Bayeux : passe d'armes au conseil municipal autour des orientations budgétaires 2024

Charges, investissements, pression fiscale... Le conseil municipal de Bayeux (Calvados) a présenté ses orientations budgétaires lors de sa réunion du mercredi 20 mars 2024. 

L’ancien poste de Police de Bayeux (Calvados) pourrait être reconverti en un lieu dédié à la liberté de la presse, dans le prolongement du Prix des correspondants de guerre.
L’ancien poste de Police de Bayeux (Calvados) pourrait être reconverti en un lieu dédié à la liberté de la presse, dans le prolongement du Prix des correspondants de guerre. Un investissement qui a fait débat lors de la réunion du conseil municipal de Bayeux le mercredi 20 mars 2024. ©Frédéric Bourgeois/La Renaissance le Bessin
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Réuni en séance mercredi 20 mars 2024 au siège de Bayeux Intercom, le conseil municipal de Bayeux (Calvados) a épluché le rapport d’orientations budgétaires pour 2024.

 

Après trois années de crise sanitaire et économique, Bayeux, comme les autres collectivités, a dû s’adapter. La Ville a serré la vis sur les dépenses de fonctionnement pour garder le cap face aux baisses de recettes, puis face à l’envolée des prix de l’énergie, à l’inflation, et à la revalorisation du point d’indice des fonctionnaires. Pour 2024, les perspectives « restent incertaines », souligne Jean-Marc Delorme, maire adjoint en charge des finances. La municipalité aura recours à l’emprunt sans augmenter la pression fiscale en 2024.

Stabilité des taux d’imposition

La Ville de Bayeux n’augmentera pas la pression fiscale en 2024, malgré le contexte économique. Le taux de la taxe d’habitation restera figé à 13,7 %. 40,39 % pour la taxe sur le foncier non bâti. 48,26 % pour le foncier bâti (22,10 % pour la part départementale, 26,16 % pour la part communale). « Pour 2024, une hypothèse prudente a été retenue sur le produit de ces taxes », poursuit Jean-Marc Delorme. « Le montant attendu est de 7,78 millions contre 7,55 millions réalisés en 2023, soit +3,05 % alors que la progression des bases est annoncée à +3,9 %. »

Concernant le produit des droits de mutation, il est attendu en baisse. La recette 2024 est retenue pour 500 000 € contre 612 000 € de recettes réalisées en 2023.

D’autres produits viendront alimenter le budget principal, comme le stationnement pour 850 000 € attendus (876 000 € réalisés en 2023), le revenu des immeubles retenu à 185 000 € (184 000 € en 2023) et un reversement du budget annexe Musées pour 1,2 million (1,1 million en 2023). Enfin, des dotations revalorisées par la Loi de Finances sont attendues à hauteur de 1,514 million (+12 000 €) pour la dotation globale de fonctionnement, et 2,52 millions (+3%) de dotation de solidarité urbaine et de solidarité rurale.

Des charges en forte hausse

L’envolée du prix de l’énergie impactera lourdement les charges à caractère général dans le budget principal 2024 qui s’établira pour ce chapitre à 4,941 millions, soit une augmentation de 592 000 € (+13,6%) par rapport à 2023. C’est 225 000 € de plus sur la facture avec une augmentation de +25 % du prix du gaz, de l’électricité et des carburants. Les primes d’assurances augmentent, elles aussi, significativement (+120 000 €). 

La Ville annonce +3,96 % d’augmentation pour le chapitre des charges de personnel qui s’élève à 7,374 millions en 2024 contre 7,093 millions en 2023 (évolution du point d’indice pour 55 000 €, évolution des 5 points d’échelon au 1er janvier 2024 pour 90 000 €, saisonniers et événementiel pour 65 000 €).

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Recours à l’emprunt

Pour 2024, Bayeux prévoit 7,643 millions d’euros de dépenses d’investissement pour le budget principal. Les principales opérations concernent les travaux du Collegium, la future maison de la vie associative située dans l’ancienne école Alain-Chartier, pour 3,447 millions.

Et les travaux du futur musée de la Tapisserie pour 3,657 millions sur l’exercice 2024. Pour réaliser ces 7,643 millions d’euros de dépenses d’investissement, la Ville engagera ses propres ressources (FCTVA, cessions, subventions et épargne disponible) ainsi qu’un emprunt de 2 millions d’euros.

L’encours de la dette en 2024 est de 8 millions d’euros, soit environ 600 € par habitant, quand l’encours de la dette par habitant pour l’ensemble des communes avoisine les 1 000 €.

Malgré ces investissements, la capacité d’autofinancement (CAF) de la Ville « permet de maintenir un niveau d’endettement raisonnable », selon le rapport d’orientations budgétaire. Au stade de la prévision, la CAF nette est annoncée à 489 000 €, en (forte) baisse par rapport à 2023 (1,2 million).

Remous dans l’opposition

Dans les rangs de l’opposition, ce recours à l’emprunt fait réagir. « Pourquoi n’avoir pas profité des taux bas prévalant jusqu’en 2022 ? », interroge Agnès Furon, élue de Bayeux Demain, qui regrette par ailleurs que les élus de sa liste n’aient « pas été associés aux arbitrages du plan pluriannuel d’investissement (PPI) ». Les élus de Bayeux Demain demandent de revoir les priorités et les réponses aux besoins des habitants.

Nous aurions souhaité que l’urgence clmatique et l’objectif européen de réduction de 55 % des gaz à effet de serre d’ici à 2030 comme le prévoit l’accord de Paris, se traduise par davantage d’actions à l’échelle municipale. Les orientations budgétaires et le PPI pour 2024 répondent-ils à cette priorité majeure de l’urgence climatique ? Et répondent-ils aux besoins des habitants ? Cela ne nous semble pas être le cas.

Les élus de Bayeux Demain

En termes d’investissements, et en tenant compte de ces priorités, les élus écologistes de Bayeux Demain ont formulé quelques propositions pour les années à venir. « Davantage de logements accessibles en location ou propriété pour les classes moyennes et populaires en pensant construction écologique et habitats partagés entre générations. Prévoir un grand plan d’isolement des bâtiments municipaux et un abandon progressif des chauffages les plus émetteurs de gaz à effet de serre au profit de projets axés sur les énergies renouvelables. Réaménager la ville pour les piétons et vélos, ce qui augmenterait la qualité de l’air et réduirait les nuisances sonores. Proposer des véhicules électriques partagés. Une alimentation saine et de proximité avec, notamment, un marché permanent de producteurs et un jardin en permaculture plus ambitieux en régie municipale pour répondre au programme gouvernemental Mieux manger pour tous. Développer les maisons médicales pour attirer les professionnels de santé… »

Le Centre des correspondants de guerre dans le viseur

Dans son intervention, Agnès Furon a par ailleurs taclé le projet de Centre des correspondants de guerre qui pourrait voir le jour dans l’ancien poste de police municipale, place de la Liberté.

« Le budget 2024 est essentiellement tourné vers le tourisme avec un nouveau musée dit des Correspondants de guerre. 15,2 millions sur les 3 ans à venir, dont 100 000 € d’études pour 2024, puis 7,2 millions en 2025 puis 7,8 millions en 2026 en espérant des subventions hypothétiques à ce stade. C’est un projet disproportionné par rapport aux autres besoins pour la ville. Et que va apporter ce musée – qui sera de plus sans doute déficitaire – par rapport au succès du Prix Bayeux alors que nous avons à financer le très gros projet de la Tapisserie ? »

« Je ne peux pas partager votre avis »

Patrick Gomont a apporté des réponses aux points soulevés par les élus de Bayeux Demain. « Je ne peux pas partager votre avis sur un investissement disproportionné qui correspond au Centre des correspondants de guerre », a lancé le maire au sujet du Centre des correspondants de guerre, « projet qui serait financé à plus de 90 % par des fonds européens  et des participations Etat, Région, Département, et qui donnerait un usage à ce bâtiment dont personne ne veut et qui pose des problèmes au niveau des fondations. Il faut donc s’en emparer. Mais rien n’est encore lancé. Si les études montrent qu’il y a un dépassement en termes d’investissement, on ira pas. Il faut trouver les 10 % restants et nous avons un PPI et un programme ambitieux auxquels il faut répondre par ailleurs. D’autant que la crise est passée par là et a un impact sur nos investissements à réaliser. » 

Sur la question des investissements durables, le maire a avancé que le bilan de l’action municipale en matière d’environnement est « plus que satisfaisant », comme en témoigne selon lui le rapport sur la transition écologique présenté par son premier adjoint, Arnaud Tanquerel, lors de la séance. « Je voudrais rappeler qu’il n’y a pas d’obligation pour la Ville de Bayeux de présenter un tel rapport. Nous le faisons parce que nous sommes fiers des investissements et des projets qui sont réalisés. Après, il ne faut pas mélanger Bayeux et Bayeux Intercom. L’alimentation, par exemple, concerne les cantines et donc Bayeux Intercom et nous sommes l’un des rares territoires à posséder un jardin permacole, à avoir introduit les produits bio dans nos cantines et avoir travaillé sur des circuits courts. »

Sur la question du logement…

« Sur les logements accessibles aux classes moyennes, il ne vous a pas échappé que nous avons fait en sorte que 90 logements soient créés sur le site de l’ex-résidence Bellevue et à un niveau de loyer en deçà du prix du marché », illustrait Patrick Gomont avant de muscler le jeu.

Nous avons pris des mesures avec le numéro d’enregistrement et le changement d’usage pour limiter ce que j’appelle le Airbnb – chose que vous connaissez bien je crois – de façon à remettre sur le marché des logements pour la population. Avec Bayeux Intercom, une OPAH est menée par ailleurs, on accompagne les propriétaires et on fait en sorte d’avoir des logements inoccupés remis sur le marché avec des accompagnements financiers importants de la part des deux collectivités.

Patrick Gomont, maire de Bayeux

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Concernant les mobilités douces, Patrick Gomont a durci le ton. « Vous pouvez me faire un procès sur la piétonnisation, mais il faut tenir compte de tous les usages et tous les usagers. Nous allons certainement augmenter la durée de la piétonnisation rue Saint-Jean*, mais il faut avoir conscience que c’est un sujet qui ne fait pas plaisir à tout le monde. Il faut aussi l’entendre, et des activités peuvent être impactées par cela. Nous sommes lauréats d’un appel à projet national avec 17 autres communautés de communes, dont deux en Normandie, et la plus petite intercom en France à avoir été retenue sur la question du vélo. Donc pas de procès sur ce sujet-là ! » 

Évoquant pêle-mêle la désimperméabilisation des sols, « déjà fait sur le passage de l’usine à gaz et ce terrain qui fait quasiment 1 ha et il y a des projets sur les cours d’écoles mais les choses se font progressivement parce qu’il y a des écarts entre les coûts annoncés et la réalité qui nous font réfléchir face à nos moyens somme toute limités », l’achat de véhicules électriques « qui n’est pas forcément la bonne solution avec des batteries aux durées de vie courte et qu’on ne sait pas encore totalement recycler. Et passer au tout électrique, ça me fait sourire alors qu’on nous disait il y a un an que l’on n’avait pas capacité à fournir l’électricité à tous les Français et qu’il fallait s’attendre à des coupures. C’est assez incroyable on est obligé de réactiver des centrales nucléaires. » 

Le maire et président de Bayeux Intercom a conclu en rappelant le tour de vis donné sur le fonctionnement dès le début de la crise pour limiter son impact financier sur les deux collectivités.

« Malgré les incertitudes soulevées sur le plan international et sur le plan national, nous maintenons nos taux d’imposition et en termes d’orientations budgétaires, je veux souligner que nous sommes prudents sur chaque exercice budgétaire et que nous faisons des efforts tout au long de l’année, en faisant pression sur les services pour repartir à chaque exercice budgétaire avec une CAF supérieure. Cette CAF permet d’investir pour les besoins des habitants et de limiter el recours à l’emprunt, donc d’avoir un endettement raisonnable. C’est important puisque cela laisse des possibilités pour les années à venir. »

*Piétonnisation de la rue Saint-Jean. Du 1er avril au 31 octobre, de 10 h 30 à 4 h 45, les piétons pourront ainsi s’approprier la rue Saint-Jean en toute sérénité. La borne sera baissée de 4 h 45 à 10 h 30 pour permettre les livraisons.

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