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Jours fériés musulmansLes détaillants suisses découvrent le ramadan

Dans une filiale Coop à Zurich, on trouve une étagère avec de la vaisselle en carton et d’autres articles liés au ramadan.

Le présentoir avec les gobelets dorés et les serviettes à l’imprimé oriental passe inaperçu à côté des nombreux lapins de Pâques en chocolat. Et pourtant, certains clients et clientes de Coop l’ont sans doute remarqué ces derniers jours: pour la première fois, le grand distributeur vend des articles spécialement pour le jeûne du ramadan. L’assortiment comprend, entre autres, des chemins de table, des assiettes en carton et des lunes décoratives dorées à suspendre.

Interrogé à ce sujet, le commerçant en ligne Galaxus confirme également qu’il distribue cette année pour la première fois un assortiment ramadan. L’article le plus populaire chez Galaxus est jusqu’à présent un ensemble de maisons en carton multicolores: celles-ci peuvent être remplies de petits cadeaux, comme un calendrier de l’avent.

La clientèle potentielle pour de telles marchandises augmente chaque année de quelques milliers de personnes. Actuellement, selon les chiffres officiels, environ 430’000 musulmanes et musulmans de plus de 15 ans vivent en Suisse.

Pour l’expert en commerce de détail Nordal Cavadini, d’AlixPartners, l’ajout d’articles en lien avec cette fête musulmane à l’assortiment est donc une démarche entrepreneuriale compréhensible. «La demande est manifestement présente», dit-il.

Muris Begovic, premier aumônier musulman de l’armée suisse: «La perception du ramadan a beaucoup changé en Suisse.» (image prétexte)

De manière générale, les assortiments dits ethniques sont à la mode, précise-t-il: «Par exemple turcs, balkaniques, indiens ou musulmans.» Chez Aldi Suisse, on trouve en effet de la viande hachée halal, produite selon les règles islamiques.

Nordal Cavadini rappelle également l’ascension fulgurante dans la culture populaire de jours de vente spéciaux comme Halloween ou le Black Friday, que la Suisse a repris des États-Unis: «Il y a quinze ans, ces jours étaient encore largement inconnus ou insignifiants chez nous.»

Le jeûne comme tendance sociale

Muris Begovic a un sens aigu des changements au sein de la société helvétique. Ce Bosniaque d’origine est le premier aumônier musulman de l’armée suisse et le directeur des associations regroupant les organisations musulmanes à Zurich. Il dit: «La perception du ramadan a beaucoup changé en Suisse.»

Il cite l’exemple des entreprises toujours plus nombreuses à tenir compte du ramadan dans leur planification annuelle. Il dit recevoir également de nombreux messages de non-musulmans lui souhaitant un bon ramadan, non pas en allemand, mais en arabe: «Ramadan Mubarak» ou «Ramadan Kareem».

Muris Begovic explique ce changement d’une part par l’intégration réussie de nombreux musulmans et musulmanes. «Je vois aussi cela comme un remerciement pour notre engagement dans la société, par exemple en tant que contribuables, en tant que prestataires de services militaires ou dans le travail bénévole.»

D’autre part, il voit un lien avec l’esprit du temps: «L’alimentation saine, les régimes, la nourriture durable, la spiritualité: tout cela est à la mode et se retrouve dans le jeûne», dit-il. Selon lui, les gens comprennent aujourd’hui beaucoup mieux le jeûne musulman. «Autrefois, on ne percevait le ramadan que comme une famine. Aujourd’hui, c’est différent.»

Il reste que le ramadan en tant qu’expérience de consommation comporte aussi des risques pour les grands distributeurs suisses. Une partie de la population considère en effet cet engagement comme politique. Opter pour un assortiment spécial ramadan est donc aussi critiqué en conséquence.

Migros en a fait l’expérience l’année dernière lorsqu’il a souhaité sur les réseaux sociaux «un bon ramadan» à toutes les personnes faisant le jeûne ainsi qu’à leurs familles. L’inscription figurait au-dessus d’une image montrant un bol de dattes fraîches. Cette publication bien intentionnée avait notamment fait réagir le conseiller national Andreas Glarner (UDC/AG). Il avait écrit sur Twitter: «Il est temps d’aller faire ses courses ailleurs.»

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Interrogé sur sa réaction de l’époque, Andreas Glarner affirme qu’il n’a rien contre le fait que les musulmans fêtent la fin du jeûne. «Mais nous avons clairement trop d’égards pour le ramadan en Suisse.»

Pour illustrer ses propos, le politicien se réfère à des discussions avec une directrice d’école qui lui a dit qu’il n’était guère possible de faire des examens ou des voyages scolaires pendant le mois du ramadan. Ce genre de choses énerve beaucoup de gens, estime l’Argovien. Selon ses dires, Migros a été inondé de réactions négatives à la suite de sa publication de l’an dernier.

Contacté, le géant orange ne fait aucun commentaire à ce sujet. Le fait qu’il renonce cette année à adresser des vœux à l’occasion du ramadan n’aurait rien à voir avec cela. Contrairement à Coop, Migros ne propose pas non plus d’articles spéciaux pour le ramadan dans son assortiment.

Illuminations pour le ramadan à Londres

En France ou en Angleterre, des articles en lien avec le ramadan sont vendus depuis des années déjà. Et dans des villes comme Cologne, Francfort ou Londres, des éclairages publics aux motifs musulmans sont suspendus dans les rues pendant tout le mois de jeûne.

En comparaison, l’évolution en Suisse est lente. «La demande de produits correspondants est actuellement gérable», explique-t-on chez Coop. Chez Galaxus, il n’est pas encore possible de se prononcer sur le chiffre d’affaires en raison du peu de temps disponible. Chez Aldi Suisse, on renonce à un assortiment qui cible spécialement le ramadan, mais on a développé l’offre de dattes et on y sent une demande accrue, informe le service de presse. L’expert Nordal Cavadini considère les activités des grands distributeurs suisses comme «une sorte de phase de test».

Il y a un an, des guirlandes lumineuses ont été accrochées pour la première fois dans le centre de Londres spécialement à l’occasion du ramadan.

En Allemagne, les vœux adressés aux musulmanes et musulmans à l’occasion du ramadan font depuis longtemps partie de la stratégie marketing des grands distributeurs. Rewe ou Marktkauf les publient chaque année sur leurs comptes de réseaux sociaux.

Du point de vue de l’auteur suisse et marocain Kacem El Ghazzali, les félicitations adressées à l’occasion du ramadan dans les pays occidentaux semblent plutôt naïves. «Il est faux de romantiser le ramadan», écrivait-il récemment dans la «SonntagsZeitung». Au téléphone, Kacem El Ghazzali, qui se dit athée, raconte ses souvenirs du ramadan au Maroc. Selon lui, le jeûne est sévère et pénible, il n’est pas amusant pour les non-musulmans.

À Cologne (All), des illuminations festives ont été suspendues pour la première fois cette année à l’occasion du ramadan.

En revanche, l’aïd, qui marque la fin du mois du jeûne, est une belle fête, estime Kacem El Ghazzali. Selon lui, il s’agit d’un événement festif pour tout le monde: les musulmans et musulmanes sont heureux d’avoir terminé le ramadan et les non-musulmans peuvent à nouveau manger et boire librement en public sans craindre de représailles. Même lui envoie des vœux ce jour-là, dit Kacem El Ghazzali, tout comme à Noël.