Le climat politique tumultueux aux États-Unis s'est immiscé parmi les milliers d'oeuvres présentées depuis jeudi à la foire Art Basel à Miami Beach, le pays étant souvent représenté comme « au bord du chaos ».

Cette ville célèbre pour ses plages et son ambiance de fête permanente a vu déferler pour cette 17e édition d'Art Basel des dizaines de milliers de professionnels et d'amateurs d'art, qui vont arpenter jusqu'à dimanche les 268 galeries ouvertes pour l'occasion.

Ces dernières, originaires de 35 pays, pullulent d'oeuvres contemporaines abstraites, conceptuelles, parfois frivoles et souvent réalisées avec des objets de récupération ou détournés.

En y regardant de près, la politique internationale et américaine en particulier a inspiré beaucoup d'artistes.

« Attendez-vous à voir beaucoup de prises de position politiques dans les galeries », a commenté Marc Spiegler, directeur mondial d'Art Basel, lors d'une présentation à la presse mercredi. « De nombreuses galeries vont exposer des oeuvres inédites qui sont liées directement, créées directement en réaction au contexte actuel ».

Danger imminent

C'est notamment le cas de la série de l'Américain Rob Pruitt intitulée « American Quilts 2018 », qui aborde « les sujets politiques affectant les États-Unis de nos jours », a relevé auprès de l'AFP Kyla McMillan, de la galerie Gavin Brown.

L'une de ses créations de 2,5 mètres sur 1,5 représente le drapeau américain en une mosaïque de milliers d'allumettes dressées, leurs extrémités inflammables peintes en bleu, blanc ou rouge pour former le célèbre Star-Spangled Banner. Le danger paraît imminent avec cette oeuvre intitulée « I pledge allegiance (flammable) ».

Du même artiste, « Wall ($) » est composé de dollars en billets et pièces de monnaie. Il représente l'impénétrabilité du monde du « 1 % » des plus riches de la population mondiale, tout comme trois autres créations symbolisant la frontière mexicano-américaine, avec ses grilles, à différentes heures de la journée.

Cette frontière est au coeur de la politique anti-immigration du président américain Donald Trump.

Démarche similaire chez l'artiste américaine Teresita Fernández, qui expose une carte des États-Unis dont le pourtour - y compris celui des États fédérés - est formé de petits morceaux de charbon tels des êtres « fantasmagoriques » se détachant sur un fond blanc.

Le charbon « représente des fantômes, dans le sens où des personnes et des minorités ne sont pas entendues, elles sont métaphoriquement réduites au silence », explique Sarah Levine, de la galerie Lehmann Maupin.

Les crises migratoires à travers le monde ont aussi inspiré l'Américain Robert Longo et l'Argentine Silvina Der Meguerditchian.

Le Mexicain Abraham Cruzvillegas a lui choisi le changement climatique, avec un filet de pêche suspendu au plafond et agrémenté d'un morceau de fromage fumé. Il a voulu dénoncer ainsi l'assèchement des lacs de son pays.

La foire annuelle, qui se déroule aussi en Suisse et à Hong Kong, est le principal lieu de commerce d'art contemporain aux États-Unis. Elle a attiré l'an dernier 82 000 visiteurs, selon les organisateurs.

Photo LEILA MACOR, AFP

L'artiste de cette oeuvre a utilisé des milliers d'allumettes pour former le drapeau américain.