Charenton : le pirate écroué pour avoir piégé le roi des joueurs

 

Charenton : le pirate écroué pour avoir piégé le roi des joueurs

    Sur le net, ils s'appellent Arkan, Jacky le fou ou Yvan Dushit. Adeptes du groupe ViolVocal, ils partagent le goût du canular macabre et mettent à profit leurs connaissances informatiques pour assouvir cette passion. Sur le banc des prévenus, ce sont trois garçons dans leurs petits souliers qui répondent en tremblotant quand le président fronce les sourcils. Ils devaient comparaître ce jeudi devant le tribunal de Créteil pour le tout premier « swatting » français en février dernier à Charenton. Traduction ? C'est le fait de piéger en direct un joueur en ligne en faisant intervenir chez lui des policiers. Le procès des trois jeunes a été renvoyé. Mais en attendant, l'auteur présumé du canular a été placé sous mandat de dépôt.

    Jonathan Y, 22 ans, sans doute Arkan, se serait fait passer pour Bibix, la victime de ce scénario, et aurait convaincu la police qu'il venait de tuer sa compagne. Les deux autres prévenus, Lilian S, 26 ans, et Gaëtan B., 19 ans, ont été placés sous contrôle judiciaire. Poursuivis pour recel, ils auraient diffusé la vidéo, vue plus de 400 000 fois, où la victime est interpellée en direct sous les cris horrifiés de sa compagne.

    Six ans de prison encourus

    « Mdr, bibix se fait arrêter en live par le GIGN », se poêlait en ligne Lilian, alias Jacky le fou, sans savoir que la fille qui criait dans la vidéo se verra prescrire 7 jours d'ITT. Son copain de canular, Gaëtan dit Yvan Dushit, aura lui la bonne idée d'annoncer une demi-heure avant l'intervention de la Brigade anticriminalité à Charenton. Du pain bénit pour les policiers de la Cellule d'assistance technique de la sûreté territoriale. Et ce joueur ciblé par cette e-agression n'est pas n'importe qui. Il s'agit de Bibix, figure reconnue et enviée du monde fermé des « gamers », ces professionnels du jeu capables de s'assurer un revenu mensuel très confortable.

    Pour la première fois devant un tribunal français, une affaire de « swatting » était donc évoquée. Le parquet de Créteil a choisi la qualification d'escroquerie pour accuser l'auteur présumé du canular, interpellé mardi chez sa maman au Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis). Pour ce délit, il encourt six ans de prison.

    « Les cas de swatting se multiplient, a constaté la représentante du ministère public, Morgane Aubert. C'est un véritable fléau ». « Je m'engage à me représenter », a tenté en vain Jonathan Y, cheveux longs et yeux hagards avant de repartir au dépôt. Son voisin à la coupe Justin Bieber, poursuivi pour recel, s'est indigné de sa voix fluette : « On a peut-être dit des choses mais on n'a pasâ?¦ » Et l'avocate des trois jeunes, dont l'envie de gifler était criante, de l'interrompre : « Ce n'est pas jugé maintenant. » Ã?a le sera le 30 octobre.