"On ne doit pas considérer un déchet comme une ressource": le projet d'un centre de déchets en Dracénie jugé inadapté par cette association

Un centre de gestion des déchets verra bientôt le jour en Dracénie. Christophe Terras, porte-parole d’une association citoyenne, réagit à ce projet jugé inadapté, voire inutile.

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Matthieu Bescond Publié le 14/03/2024 à 09:15, mis à jour le 14/03/2024 à 11:04
Pour Christophe Terras, porte-parole de l’association "Pour une gestion citoyenne des déchets en Dracénie", le PTE n’a rien d’une solution d’avenir. Photo DR

Le pôle de transition environnementale (PTE) n’a pas fini de faire couler de l’encre. Présenté en détail, lors de la dernière séance du conseil d’agglomération dracénien, fin février, le futur centre de gestion des déchets continue de susciter bon nombre de craintes. À commencer chez les opposants au projet, évidemment.

Rappelons que ce PTE est présenté par les élus comme une solution d’avenir pour le traitement des déchets en Dracénie (nos éditions précédentes).

Celui-ci sera composé d’une usine de prétraitement, qui accueillera les déchets non triés, à savoir les ordures ménagères, dans l’objectif de réduire leur volume d’enfouissement. À partir de ces déchets, seront produits des combustibles solides de récupération (CSR) destinés à alimenter une grosse chaudière en bout de chaîne. L’énergie dégagée sera ensuite réinjectée dans un réseau de chaleur, en direction d’une bonne trentaine de bâtiments publics.

Un projet qui permettra de "faire de nos déchets une valeur", arguait le président de la communauté d’agglomération au moment de ses vœux. Et c’est bien là ou le bât blesse pour l’association "Pour une gestion citoyenne des déchets en Dracénie"… Explications avec Christophe Terras, porte-parole du collectif.

Quand et pourquoi l’association a-t-elle été créée?

L’objectif de l’association est d’impliquer les citoyens dans la gestion des déchets du territoire. L’élément déclencheur, à l’origine de la création de la structure en juin 2022, a été ce projet de PTE. Nous nous sommes étonnés de voir ce projet émerger tout d’un coup, sans que la population ait été consultée. Nous appelions alors à davantage de concertation sur le sujet.

Quel regard portez-vous sur ce projet, de manière globale?

Après la surprise, on a tout de suite compris de quoi il retournait: l’incinération de déchets. Les rejets, les fumées, sont pour nous une inquiétude. La circulation des camions également. Le choix du site nous met un peu la puce à l’oreille. C’est un site inconstructible, il faudra donc modifier le plan local d’urbanisme. C’est un espace boisé, il faudra donc demander une dérogation pour abattre les arbres. La tortue d’Hermann, espèce protégée, est présente sur le site, il faudra donc mener une étude d’impact. Face à ces freins, on se demande un peu pourquoi cet espace naturel a été choisi pour construire un tel projet…

Mais au-delà ce tout cela, ce qui nous pose vraiment problème, c’est le fait que le déchet devient ici une ressource.

Qu’entendez-vous par là?

Ce projet sera géré par une société d’économie mixte à opération unique (Semop) (1).

Le fait qu’une entreprise privée soit majoritaire dans la gestion du PTE ne nous convient pas. Dans ce système, le déchet est considéré comme une ressource, destinée à produire de la valeur. Or, pour nous, on ne peut pas chercher à faire des bénéfices autour des ordures ménagères. Nous estimons que la gestion des ordures ménagères doit rester un service public. En l’état, ce partenariat public/privé nous inquiète beaucoup.

Nous pensons que le groupe Paprec, choisi par la communauté d’agglomération, est là pour faire de l’argent. Est-ce qu’on gère les déchets pour faire des profits ou pour rendre le meilleur service possible à la population? Nous posons la question.

Mais sans cette articulation public/privé, financer ce type de projets serait sans doute plus compliqué?

Sans doute. Mais, de toute façon, nous pensons que ce PTE est inutile. Pour nous, si l’accent était vraiment mis sur le tri et le compostage des déchets, cette usine perdrait complètement son intérêt. On sait que les performances autour du tri sont en baisse en Dracénie, comme ailleurs. Les gens trient moins qu’avant. Ils mettent tout dans la même poubelle. Pour notre part, nous pensons qu’il faut mettre en place une vraie politique de sensibilisation au tri, ce qui n’est pas le cas actuellement. En mettant également le paquet sur le biocompost. Les choses avanceraient alors, et la quantité de déchets enfouis serait réduite, ce qui est l’objectif du PTE.

Pour vous, ce projet n’a donc rien de novateur?

On a l’impression qu’on construit une usine d’un ancien monde. Avec ce projet, il n’y a aucune vision d’avenir. À nos yeux, il faut arrêter de brûler les matières. Il faut les réutiliser. Lutter contre le suremballage, trier, recycler. C’est ça l’avenir. Il faut sensibiliser la population à ces questions. Expliquer les enjeux financiers. Déployer des ambassadeurs du tri, faire du porte à porte, mettre en place un système de collecte de tri. Il faut vraiment mettre les bouchées doubles. À notre sens, il n’y a pas d’autre solution. Certes, cela demande des investissements. Mais beaucoup moins que les 130 millions d’euros prévus pour ce PTE destiné à brûler des déchets… Pour nous, ce n’est pas le bon investissement.

En quoi êtes-vous certains que les leviers évoqués seront tout aussi efficaces?

Il suffit de faire le test chez soi. Si l’on composte tout ce qui peut l’être, qu’on trie correctement, que l’on rapporte l’électroménager qui peut l’être en magasin, et qu’on amène le reste à la déchetterie: il n’est pas censé rester grand-chose dans la poubelle d’ordures ménagères…

Avec le PTE, on va continuer à demander à la population de trier ses déchets, tout en mettant en place une autre solution qui demande, elle, des déchets pour fonctionner et être rentable… C’est là tout le non-sens que l’on souligne.

Envisagez-vous des actions?

On entend davantage informer et sensibiliser la population à ce projet. À son inutilité. Nous allons prochainement éditer affiches et tracts, tout en lançant des campagnes de communication sur les réseaux sociaux. Ça n’avance à rien de faire des réunions entre personnes convaincues. On va faire le maximum, quitte, pourquoi pas, à organiser une manifestation.

 

1. Au sein de cette Semop, la communauté Dracénie Provence Verdon agglomération (DPVA) siégera à hauteur de 40%, aux côtés des sociétés Paprec-Pizzorno.

 

"Pour une gestion citoyenne des déchets en Dracénie".

Tél. 06 62 89 75 25.

E-mail: associtoyenne.dechetsdracenie@mailo.com

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