains, mesdames et messieurs, que vous ne soyez quelque peu déçus." Elle peut ironiser, la réforme est pourtant bien faite pour changer le collège en profondeur. Mais il n’est pas sûr qu’elle soit partout appliquée avec le même allant.  

Tout a bien été toiletté depuis la loi sur la Refondation de l’Ecole de la République de 2012 : les programmes, les horaires et la manière de travailler des professeurs. L’objectif est de faire mieux réussir les élèves en difficulté (20% des élèves entrent en 6e avec des lacunes graves, et leur retard se creuse pendant les années collège), et faire en sorte que la réforme profite aussi à tous les autres. Le collège 2016 introduit donc des nouveautés.

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1. Les horaires  

De la 6e à la 3e, les élèves ont désormais le même nombre d’heures de cours. Plus de journées à rallonge pour les 3e, ou de pause de midi coincée entre deux séances d’histoire. La semaine compte 26 heures de cours, à répartir sur cinq jours ou cinq jours et demi. Mais il n’y a jamais plus de six heures de cours par jour, coupés par un temps de pause pour déjeuner d’une durée d’une heure et demie au moins.

2. Les programmes 

On se souvient comment les projets de programmes d’histoire avaient suscité la polémique en 2015, au motif qu’ils introduisaient des thèmes "à option" dans l’histoire de France et ouvraient sur les distants Empire de Chine, royaumes africains et civilisation arabo-musulmane. Il y a eu des concessions, puis un accord. Toutes les disciplines ont ainsi été passées au crible par le Conseil Supérieur des programmes, l’instance en charge de leur élaboration, pour mieux coller à ce que peut vraiment absorber le cerveau d’un élève.  

Pas de révolution, cependant. En français, par exemple, le petit 6e se coltine toujours les textes de l’Antiquité, pour coller aux programmes d’histoire, puis, selon la même logique ascensionnelle, va continuer en étudiant en 5e la littérature du Moyen Age et de la Renaissance…

La deuxième langue apparaît dès la 5e. Mais 10% des élèves ont un régime particulier. Ils ont choisi d’apprendre une autre langue que l’anglais à l’école primaire. Par exemple en Alsace, certains optent plutôt pour l’allemand. Ceux-là commenceront l’anglais dès la 6e. Ces classes de 6e sont les vestiges des anciennes classes bi-langues.   

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Les vrais changements sont ailleurs, dans l’organisation des cours et dans les manières de travailler. Donc entre les mains des professeurs. L’objectif est de développer l’intérêt pour ce qu’on apprend en classe, les capacités à s’exprimer à l’oral, à travailler en groupe…

3. Les enseignements pratiques interdisciplinaires (EPI)

Ces EPI démarrent à partir de la 5e, à raison de deux à trois heures par semaine. Les élèves choisissent un thème d’étude transversal, impliquant deux voire trois matières ensemble (donc avec deux voire trois professeurs différents), qu’ils vont piocher dans une des huit thématiques proposées par le ministère : "Monde économique et professionnel", "Culture et création artistiques", "Information, communication, citoyenneté", "Sciences, technologie et société"… Ce projet se traduira par une réalisation concrète, pour donner du sens et de la chair aux disciplines qui restent trop souvent hors sol.

Par exemple, dans le cadre de "Transition écologique et développement durable",  les élèves peuvent rédiger un magazine autour de l’écologie, qui va impliquer les professeurs de français et d’histoire-géo. En "Sciences, technologie et société", pourquoi pas étudier l’arc roman, comprendre la révolution technologique qu’il a représenté, et réaliser une maquette ?

Ces heures "viennent non pas se substituer aux enseignements disciplinaires, mais les renforcer, en alternant à la fois les enseignements en cours et la pédagogie de projet. Parce que savoir travailler en groupe, cela aussi s’apprend. Et s’investir dans un projet, c’est une autre façon de renforcer les connaissances, en les croisant, en les contextualisant pour mieux en comprendre le sens, et donc, in fine, pour mieux les maîtriser", a précisé Najat Vallaud-Belkacem dans sa conférence de presse de rentrée. Les deux à trois heures qui leur sont consacrées sont prélevées sur les horaires des disciplines.

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Les élèves doivent avoir abordé six des huit EPI entre la 5e et la 3e. Mais on peut aussi prendre chaque année un trimestre de "Langues et cultures de l’Antiquité" et panacher avec d’autres thèmes. Petite entorse à la règle des 26 heures par semaine, les élèves qui choisiront cet EPI, ou celui sur les "Langues et cultures étrangères/régionales", pourront avoir une à deux heures de cours en plus par semaine pour étudier le latin, le grec, ou approfondir une autre langue. Mais il ne s’agit surtout pas de reconstituer des classes de niveau. "Les élèves qui suivent un tel enseignement ne seront pas regroupés dans des classes", assure le ministère.

4. Les liens mentaux

Entre le travail sur la couleur en arts plastiques, l’exposition au musée, la rencontre avec un artiste, et ce qu’il glane au gré de ses expériences créatives, l’élève se construit un corpus de connaissances qui se répondent et s’enrichissent mutuellement. Mais ces correspondances ne se font pas toujours spontanément. Le collège nouveau propose donc, en lien avec l’école primaire, quatre "parcours éducatifs" que l’élève va se constituer en nourrissant un portfolio numérique - on peut rêver - où il consignera toutes ses expériences relevant d’un de ces domaines :

  • Le "parcours citoyen", où l’enseignement moral et civique va tenir une bonne place ;
  • Le "parcours avenir" où il consignera toutes ses découvertes du monde économique et professionnel ;
  • Le "parcours d’éducation artistique et culturelle" ;
  • et enfin le "parcours éducatif de santé", pour rassembler là tout ce qui a trait à la connaissance du corps, à la prévention et à la protection.  

5. L’aide personnalisée

C’est l’Arlésienne ! Mais cette fois, il semble que le ministère y accorde une réelle importance : les élèves ont trois heures d’aide personnalisée par semaine en 6e, une à deux heures par semaine à partir de la 5e, incluses dans les 26 heures hebdomadaires. Pour faire face à cette assignation supplémentaires, 4.000 postes seront créés, dont 2.800 dès cette rentrée. Soit moins d’un demi-poste par collège, mais ce petit plus devrait apporter une certaine souplesse, et permettre aux collégiens d’apprendre à apprendre une leçon, d’améliorer leur lecture, de revoir des notions qui leur manquent…

6. L’autonomie (relative) des enseignants

Les collèges bénéficient donc de moyens supplémentaires, et une part plus importante des enseignements est laissée à la discrétion des professeurs (ils gèrent ainsi 20% du temps scolaire, contre 7% jusqu’à présent). Cela devrait leur permettre de mieux s’ajuster aux besoins de leurs élèves.

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7. Le nouveau brevet des collèges

Contrairement à ce qui était agité ici ou là, le brevet des collèges n’est pas enterré. Il évolue. Le contrôle continu au cours de l’année de 3e est maintenu (sur 400 points), mais avec des notes forfaitaires en fonction de la maîtrise de la discipline (insuffisante, fragile, satisfaisante, très satisfaisante) ce qui évitera en partie les écarts de notation entre les établissements.

Le contrôle final (sur 300 points) comportera trois volets notés sur 100 : l’épreuve écrite portant sur les matières littéraires, l’épreuve écrite portant sur les sciences, et une nouveauté, une épreuve orale. Il faudra 350 points au moins pour décrocher le brevet nouveau.

8. L’évaluation, toujours…

L’élève maîtrise-t-il le nouveau socle de connaissances et de compétences ? A chaque étape de la scolarité, la question continue d’être posée. L’évaluation ne disparaît donc pas mais elle est simplifiée, et désormais consignée dans un livret unique du Cours Préparatoire (CP) à la 3e.

Ce livret, accessible sur internet, comprend tous les bulletins trimestriels, et les évaluations en fin de cycle, celles du Cours Elémentaire 2e année (CE2) et de la 6e, et on y retrouvera le contrôle continu de l’année de 3e qui aura servi à l’obtention du Brevet.

Caroline Brizard
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