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Sahel : l'armée américaine priée de quitter le Niger

JUNTE. En dépit de leurs efforts, les Américains vont devoir abandonner leurs bases militaires au Niger. Les militaires à la tête de ce pays sahélien avaient déjà poussé l'armée française à se retirer.

Régis Le Sommier
Lever des couleurs au Niger, en avril 2018, lors de l'exercice Flintlock de lutte contre les groupes djihadistes.
Lever des couleurs au Niger, en avril 2018, lors de l'exercice Flintlock de lutte contre les groupes djihadistes. © DR

La coopération en matière de sécurité entre les deux pays durait depuis douze ans. On la croyait solide. À l’inverse de ses voisins maliens et burkinabés, l’armée nigérienne a même été formée par les États-Unis. Le 16 mars pourtant, c’est la rupture. La junte au pouvoir à Niamey dénonce l’accord de coopération militaire. Pour Washington, c’est un revers de taille, au bénéfice de Moscou, comme au temps de la guerre froide.

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Les Américains croyaient dur comme fer échapper au sort des Français et conserver contre vents et marées leurs installations militaires dans le pays. En particulier, la fameuse base aérienne 101, située à Agadez, dans laquelle ils ont investi plus de 100 millions de dollars. Celle-ci regroupe 700 militaires ainsi que des équipements de haute technicité, dont deux appareils de surveillance électromagnétiques, des hélicoptères et des drones MQ 9 « Reaper ». Située à l’est du Niger, Agadez possédait en outre l’avantage d’être géographiquement au cœur du Sahel, idéal pour observer les activités terroristes dans toute la zone.

Contrairement aux Français, les Américains s’étaient bien gardés de parler de « coup d’État » au Niger

Washington n’a donc pas ménagé sa peine pour conserver ce dispositif. Le 7 août 2023, soit à peine dix jours après le coup d’État, la sous-secrétaire d’État, Victoria Nuland, se rendait en personne à Niamey pour rencontrer les chefs de la junte au pouvoir. Contrairement aux Français, les Américains s’étaient bien gardés de parler de « coup d’État » dans leurs communiqués. Mieux, parmi les putschistes, ils avaient un homme à eux, le général Moussa Salaou Barmou, qui n’est autre que leur partenaire de toujours dans la lutte contre les radicaux islamistes. Il est surnommé par ses pairs « l’homme de Washington ». C’est dire si la relation est proche.

« Nous avons rencontré le chef autoproclamé de la défense de cette opération, le général Barmou, dira Nuland, et trois des colonels qui le soutiennent… La porte reste ouverte pour continuer de parler. Mais encore une fois, c’était difficile aujourd’hui, et je serai franche à ce sujet ». Victoria Nuland ne cache pas non plus sa déception de n’avoir pas été reçue par le chef de la junte en personne, le général Tiani, mais tout n’est pas perdu cependant pour les intérêts américains au Niger.

Niamey a choisi Moscou

Dans le même temps, la situation entre la France et le Niger se tend. Elle s’achèvera au terme d’un bras de fer de trois semaines, par le départ désastreux de l’ambassadeur de France le 28 septembre, suivi par l’évacuation des militaires de la base aérienne projetée de Niamey le 22 décembre. Tout du long, au grand dam de leurs partenaires français qui ne comprennent pas leur absence de solidarité, les Américains manœuvrent pour rester. Ils iront jusqu’à reconnaître la légitimité du CNSP, le conseil national pour la sauvegarde de la patrie, actuellement au pouvoir. Leur nouvelle ambassadrice, Kathleen A. FitzGibbon, présentera aux autorités ses lettres de créance, signe discret mais apprécié d’une forme de reconnaissance de la junte. Encore quelques jours avant la rupture, une délégation américaine composée de Molly Phee, secrétaire d’État adjointe aux affaires africaines, Celeste Wallander, chargée des affaires de sécurité internationale, et Michael Langley, chef de l’US Africom, faisait le siège du pouvoir dans la capitale nigérienne. En vain.

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Dans les faits, et comme la nature a horreur du vide, Niamey, à la suite de ses voisins maliens et burkinabés, avait déjà choisi Moscou. Les Russes se tenaient en embuscade depuis le coup d’État, sans toutefois que leur responsabilité soit avérée dans celui-ci, en dehors d’une distribution opportune de drapeaux russes tout neufs aux manifestants réclamant le départ des Français. Ceux-ci ne sont pas rancuniers vis-à-vis des Américains qui les rejoignent aujourd’hui dans le camp des perdants. Paris revoit son dispositif en Afrique de l’Ouest, et une proposition de créer des bases franco-américaines a même été évoquée.

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