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Royaume-Uni : la justice autorise Julian Assange à contester son extradition vers les États-Unis

Les juges ont donné trois semaines aux autorités américaines pour garantir que l’Australien bénéficiera du premier amendement de la Constitution américaine qui protège la liberté d'expression, et qu'il ne sera pas condamné à la peine de mort.

Correspondant à Londres

Ce n'est pas encore l'épilogue de la saga Assange. La Haute Cour de Londres donne une chance au fondateur de WikiLeaks de continuer son combat contre son extradition vers les États-Unis. Poursuivi par les autorités américaines pour fuites massives de documents confidentiels, Julian Assange est incarcéré au Royaume-Uni et bataille depuis des années pour ne pas être extradé.

Deux juges de haut rang ont estimé ce mardi que les États-Unis devaient donner des «assurances satisfaisantes» sur le traitement qui serait réservé à Julian Assange. Notamment si celui-ci pourrait invoquer le premier amendement de la Constitution américaine, qui protège la liberté d'expression, et s'il risquait d'être condamné à la peine de mort. Si ces garanties ne sont pas fournies, Assange sera autorisé à faire appel. Une nouvelle audience est prévue pour le 20 mai.

Révélation de «crimes d’Etat»

En février, ses avocats avaient demandé l'autorisation de contester l'approbation par la Grande-Bretagne de son extradition vers les États-Unis, en juin 2022, arguant que les poursuites engagées contre lui étaient motivées par des considérations politiques. Les juges avaient examiné la requête durant deux jours, les 20 et 21 février. Les audiences s'étaient déroulées sans la présence de l'Australien de 52 ans dans la salle. Son avocat avait fait savoir «qu'il ne se sentait pas bien». Ces dernières semaines, les soutiens de Julian Assange ont alerté sur la dégradation de son état de santé. Ils avaient prévenu qu'en cas de défaite, ils saisiraient la Cour européenne des droits de l'Homme dans l'espoir de faire suspendre l'extradition.

Pour sa femme Stella, Julian Assange fait l'objet de poursuites «politiques» pour avoir révélé de graves «crimes d'État». Son avocat a averti qu'il risquait un «flagrant déni de justice». Selon Edward Fitzgerald, le créateur de WikiLeaks a usé de «pratiques journalistiques ordinaires consistant à obtenir et publier des informations». Les avocats américains, eux, se défendent de toute motivation politique, affirmant que les poursuites engagées contre Julian Assange sont «fondées sur l'État de droit et les preuves». «Ces poursuites engagées sont peut-être sans précédent, a reconnu Clair Dobbin, mais ce qu'il a fait est sans précédent».

Les États-Unis veulent juger Assange pour espionnage. Il est poursuivi pour avoir diffusé, à partir de 2010, plus de 700.000 documents classifiés sur les activités militaires et diplomatiques américaines, notamment en Irak et en Afghanistan. Parmi les pièces les plus médiatisées, une vidéo de l'armée américaine montrant une attaque menée en 2007 par des hélicoptères Apache à Bagdad, qui avait tué une douzaine de personnes dont deux journalistes de l'agence Reuters. Cette bavure américaine a fait la célébrité de WikiLeaks. Washington reproche à Assange d'avoir mis en danger des agents et sources des services américains. Les 18 chefs d'accusation retenus contre lui ont été formulés durant le premier mandat de Donald Trump, en vertu d'une loi de 1917 sur l'espionnage. En juin 2020, Washington a encore renforcé ses accusations en présentant de nouveaux éléments selon lesquels Assange aurait recruté des pirates informatiques et conspiré pour procéder à des intrusions dans des ordinateurs d'un pays de l'Otan.

La saga judiciaire britannique de Julian Assange dure depuis cinq ans. L'Australien a été arrêté en avril 2019, après avoir passé sept ans derrière les murs de l'ambassade d'Equateur à Londres. Il craignait alors une extradition vers les États-Unis ou la Suède, où il a fait l'objet de poursuites pour viol qu'il contestait et qui ont depuis été abandonnées. Il est depuis détenu dans la prison de haute sécurité de Belmarsh à Londres. En janvier 2021, la justice britannique avait tranché en faveur du fondateur de WikiLeaks, refusant de donner son feu vert à l'extradition, invoquant sa santé mentale et un risque de suicide.

Héros de la liberté d'expression ?

Pour contrer ces inquiétudes, les États-Unis avaient alors assuré que le prisonnier ne serait pas incarcéré à la prison de très haute sécurité ADX de Florence, dans le Colorado, surnommée « l'Alcatraz des Rocheuses », et qu'il recevrait les soins cliniques et psychologiques nécessaires. Washington avait aussi évoqué la possibilité qu'il puisse purger sa peine en Australie. Les Américains qualifient d'exagération grossière les affirmations des avocats d'Assange selon lesquelles il pourrait être condamné jusqu'à 175 ans en prison aux États-Unis. Ces derniers estiment que la peine pourrait en tout cas être d'au moins 30 ou 40 ans, même si des juges américains ont affirmé qu'il ne passerait probablement qu'entre quatre et six ans derrière les barreaux. La semaine dernière, l'équipe juridique d'Assange a déclaré qu'elle ne voyait aucun signe de résolution de l'affaire, à la suite d'un article du Wall Street Journal selon lequel le ministère de la justice des États-Unis envisageait de permettre à Julian Assange de plaider coupable d'une accusation réduite de mauvaise manipulation d'informations classifiées. Par le passé, les autorités américaines ont également démenti un prétendu plan visant à kidnapper ou à assassiner Assange alors qu'il se trouvait dans l'ambassade équatorienne de Londres.

Figure hautement controversée, Assange est un héros moderne de la liberté d'expression pour les uns et un mégalomane irresponsable et anti-occidental pour les autres. Ses partisans considèrent qu'il est un prisonnier politique et un journaliste dont le cas constitue un test important pour la liberté de la presse. À l’inverse, pour Washington, il s'agit de dissuader toute autre entreprise de divulgation des activités secrètes du pays.

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90 commentaires
  • Valentine

    le

    A-t-on au moins le droit de dire ici que la France aurait dû accueillir Assange quand il a demandé droit d'asile ? Pourquoi n'entend-on plus Dupond-Moretti sur ce sujet, pourtant ancien avocat d'Assange ?

  • Leloo

    le

    MACRON se grandirait en prenant position pour ce lanceur d'alerte , mais n'y comptez pas trop pour ce vassal des états unis

  • Boumbadaboum

    le

    C'est un traitre, point.

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