« Avant, ici, on voyait des renards au fond du jardin et aux alentours, des champs à perte de vue. Depuis, ça a bien changé ». Michel, l’un des habitants de Kerostin, à Pontivy, le sait parfaitement : avec les années, les quartiers se forment, se déforment, se transforment et se façonnent. Mais le sien peut-être un peu plus que les autres avec, en deux ans seulement, l’apparition d’un collectif de plusieurs logements et d’un camping intercommunal.
« Ma baraque à frites »
Cet équipement, d’un budget de 3,6 M€ et dont la gestion vient d’être confiée à l’association VVF (Villages Vacances Familles), opérateur historique du tourisme social, proposera notamment 55 emplacements dont dix spécialement aménagés pour les camping-cars. Mais aussi quinze autres hébergements de style insolite et une salle multifonction de 200 m², le tout sur 2,4 hectares de terrain situé à un jet de pierre de l’unité de méthanisation du Gros-Chêne et au beau milieu du Centre-Bretagne.
Un futur camping censé ouvrir vers le proche horizon du printemps 2025 qui fait légitimement causer entre les rues encore tranquilles de ce petit coin du nord de Pontivy, où l’on trouve notamment Laurent. Devant la future entrée dudit camping, trône sa coquette maison, à la façade récente et au jardin printanier. « Je suis pile en face ! Je pourrais presque installer ma baraque à frites dans le jardin », ironise l’habitant, dans un sourire jaune. « Évidemment, on n’est jamais très heureux d’avoir un équipement de cette ampleur s’installer près de chez soi », concède celui qui imagine l’éventualité de nuisances sonores.
« Pas un pet d’ombre »
« Si je suis embêté par le bruit, j’irai loin dans les démarches », prévient l’habitant, d’abord sceptique quant à la prospérité du projet. « En discutant avec les voisins, on se rend compte que dans le quartier, ce machin-là n’est pas forcément détesté mais que c’est un machin bizarre. Le coût de construction est prohibitif, c’est surdimensionné. Il n’y a pas vraiment eu de concertation avec les élus, ça a été construit à côté de plusieurs logements sociaux et d’un méthaniseur, c’est orienté plein sud, sans un pet d’ombre, l’accès est étroit et je ne vois pas un camping-car faire ses manœuvres avec son attelage. Bref, la viabilité de tout ça me paraît très approximative ».
« Y a plein d’eau là-dedans »
Michel, que l’on retrouve quelques maisons plus loin, résume en peu de mots le point de vue général : « Est-ce qu’il y aura du monde dans ce camping ? Ce n’est pas certain. Personnellement, si j’étais touriste, je n’irai pas camper là ! ». Maurice non plus. D’un haussement d’épaules, celui qui habite depuis 40 ans dans le quartier connaît la subtilité des lieux. « Le terrain du futur camping ? Y a plein d’eau là-dedans, c’est marécageux ! », tonne le retraité, en riant sous cape. « Ce n’est sûrement pas là qu’il aurait dû être construit. C’était de l’autre côté de la rive qu’il fallait le faire ! Qui va venir ici ? Personne ! ».
En attendant l’ouverture, l’assemblée de Pontivy communauté a largement approuvé le choix de confier la délégation de service public à VVF. Seuls deux élus ont refusé de prendre part au vote : Marie-Madeleine Doré-Lucas et Christophe Marchand, qui à propos de ce camping, campent sur leur position. « Nous l’avions dit, nous ne sommes pas favorables à cet équipement qui nous paraît surdimensionné ! »