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Avec ses sessions d’écoute à 200€, Kanye West se moque-t-il de son public ?

© Pascal Le Segretain/Getty Images

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Par L.Her.

Pour faire la promotion de son nouvel album, le rappeur américain Kanye West propose des "expériences musicales immersives".

Des gradins remplis, une scène centrale, des jeux de lumières, une scénographie soignée, de la musique assourdissante, des artistes au milieu. L’événement n’a, pourtant, rien à voir avec un concert. Dimanche 25 février, Kanye West donnait rendez-vous à ses fans à l’Accor Arena, l’une des plus salles les plus importantes de Paris. Les 20000 spectateurs étaient conviés à une “expérience musicale immersive”.

Malgré des dérapages, propos antisémites et polémiques à répétition, le public du rappeur américain a largement répondu à l’appel. Les prix élevés des billets, entre 100 et 200 euros, n’ont pas, non plus, freiné ses aficionados. Depuis quelques semaines, le désormais nommé Ye organise des sessions d’écoute XXL de son nouvel album, Vultures 1, en collaboration avec Ty Dolla Sign.

Sur scène, il débarque avec une cagoule sur la tête, sans micro à la main : il ne prendra pas la parole et ne chantera pas. Différents artistes comme Freddie Gibbs, Quavo, Playboi Carti, Rich the Kid, et bien entendu Ty Dolla Sign le rejoignent. Même sa fille, North West, avec qui il partage un duo, fait une apparition. Sur les écrans géants, la foule peut voir Kanye West se transformer en chauffeur de salle : il danse, gesticule et mime ses nouvelles chansons. Mais elle devra en rester là.

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Sur les réseaux sociaux, l’événement divise. Les éternels soutiens de Kanye West défendent une initiative visionnaire qui bouscule les codes de l’industrie musicale et l’aspect collectif de l’expérience. Les plus dubitatifs mettent en avant la somme affolante déboursée pour voir un artiste ne rien faire et dénoncent des ambitions capitalistes. D’autres soulignent une stratégie marketing bien rodée : l’Américain s’assure un maximum de visibilité à moindre coût.

Kanye West n’a, en tout cas, pas trompé son public : la soirée a toujours été annoncée comme une session d’écoute et non un concert. Difficile, donc, de s’indigner contre du playback, il n’y a pas de chant ou de crier à l’arnaque, tout était stipulé. Les spectateurs ont (a priori) payé leur place onéreuse en toute connaissance de cause.

Une opération rentable

Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que l’auteur de The College Dropout, sorti il y a tout juste 20 ans, organise des “listening parties”. En 2016, déjà, il investissait le Madison Square Garden à New York pour présenter The Life Of Pablo.

C’était également le cas pour son album précédent, Donda, en 2021. Ces soirées se déroulaient de la même manière, à la seule différence que celles-ci étaient programmées avant la sortie de l’album. Les spectateurs pouvaient donc découvrir en avant-première les nouveaux titres. En seulement quatre dates, ces événements auraient rapporté une dizaine de millions d’euros. Une opération qui s’avère donc ultra-rentable.

Ces propositions soulèvent néanmoins plusieurs questions concernant les attentes du public. La seule présence de l’artiste prévaut-elle sur la construction d’un concert qualitatif ? Les concerts traditionnels sont-ils dépassés ? Le concept devient-il plus important que l’apport artistique ? Peut-on tout vendre à une fan base fidèle ? Cela va-t-il créer un précédent et donner des idées aux promoteurs de concerts ? Il existe, cependant, peu d’artistes capables d’amasser les foules avec ce type d’offres, le cas Kanye West reste particulier.

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