Culture

Hello Kitty fête ses 50 ans ! Mais que dit la mascotte kawaii de notre époque ?

Depuis sa création dans les années 1970, Hello Kitty est devenue une icône de pop culture à part entière, toujours aussi célèbre et adulée aujourd'hui de la part des petits, mais aussi des adultes. Décryptage d'un phénomène planétaire.
Hello Kitty
© Saban International / Courtesy Everett Collection

Depuis 50 ans, la frimousse de Hello Kitty, petit chat blanc au nœud rouge, a envahi le paysage culturel mondial. Imaginé sous les crayons de la styliste Yuko Shimizu pour la firme nippone Sanrio, le personnage est apparu pour la première fois en 1974. Le chaton est alors habillé d'un costume simple, dans des tons primaires, et n'a qu'une seule posture - assis de profil et la tête tournée de face. Apposée sur des portes-monnaie en vinyle, puis des stylos, des peluches ou encore des lunch box, Hello Kitty inonde les magasins de jouets comme les cours d'école.

Puis, lorsque Sanrio décide d’étendre le marché des produits dérivés à une population plus âgée, l’image enfantine se greffe sur des items pour adultes, allant du grille-pain à la robe de haute couture. À présent, on compte plus de 22 000 produits à l’effigie du félin. Un parc d’attraction lui est entièrement dédié au Japon. Une série télévisée, des jeux vidéos, d'innombrables cadeaux souvenirs… On se souvient également du lancement d'avions griffés Hello Kitty par la compagnie aérienne taïwanaise EVA Air, courant 2012. Il va sans dire que la poupée s’est faite, au fil des ans, le symbole d’un consumérisme de masse. La création de cartes de crédit MasterCard aux États-Unis “pour apprendre aux jeunes filles à consommer” pourrait en être le gage ultime. Mais elle est aussi, dans un même souffle, le signe du développement de la portée de l'univers kawaii.

© Saban International / Courtesy Everett Collection

Hello Kitty ou l'avatar de la mignonnerie

Le terme japonais kawaii renvoie au qualificatif “mignon”. Nul doute que la tendre peluche en soit devenue l'égérie tant son apparence sert cette intention de n'être qu'adorable. C'est avant tout un chaton. Un bébé animal donc, auquel on ne peut difficilement résister. Mais aussi un chat, soit l'animal de compagnie gracieux par excellence. Hello Kitty est une poupée chargée de sens et d'émotions. Elle est porteuse de valeurs dites féminines telles que la douceur, l'empathie et la vulnérabilité. Ce n’est pas pour rien que le chat a souvent été intimement lié aux femmes dans l'histoire… C'est notamment sur ces qualités que l'entreprise Sanrio va capitaliser en attirant un large éventail de consommateurs. Une technique de communication commerciale que le Professeur Lori Merish nomme de “matérialisme sentimental” dans Sentimental Materialism : Gender, Commodity Culture, and Nineteenth-Century American Literature, publié aux éditions Duke University en 2000.

Cette féminité enfantine, passée sous un filtre romantique, s'inscrit dans la culture girly. Hello Kitty en est le symbole suprême, mais on peut citer d'autres figurines dont la réputation a participé à sa floraison en dehors du Japon, à l'instar des poupées Barbie et Bratz, ou encore des personnages Diddl. Dans chacun de ces univers, le rose, dans toutes ses nuances, est la couleur prédominante. Signe d'une féminité valorisée, parfois même exacerbée.

Deux jeunes filles habillées en Hello Kitty dans les rues de Tokyo, au Japon, en 2000.© Ben Knight / PYMCA /Avalon / Getty Images

Mignonne, mais pas que

Les codes de la mignonnerie ont été repris dans bien des domaines - que ce soit la mode, le design ou la littérature - et de bien des manières - parfois plus sombre ou avec ironie. Lorsqu’elle est exagérément stylisée, l'esthétique kawaii dit souvent quelque chose de la personne qui l'arbore. La tendance nippone dite Yume Kawaii met en scène un monde excentrique où tout serait possible. Cela se manifeste au gré d'une palette chromatique acidulée et de motifs significatifs (nuages, arc-en-ciel, chatons). Pour ce qui est du personnage de Hello Kitty, il n'a cessé d'être co-signé par les acteurs de l'industrie de la mode, qu'il s'agisse du luxe ou du prêt-à-porter : une capsule Blumarine, une ligne Yohji Yamamoto, des sacs Balenciaga, des accessoires Comme des Garçons ou un bikini en crochet GCDS, sans oublier les collaborations populaires avec Nike, Puma, Doc Martens, Crocs, Uniqlo ou Lazy Oaf - la liste est vraiment infinie. “Hello Kitty est comme une toile vierge. Les artistes peuvent y incorporer leurs propres idées et créer des dessins différents, sans limite d'âge”, évoque l'illustratrice Yuko Yamaguchi au Vogue Hong Kong à propos de ce succès.

Michelle Trachtenberg aux Teen Choice Awards de 2002.© L. Cohen / Getty Images
Paris Hilton à sa soirée d'anniversaire au Bellagio à Las Vegas.© Denise Truscello / Getty Images

Il est porté par une myriade de célébrités, allant de Paris Hilton à Michelle Trachtenberg (inoubliable Georgina Sparks dans la série Gossip Girl) et Cameron Diaz au début des années 2000. Ensuite, c'est Lady Gaga qui a fièrement endossé le statut de fan de Hello Kitty. On se souvient encore du chignon à nœud qu'elle aimait tant faire dans les années 2010. Récemment, Dua Lipa et Kim Kardashian ont encore affiché leur attrait pour le petit animal. Cette dernière a notamment fait du chaton le thème de la fête d'anniversaire de sa fille, Chicago, le 25 février 2023. Quelques mois plus tard, la tribu Kardashian s'est rendue au Japon pour vivre pleinement l'expérience kawaii.

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Hello Kitty est un produit de masse, c'est indéniable. Toutefois, il lui est également arrivé de représenter la subversion lorsqu’elle est adoptée par les sous-cultures, dès les années 90 - parmi lesquelles la scène goth et emo, ainsi que les mouvements féministes punk tels que les Riot Grrrls. Le rose tendre de la peluche se mêle alors à du rouge et du noir. Du côté de la rue, il n'est pas rare d'apercevoir son minois iconique se greffer sur les tenues de celles qui revendiquent la ré-appropriation de leur féminité. Cela vaut encore aujourd'hui. La nostalgie en prime. Pour les personnes ayant grandi entourées de ces joyeuses figurines, le souvenir se porte comme une étendard. Une panoplie qui ramènerait directement dans le monde de l'innocence, sorte de refuge face au stress et à l'anxiété venant avec l'âge adulte.

En France, une génération de femmes artistes, âgées de la vingtaine ou de la trentaine, renoue ainsi avec leur adolescence et le style caractéristique de cette tranche de vie : l'emo (abréviation d'emotional). De la sorte, l'art et la mode deviennent un médium privilégié pour exprimer leur intériorité, et leur vulnérabilité. Des carnets cathartiques, des fioles pour collectionner ses larmes, des vers tatoués sur sa peau… L'autrice et fondatrice du compte Amours Solitaires Morgane Ortin incarne parfaitement cette intention, que ce soit dans ses livres, sa façon de se parer ou d'habiller son intérieur. D'ailleurs, on croise régulièrement un coussin Hello Kitty dans les clichés de son appartement parisien qu'elle dissémine sur son feed Instagram.

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Hello Kitty à l'honneur d'une exposition événement

Le chaton fait en ce moment l'objet d'une exposition anniversaire en partenariat avec Sanrio à la Somerset House de Londres. Entièrement consacrée à tout ce qui est mignon, comme son nom “cute” l'indique, l'événement explore l'évolution et la force d'attraction de ce phénomène à travers le prisme de l'art contemporain. Plus de 50 000 articles portant l'emblème Hello Kitty y sont présentés, le plus surprenant demeurant très certainement la discothèque immersive au sein de laquelle les visiteurs peuvent s'octroyer quelques pas de danse sur des tubes pop et disco des décennies passées, d'Olivia Newton-John à Donna Summer.

Aussi, le musée a commandé une œuvre inédite, à la fois musicale, visuelle et sonore, à l'artiste Hannah Diamond pour parfaire son exposition. L'installation s'inspire d'une soirée pyjama entre filles, et passe exclusivement des titres féminins (SOPHIE, Charli XCX, A.G. Cook, GFOTY, Kyary Pamyu Pamyu et bien d'autre figurent sur la playlist). La chanteuse y déploie sa propre vision de l'enfance, rêveuse et tout en rose. Hannah Diamond a par ailleurs teinté ses cheveux de cette couleur pop… Il faut dire que cela va avec son style vestimentaire, largement composé de t-shirts à imprimés chatons, de corsets romantiques et de rubans qu'elle noue dans ses longs cheveux (un accessoire emprunté aux poupées kawaii dont Hello Kitty, qui l'arborait déjà en 1974).

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Hannah Diamond - Poster Girl

CUTE, une exposition à découvrir jusqu'au 14 avril 2024 à la Somerset House, à Londres. Plus d'informations sur le site SomersetHouse.org.uk.

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