Découverte du « Pompéi britannique » et de la vie à l’âge du Bronze à Must Farm

Publié le 21 Mar 2024 à 06H00 Modifié le 21 mars 2024
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Must Farm, surnommée le « Pompéi britannique », offre une fenêtre exceptionnelle sur la vie à l'âge du bronze, près de 3000 ans en arrière. Revenons alors sur les aspects de la vie quotidienne et les circonstances dramatiques qui ont conduit à la préservation exceptionnelle de ce site.

Les fouilles archéologiques à Must Farm, dans le Cambridgeshire, ont révélé un site de l’âge du bronze d’une richesse inédite, offrant un aperçu détaillé de la vie quotidienne il y a près de 3000 ans. Dirigée par l’unité archéologique de l’Université de Cambridge, cette fouille exceptionnelle a mis au jour les restes d’un établissement construit sur pilotis, détruit subitement par un incendie.

Les objets retrouvés, allant d’outils sophistiqués à des restes alimentaires, témoignent d’une société avancée et organisée. Les résultats de cette investigation, publiés par le McDonald Institute for Archaeological Research, démontrent un niveau de conservation et de détails sans précédent. Ce site, surnommé le « Pompéi britannique », transforme notre compréhension de l’âge du bronze en Europe, révélant des aspects de la technologie, de l’alimentation et de la vie sociale de cette période lointaine.

Must Farm, le Pompéi britannique

Must Farm se trouve dans le Cambridgeshire au Royaume-Uni. Cet établissement unique, construit sur pilotis au-dessus d’un cours d’eau, a connu une existence éphémère, mais intense. Vers 850 avant notre ère, après environ neuf mois d’occupation, un incendie catastrophique a ravagé la communauté. La nature soudaine de cette catastrophe a pris les habitants au dépourvu, les forçant à abandonner leurs foyers et possessions dans une lutte désespérée pour la survie.

La tragédie de Must Farm, toutefois, a également créé une opportunité unique pour les archéologues. La destruction par le feu, suivie par l’engloutissement rapide des structures et des objets dans la vase du fleuve Nene, a permis une conservation exceptionnelle des artefacts.

Des objets du quotidien, tels que des outils, des poteries, des vêtements et même des aliments, ont été préservés dans un état remarquable. C’est une véritable fenêtre sur la vie quotidienne à l’âge du bronze. Elle révèle les activités domestiques et économiques de la communauté, des aspects plus intimes de leur vie, comme leurs régimes alimentaires et leurs pratiques artisanales.

Une vie quotidienne riche à Must Farm à l’âge du Bronze

Près de 200 artefacts en bois, témoignant de l’habileté et de la diversité des techniques de travail du bois de l’époque, ont été découverts. Cela comprend des outils utilisés dans la vie quotidienne jusqu’à des éléments structurels des habitations. Plus de 150 objets en fibres et textiles, ainsi que 128 récipients en poterie, offrent des indices sur les pratiques domestiques.

Ils dévoilent alors les modes de consommation et les traditions esthétiques de la communauté. Les plus de 90 pièces de métallurgie retrouvées incluent des outils et des ornements. Ces derniers révèlent ainsi un savoir-faire avancé dans le travail des métaux. Cette diversité d’objets montre une communauté engagée dans une variété d’activités artisanales, agricoles et domestiques. Elle possédait indéniablement une maîtrise technique remarquable pour son temps.

Pots de l’âge du bronze à Must Farm. © Cambridge Archaeological Unit/PA

L’analyse des restes alimentaires a permis de reconstituer le régime alimentaire des habitants de Must Farm. Cette alimentation se trouvait plutôt riche et variée. Les découvertes incluent des ragoûts de viande, des boulettes ou raviolis, et du pain. Les archéologues ont découverte aussi  des côtelettes de porc et d’agneau, indiquant une diète équilibrée et diversifiée.

La présence de ces aliments reflète, d’une part, une certaine prospérité. D’autre part, les individus avaient une connaissance approfondie des techniques de cuisson et de conservation des aliments. Les objets personnels comme des textiles décorés et des perles de verre exotiques témoignent d’un niveau de sophistication sociale et culturelle. Cette société appréciait l’esthétique et le confort. Une facette plus nuancée de la vie à l’âge du bronze se révèle.

Reconstitution du village. © Cambridge Archaeological Unit/PA

Des technologies avancées

Les habitants de Must Farm ont démontré une ingéniosité et une capacité d’innovation remarquables. Les haches multifonctionnelles démontrent une compréhension avancée de la nécessité d’outils polyvalents dans la vie quotidienne.

Ces haches, conçues pour permettre un échange rapide de têtes adaptées à différentes tâches, révèlent une approche pragmatique et ingénieuse. Cette capacité à concevoir des outils modulaires indique une anticipation des besoins futurs. Des qualités qui contredisent l’image d’une existence préhistorique exclusivement brutale et primitive.

Par ailleurs, la découverte de pots conçus pour s’empiler les uns dans les autres révèle une sophistication dans la conception d’objets du quotidien. Elle va bien au-delà de la simple fonctionnalité. Cette innovation survient bien avant l’invention du tour de potier. Elle montre une compréhension approfondie de l’espace et de l’organisation. La communauté semblait prêter une attention particulière à l’efficacité et à la conservation des ressources.

Ces caractéristiques suggèrent une société qui valorisait l’ordre, l’efficience et l’aspect visuel de son environnement domestique. Ces éléments remettent en question les perceptions traditionnelles d’une vie préhistorique rudimentaire. Ils dressent un portrait une communauté cherchant à améliorer sa qualité de vie et à optimiser ses pratiques quotidiennes.

La fin écrite de Farm Must

L’énigme entourant l’incendie catastrophique de Must Farm intrigue les chercheurs, laissant place à diverses théories sur son origine. La découverte d’armes telles que des lances et des épées sur le site alimente la spéculation qu’une attaque extérieure constituerait un facteur déclenchant.

Pointe de lance. © Cambridge Archaeological Unit/PA

Toutefois, l’absence de restes humains suggère que les habitants ont eu le temps d’évacuer leurs domiciles en urgence. La configuration du village, avec des maisons en bois construites sur pilotis et serrées les unes contre les autres, a probablement créé un effet de cheminée. Elle a exacerbé l’intensité et la rapidité de la propagation du feu. C’est ce qui scella le destin de cette communauté de l’âge du bronze.

Source : Mcdonald Institute Monographs et Conservations

À propos de l’auteur
Laurie Henry
Laurie Henry
Diplômée du Muséum National d’Histoire Naturelle de Paris dans le domaine de la biodiversité, Laurie Henry est rédactrice scientifique indépendante. Elle s’intéresse à tout ce qui touche au monde de la science, de la biologie aux dernières technologies, à l’espace, en passant par les avancées médicales et l’archéologie.
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