"Des mesurettes qui donnent bonne conscience" : pourquoi les sponsors de l’équipe belge au Mondial au Qatar évitent le boycott dur
Comment les partenaires des Diables vont-ils réagir aux appels à boycotter le Mondial au Qatar ? Plusieurs entreprises ont décidé de ne pas inviter leurs clients. Des mesurettes qui "donnent bonne conscience".
- Publié le 07-09-2022 à 08h19
- Mis à jour le 07-09-2022 à 08h57
Les appels au boycott de la Coupe du monde de football qui se déroule à la fin de l’année au Qatar se multiplient ces derniers temps. En cause : l’empreinte écologique mais aussi les conditions de travail catastrophiques sur les chantiers.
La dernière sortie médiatique largement relayée par les réseaux sociaux a été faite il y a quelques jours par l'acteur français Vincent Lindon. Il a déclaré sur les plateaux de l'émission "C à vous" qu'il ne regarderait pas les matches. "La même année, il y a des Jeux olympiques d'hiver dans un pays où il n'y a pas de neige, et des Jeux d'été dans un pays où il fait 60 degrés à l'ombre et où ils ont construit 10, 12 stades réfrigérés. C'est non seulement une aberration climatique et une aberration écologique. Et en plus, il y a un non-respect de l'idéologie des droits de l'homme", a-t-il déclaré.
Ces appels à boycott obligent les entreprises à repenser leur sponsoring. En Belgique, la marque Jupiler (groupe AB InBev), la banque ING Belgique, l'entreprise de livraison de colis GLS, la chaîne de supermarchés Carrefour et la marque de chocolats Côte d'Or, qui font partie des partenaires des Diables rouges, ont annoncé, il y a quelques mois, qu'elles n'emmèneront pas de clients au Qatar. La société Proximus que nous avons interrogée fera de même. La société n'invitera ni des clients, ni des partenaires ni des membres de la direction. Elle nous dit être "préoccupée" par la situation des droits de l'homme dont elle a discuté avec la Fédération royale belge de football (La RBFA pour Royal Belgian Football Association), qui est du reste appelée à baliser le terrain. Proximus dit avoir "toute confiance dans l'approche de la RBFA pour attirer l'attention sur ce problème de manière appropriée et exiger des actions fortes pour améliorer les conditions de travail et protéger les droits de l'homme".
Logo sur les maillots d’entraînement des Diables
Toutes les entreprises interrogées mettent en avant qu'elles soutiennent l'équipe nationale, mais pas le choix du Qatar pour la Coupe du Monde.
"Nous soutenons la participation de l'équipe nationale au tournoi, mais pas le tournoi lui-même, ni la décision de l'organiser au Qatar. Nous n'avons d'ailleurs eu aucune influence sur cette décision. Nous ne ferons pas de publicité dans les grands médias montrant notre soutien au tournoi au Qatar de quelque manière que ce soit. Pendant le tournoi, nous aurons une présence visuelle basique uniquement dans le camp d'entraînement des Diables. Elle se traduira, entre autres, par notre logo sur les maillots d'entraînement, les panneaux sur les terrains d'entraînement et les toiles de fond", précise-t-on chez ING, "qui n'enverra pas d'employés" sur place.
Le discours est similaire chez ABInbev. "Comme d'habitude, Jupiler continuera à activer ses activités liées à la Coupe du Monde en Belgique. La stratégie marketing de Jupiler n'inclut pas l'envoi de fans ou de partenaires au tournoi afin que nous puissions nous concentrer sur les campagnes et les activations locales", nous précise Pascaline Van de Perre, Externel communication manager d'ABInbev Belux.
"Se donner bonne conscience"
En résumé, les entreprises prennent des mesures qui auront le moins de répercussions possibles au niveau commercial. "Pour les marques, c'est très compliqué d'être vigilantes sur les valeurs qu'elles défendent et d'en même temps tenir compte des enjeux commerciaux. Il n'y a pas de juste milieu", souligne David Grunewald, CEO d'Havas Brussels. C'est la raison pour laquelle, selon lui, on ne peut "pas parler d'un boycott dur". Ce sont plutôt des "mesurettes qui donnent bonne conscience". Ce choix ne le surprend pas vu que "les marques sponsors paient cher pour avoir une visibilité lors d'un des trois événements les plus regardés".
Il est donc clair que les sponsors prendront soin de ne pas faire apparaître le Mondial au Qatar dans leurs campagnes publicitaires.
"Nous ne planifions aucune campagne publicitaire faisant référence à la Coupe du Monde. Cependant, en tant que partenaire des Red Flames et des Diables rouges, cette position n'exclut pas le lancement en septembre d'une campagne de marque. Chaque année, ING met en exergue son soutien aux joueurs et joueuses dans le cadre de campagnes diverses. Ce sera le cas cet automne encore, avant le tournoi, et sans aucune référence à cette compétition, insiste-t-on chez ING Belgique.
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