Les mystères du code : à la découverte des architectes du web

Selon l'International Data Corporation, seul 0,3% de la population mondiale sait coder. ©Getty - krisanapong detraphiphat
Selon l'International Data Corporation, seul 0,3% de la population mondiale sait coder. ©Getty - krisanapong detraphiphat
Selon l'International Data Corporation, seul 0,3% de la population mondiale sait coder. ©Getty - krisanapong detraphiphat
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Dans l’imaginaire collectif, le codeur est souvent représenté comme un geek marginal, isolé et absorbé par son écran. Au-delà des clichés, en quoi consiste son métier ? Qu’est-ce que le langage informatique et comment évolue-t-il ?

Avec
  • Nathalie Azoulai Traductrice, romancière.
  • Erwan Kezzar Co-fondateur de Contournement, spécialiste du No Code
  • Olivier Crouzet Directeur de l'innovation pédagogique à l'École 42

Une émission en partenariat avec Numerama. Retrouvez chaque semaine les chroniques de Marie Turcan et Marcus Dupont-Besnard.

S'immiscer dans les tréfonds du web et découvrir l'univers des codeurs et des codeuses. Déchiffrer les lignes de codes qui nous entourent. Comment devient-on codeur ? Quelles sont les institutions qui forment les membres de cette profession ? Alors que le métier est davantage accessible grâce aux formations en No Code notamment, peut-on réellement parler de vulgarisation de la profession ? Aussi, un nouvel élément est entré dans l'équation, l'intelligence artificielle : l'avenir du métier est-il en danger ?

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Un métier crypté

Dans son roman Python, Nathalie Azoulai décrit son apprentissage du langage de programmation. « Je veux comprendre ce qui se passe sous les doigts des jeunes codeurs qui pianotent jour et nuit », peut-on lire sur son site. « Ils sont là, à côté de nous, silencieux et puissants, et nous ne les voyons pas. »
« Je me suis rendue compte, détaille l’écrivaine*, que sous toutes nos activités, y compris sous nos activités littéraires […], il y avait une flotte graphique invisible ou invisibilisée, qu'on ne soupçonnait même pas. J’ai donc voulu entrer dans cette soute, pour voir ce qu'était cette flotte graphique qui ressemble étrangement à la nôtre »* : un ensemble de signes, de lettres, de chiffres et de ponctuation.

Le codeur, c’est justement celui qui « met en œuvre ces lignes de code, ces morceaux de programme », afin de faire fonctionner un outil, un site web ou encore une application mobile, explique Olivier Crouzet, directeur de l’innovation pédagogique à l’ École 42. Aujourd’hui, nous sommes « entourés de tout un tas de codes un peu partout : il y en a même dans notre machine à laver. Le métier de programmeur, synonyme de celui de codeur, consiste à « indiquer très précisément » qu’il faut réaliser « telle action dans telle situation ». Lorsqu’en tant qu’utilisateurs, nous appuyons sur un bouton pour « ouvrir ou fermer une fenêtre », cela déclenche « toute une série de calculs » et « d’affichages » qui doivent aboutir à « une forme logique pour l’utilisateur final, qui attend un résultat concret. »

Un monde connecté
3 min

Rendre le code accessible

Mais depuis quelques années, une alternative à l'apprentissage du code a émergé : celle du No Code, une approche qui consiste à offrir la possibilité à des individus ne disposant pas de compétences techniques de coder des sites web et des applications basiques. Pour Erwan Kezzar, cofondateur d'un organisme de formation dans le No Code intitulé  Contournement, le No Code permet de démocratiser les nouvelles technologies. Il devient possible pour le « commun des mortels » de « comprendre ces briques du web », « ce que l'on peut en faire », et « comment les construire ». L'objectif est de « permettre à des personnes non informaticiennes de créer leurs propres solutions, de résoudre leurs problèmes en autonomie », sans remplacer le code pour autant. Ils sont complémentaires : « les outils no-code sont des outils qui codent pour vous, et qui vous permettent d’automatiser un processus que vous faites à la main (copier-coller d’un Excel à un mail par exemple) et de créer cela vous-même. » Mais pour autant, les développeurs ne semblent pas menacer par une telle alternative : « on ne fait pas tourner un moteur d’Airbus ou une infrastructure électrique nationale avec du No code, précise le spécialiste. C’est là où les élèves de l’École 42 font véritablement de la programmation. »

La série d'établissements, créée et financée par l'homme d'affaires Xavier Niel, L'école 42, s’inscrit elle aussi dans cette démarche d’ouverture. « On voulait avoir une forme d’impact social », avance Olivier Crouzet. Les profils des codeurs ne sont « pas forcément en phase avec les progressions classiques dans le système scolaire. […] Plusieurs personnes qui étaient en décrochage, par exemple, se sont révélées très bonnes dans la pratique du code ».
Ainsi, pas besoin de diplôme pour entrer à l’École 42. Le recrutement se fait par « l’épreuve de la piscine » : « quatre semaines pour goûter » au code, vérifier que nous n'en avons pas une « vision fantasmée », et surtout, s'assurer que le modèle pédagogique nous correspond : il n’y a ni cours, ni professeurs. Les élèves travaillent en autonomie.

Les Pieds sur terre
30 min

L'Intelligence artificielle : une opportunité pour les développeurs ?

Les intelligences artificielles permettent désormais de générer du code. Un outil qui "participe du mouvement de démocratisation des technologies" et permet une "réappropriation des moyens de production logiciels et numériques" selon Erwan Kezzar. "La programmation visuelle permet aux citoyens" de mieux comprendre "les enjeux numériques". En manipulant "des briques du web et des bases de données", les jeunes en comprennent mieux l'utilisation.

Les IA demeurent néanmoins de véritables "boîtes noires" : un utilisateur lambda ne comprend pas les arcanes de la machine au moment où il s'en sert, à la différence des étudiants de l'École 42, qui sont eux, formés à en coder. Les développeurs n'utilisent les outils que sont "ChatGPT ou GitHub Copilot" que comme assistance dans la production du code, explique Olivier Crouzet. Ils sont plus performants : l’IA génère des trames qui permettent d'aller plus vite sur la conception de certaines solutions.

La Méthode scientifique
59 min

Réécoutez  Les Nouvelles d'un Monde Meilleur de Juliette Devaux, toute l'actualité de la semaine qui éclaire le monde de la tech.

Pour aller plus loin :

Nathalie Azoulai, 2024.  Python, Éditions POL.**

Erwan Kezzar, 2024.  No-code, une nouvelle génération d'outils numériques, Éditions Eyrolles.

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