Le vin breton veut prendre de la bouteille... |
Alors que de nouveaux vignobles fleurissent un peu partout en Bretagne, des vignerons du Pays nantais portent la demande d’une IGP à l’échelle des cinq départements. Mais, pour certains professionnels tout juste installés ailleurs dans la péninsule, il est encore trop tôt… Le magazine « Bretons » les a rencontrés.
Un Salon des vins bretons à Saint-Nazaire, un vin du Pays malouin distingué comme Découverte de l’année… Depuis la libéralisation des droits de plantation en 2016, la vigne fait son grand retour un peu partout en Bretagne.
De quoi attirer l’attention des vignerons du Pays nantais, qui ont créé le Syndicat des vignerons de Bretagne (SVB) le 24 février dernier. Cette structure, qui rassemblait début mars une quinzaine de professionnels, essentiellement en Loire-Atlantique, compte désormais porter la demande d’une indication géographique protégée (IGP) « Bretagne ».
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Des vins frais et légers
« On a toujours identifié nos vins à la Bretagne, et on ne se reconnaissait pas dans l’IGP Val de Loire », argumente Maxime Chéneau, président du tout jeune syndicat. Vigneron à Mouzillon, en Loire-Atlantique, il voit un grand intérêt dans une telle identification, pour la commercialisation en Bretagne et à l’export : « Avec le découpage régional actuel, les vins nantais ne sont plus identifiés comme bretons, et les Bretons en ont moins acheté. On a besoin de reconquérir ce marché ».
Maxime Chéneau estime de plus que l’on peut déjà imaginer un profil de « vin breton » à l’échelle de la Bretagne historique : « On se doute que ce seront des vins légers, avec une certaine fraîcheur. Et c’est le même type de sols, acides ».
« Une question de patience »
Mais, pour certains de ses voisins des quatre autres départements, obtenir cette IGP est loin d’être la priorité. Pas pour des raisons politiques ou historiques, tient à préciser Loïc Fourure, président de l’Association des vignerons bretons (AVB), qui regroupe 33 professionnels de Bretagne administrative. Mais en raison « d’un manque d’unité ». « De notre côté, les projets sont trop jeunes et on n’a pas la légitimité pour porter cette demande », résume le vigneron installé à Theix, dans le golfe du Morbihan.
Il faut dire qu’en dehors de la Loire-Atlantique, seuls deux domaines ont pu commercialiser leurs premières bouteilles en 2023. Pour Loïc Fourure, « il faut déjà sortir des produits de qualité, régulièrement. La vigne, c’est une question de patience ». Le caractère « vaste » et « disparate » du territoire breton fait aussi douter l’AVB, pour qui « il faut d’abord prendre le temps de réfléchir à des notions d’identité propre, de terroir, sur l’aspect cultural, la dominance en termes de cépage… »
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« Déjà dix ans que j’attends ! »
Côté SVB, pas question d’attendre pour lancer la demande d’IGP. Elle devrait aboutir d’ici cinq à dix ans, selon Maxime Chéneau, pour qui « il faut bien démarrer un jour. Cela fait déjà dix ans que j’attends ! »
Les adhérents de l’AVB, eux, n’ont pas encore tranché et disent « ne se fermer à rien ». « On sera intransigeants sur la notion de durabilité environnementale », indique Loïc Fourure, qui veut pour le moment prendre le temps de savourer ces premiers pas : « Il y a encore deux ans, on n’existait pas, et aujourd’hui on est invités à la Cité du vin à Bordeaux. Ça donne des ailes, c’est sûr ! »