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Informatique : les systèmes bancaires historiques restent indétrônables

En matière informatique, les banques se montrent schizophrènes. D'un côté, elles affichent leurs dernières innovations sur smartphone. De l'autre, elles utilisent toujours des technologies vieilles de plus d'un demi-siècle pour tenir les comptes des clients. Du pain bénit pour des informaticiens très seniors, courtisés par les établissements financiers.

Les banques utilisent parfois des technologies vieilles de plus d'un demi-siècle pour tenir les comptes des clients.
Les banques utilisent parfois des technologies vieilles de plus d'un demi-siècle pour tenir les comptes des clients. (Shutterstock)

Par Édouard Lederer

Publié le 14 juil. 2019 à 10:00Mis à jour le 14 juil. 2019 à 10:02

On se passe leur nom sous le manteau. « Je fais régulièrement appel à des informaticiens freelance de 60 ou 70 ans qui savent encore coder en Cobol [langage de programmation créé en 1959, NDLR] ou en AS/400 [remontant à 1988] pour intervenir sur les systèmes d'information historiques des banques », souffle un consultant en sécurité informatique. Les grandes banques françaises admettent aussi avoir besoin de ces experts chevronnés, capables de plonger au coeur de leurs systèmes… mais du bout des lèvres.

Fidéliser les plus experts

Cette discrétion tient au souhait de choyer ces techniciens rares et chers. Les jeunes générations boudent cette expertise, et une banque comme BNP Paribas recrute des cobolistes en Inde ! Mais il existe aussi une forme de gêne : à l'heure des smartphones et des GAFA, les grands établissements ne claironnent pas leur attachement à cette informatique solide, mais d'un autre temps.

En témoigne, la mésaventure connue par une grande banque française sur Linkedin. « Nous avions publié une offre d'emploi pour recruter un coboliste. Par erreur, l'annonce a été largement dupliquée sur le site, ce qui a laissé penser à tort qu'à un moment donné nous étions devenus le plus grand recruteur de cobolistes au monde ! »...ce qui a provoqué un « bad buzz » sur le réseau social, soupire un grand banquier.

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Une migration désastreuse

Il faut dire que se débarrasser de ces systèmes - qui permettent aux banques de tenir très facilement les comptes de leurs millions de clients - ne serait pas forcément pertinent. D'abord en raison de leur grande robustesse. « Ce système est extrêmement stable pour les données en masse », explique une coboliste convaincue. Autre qualité, la conception de ce langage fait que tout nouveau code est testé avant d'entrer dans la vraie vie. « On ne vous laisse pas envoyer des codes défectueux », souligne cette experte, ce qui limite de fait les risques de panne.

Autre argument, certaines tentatives de migration se sont soldées par des échecs retentissants. Au Royaume-Uni, la sortie de route de TSB, en avril 2018 , est restée dans les mémoires. La migration de 1,3 milliard de données vers un nouveau système a tourné à la confusion générale. Une fois l'opération lancée, des clients ont vu apparaître les informations bancaires de parfaits inconnus, ou des montants erronés pour leurs propres comptes. Deux jours plus tard, jusqu'à 1,9 million de clients n'ont plus eu accès à leurs comptes ! « Changer un core banking présente des risques d'exécution importants et n'offre en réalité pas de retour sur investissement très intéressant », confirme Christophe Leblanc, directeur des Ressources et de la Transformation Numérique du groupe Société Générale.

Des coûts « prohibitifs »

D'autant que les banques parviennent pour l'heure à rester innovantes sur le plan informatique en plaquant des couches plus contemporaines sur ces bases plus anciennes.

Mais cette logique atteint ses limites, expliquait en novembre dernier Yves Eonnet, le fondateur de la fintech Tagpay dans une tribune publiée dans les « Echos » . « Sur cette brique technologique initiale, les ingénieurs des banques ont réalisé des prouesses […]. Au prix, néanmoins de coûts et de délais de développement toujours plus prohibitifs et incompressibles ». Le risque ? Brider l'innovation, au moment même où les banques - attaquées dans leur modèle économique traditionnel - cherchent à se réinventer.

Edouard Lederer

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