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Guerre en Ukraine : Kiev affirme désormais avoir touché quatre navires russes lors de ses frappes en Crimée

Après une salve de missiles samedi, les Ukrainiens avaient d’abord annoncé avoir touché deux bateaux russes. Mais une image satellite publiée dimanche invite à la prudence. Les deux premiers navires ne semblent pas avoir été détruits.

Le brouillard de guerre est épais au large de l’Ukraine et toute affirmation, d’un camp ou de l’autre, doit être reprise avec prudence. Samedi, l’Ukraine a lancé une salve de missiles de croisière Storm Shadow ou SCALP contre la péninsule de Crimée, qui accueille la principale base navale russe en mer Noire, à Sébastopol. À cette occasion, l’armée de l’air ukrainienne, qui opère les chasseurs-bombardiers capables d’utiliser ces armes de fabrication britannique et française, a annoncé avoir «touché avec succès» deux navires de débarquement russes de classe Ropucha , les Azov et Yamal. Ce dernier aurait même été «endommagé de façon critique», selon le renseignement militaire ukrainien. Dans la foulée, de nombreux comptes ukrainiens ont même annoncé sur X que les deux navires amphibies avaient été «détruits».

Ce mardi 26 mars, Kiev a même annoncé avoir frappé deux autres navires russes lors de l’attaque de samedi, alors que des doutes existent, à ce stade, sur la réussite des frappes ukrainiennes sur les deux premiers navires. En témoigne la publication d’une première image satellite de la base navale de Sébastopol datée du 24 mars. Sur le cliché, deux navires de classe Ropucha apparaissent bien : l’un d’eux semble être escorté vers un quai flottant, mais ne présente pas de dommages apparents - il est certes escorté par des remorqueurs de port, mais la manœuvre est classique en pareil cas - ; le second semble être amarré le long d’un quai, là encore sans dommages apparents. En revanche, des marques noires - comme une zone brûlée - apparaissent bien, mais sur le quai lui-même et non sur le navire.

«Cette marque de brûlure n’apparaît pas de manière flagrante dans les images passées», décrypte sur X Tyler Rogoway, analyste en source ouverte qui a publié cette image issue de l’entreprise Planet Labs, dont les données satellites sont régulièrement utilisées depuis le début du conflit. «On ne sait pas exactement si le navire amphibie a été endommagé et (si oui) à quel point», conclut-il, notant qu’«il ne semble pas y avoir de réponse majeure en cours». «Il semble que la frappe de Storm Shadow ait raté les deux cibles, n'infligeant que des dégâts minimes aux deux navires de débarquement de la classe Ropucha», a également commenté sur X Frederik Van Lokeren, chercheur spécialiste de la marine russe et ancien officier de la marine belge.

Deux autres autres navires touchés ?

Selon Kiev, deux autres navires russes pourraient avoir été endommagés lors de l’attaque. «On soupçonne que, très probablement, le navire Ivan Khurs a également été endommagé», a d’abord affirmé le porte-parole de la marine ukrainienne, Dmytro Pletenchuk, lundi 25 mars. Contrairement aux deux navires de débarquement, anciens puisque mis en service en 1988 et en 1990, l’Ivan Khurs est un navire de renseignement récent, entré dans la marine russe en 2018. Mais là encore, aucune information indépendante ne permet, à ce stade, de confirmer ou d’infirmer le fait qu’il ait été touché. En mai 2023, les Ukrainiens avaient d’ores et déjà annoncé que le navire avait été «endommagé» voire «détruit» par une attaque de drones navals. Depuis plusieurs mois, de nombreuses images satellites ont pourtant montré le navire sans dommage apparent.

Ce mardi, sur Facebook, la marine ukrainienne a finalement annoncé, à l’affirmative, que «le 24 mars, outre les grands navires amphibies Yamal et Azov, les forces de défense ukrainiennes (avaient) réussi à frapper le navire de reconnaissance Ivan Khours et le grand navire amphibie Kostyantyn Olchansky». Selon Kiev, ils auraient cette fois utilisé un missile de croisière ukrainien Neptune (version modernisée d’une missile conçu pour la marine soviétique). Fait intéressant, le Konstantin Olshansky, qui est également un navire de débarquement de classe Ropucha, est à l’origine un bâtiment ukrainien... capturé par les Russes en 2014 lors de l’annexion de la Crimée. Non opérationnel, le bateau est inactif depuis 8 ans mais pourrait être remis en état ou servir à restaurer d’autres Ropucha endommagés, ont affirmé ces derniers mois des sources militaires dans la presse russe.

Mer noire : 20% des navires russes endommagés ou détruits

Le bilan de l’attaque de samedi requiert donc encore le conditionnel. «Malgré ce qu’affirment l'armée de l'air et le renseignement militaires ukrainiens, nous ne pouvons considérer aucun des (deux) Ropucha comme particulièrement endommagé ou détruit jusqu'à ce que nous obtenions un peu plus de preuves», a par exemple résumé «Ukraine Control Map», l’un des comptes OSINT (renseignements en source ouverte, NDLR) qui suit la guerre en Ukraine.

Il n’en reste pas moins que la marine russe a été profondément affectée par les tirs de missiles et les frappes de drones navals ukrainiens depuis le début de la guerre. Dans une enquête parue début mars, Le Figaro montrait qu’au moins 20% des navires russes en mer Noire avaient été endommagés ou détruits (et même 30% du tonnage de cette flotte, l’une des quatre qui composent la marine russe). Si les navires les plus récents - notamment ceux porteurs de missiles de croisière Kalibr - ont plutôt été épargnés, les navires amphibies ont en revanche été décimés. Sur un total de neuf, trois ont été détruits et deux lourdement endommagés en deux années de guerre. Les Azov et Yamal font partie des quatre restants. À ce stade, faute d’éléments suffisants, Le Figaro ne met pas à jour son propre bilan.

Ces navires de débarquement, qui ne peuvent être utilisés pour menacer sérieusement la côte ukrainienne de la mer Noire, jouent en revanche un rôle logistique essentiel entre la Russie et la Crimée. Moscou dispose néanmoins de liaisons terrestres et même ferroviaires pour pallier cette attrition navale, en pouvant passer à la fois par le pont de Kertch qui enjambe le détroit du même nom, mais aussi désormais par les territoires occupés des oblasts de Zaporijjia et de Kherson.

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31 commentaires
  • DENYSFORBAN

    le

    L'intox est le "nerf de la guerre " ..L'ex comédien ne faillit pas à cet adage ..Une paix serait plus encourageante pour ces millions d'Ukrainiens pris en otage par des politiques irresponsables ..

  • Dany L

    le

    Cela ne change rien au cours de cette guerre, qui est terrestre.

  • Bulgroz

    le

    Certains ne semblent pas comprendre que la finalité de ces attaques n'est pas de couler les navires, même les missiles antinavires. Le naufrage est en fait un hasard. Le vrai but est la projection par la charge d'éclats qui vont détruire tous les circuits électriques, hydrauliques et tuyauteries, rendant le bateau inutilisable pendant de longs mois et obligeant à des réparations complexes et coûteuses, si on en a les moyens...

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