Charles de Foucauld - Définition

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La spiritualité de Charles de Foucauld

Lectures et sources d'inspiration

Charles de Foucauld aime lire quelques livres de son époque ; un article paru dans Excelsior, « Comment aimer Dieu? » a profondément inspiré sa vie intérieure. Il tient absolument à rencontrer son auteur, Antoine Crozier, un prêtre stigmatisé, qui devint son ami et l'influença dans la création d'une confrérie du Sacré-Cœur. Il est surtout imprégné de la lecture des très grands auteurs mystiques comme Thérèse d'Avila et Jean de la Croix ; Jean Chrysostome est l'objet de ses méditations quotidiennes. On retrouve aussi quelques livres d'importance mineure, comme Jésus Adolescent, livre du chanoine Caron, un de ses amis, ou Les Quatre Évangiles en un seul, du chanoine Weber. Dès sa conversion, il a lu les Pères du Désert. Un court texte, le Modèle unique, résume la spiritualité de Charles de Foucauld : l'Évangile, le Sacré-Cœur et la Sainte-Face de Jésus. Quand Charles de Foucauld revient en France en avril 1909, il passe une nuit de prière, avec Louis Massignon, dans la Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre. L'adoration du Saint-Sacrement et en particulier l'adoration nocturne est un fondement de sa spiritualité. Il lisait et méditait la Bible en arabe, éditée par les Pères de Beyrouth.

L'imitation de la vie de Nazareth

La conversion de Charles de Foucauld est marquée par les mots de l'Abbé Henri Huvelin « Jésus a tellement pris la dernière place que jamais personne n'a pu lui ravir ». Charles veut alors imiter Jésus. Cette imitation (imitatio Christi en latin liturgique) le conduit à vouloir l'imiter dans sa vie cachée, qui correspond à la période de la vie de Jésus de Nazareth qui n'est pas mentionné dans le Nouveau Testament, avant sa vie publique. Charles perçoit dans cette vie cachée une profonde humilité et abnégation de Jésus.

À travers l'humilité, Charles recherche la dernière place. Il ne veut pas se différencier des personnes avec qui il vit ; il mène une vie similaire à elles, travaillant pour gagner sa vie, refusant de manifester sa supériorité du fait de son statut de prêtre. Il écrit à son ami Gabriel Tourdes « vivant du travail de mes mains, inconnu de tous et pauvre et jouissant profondément de l'obscurité, du silence, de la pauvreté, de l'imitation de Jésus. L'imitation est inséparable de l'amour. Quiconque aime veut imiter, c'est le secret de ma vie ».

Cette imitation de la vie cachée de Jésus conduit Charles à développer toute une spiritualité personnelle, ainsi qu'une vision personnelle de l'apostolat. Alors que les missionnaires cherchaient traditionnellement à prêcher, à l'image de la vie publique de Jésus, Charles au contraire veut développer un apostolat dans le silence et la discrétion. Il perçoit sa vocation comme celle de vivre la vie de Nazareth, il écrit en 1905 « Mes dernières retraites de diaconat et de sacerdoce m'ont montré que cette vie de Nazareth, ma vocation, il fallait la mener, non dans la Terre Sainte tant aimée, mais parmi les âmes les plus malades, les brebis les plus délaissées ». Il acquiert la conviction que cette vie de Nazareth peut se vivre partout, il cherche ainsi à « Prendre pour seul exemple la vie de Jésus à Nazareth. Qu'il daigne me convertir. Me rendre tel qu'il me veut. L'aimer, lui obéir, l'imiter ». Charles approfondit alors un nouvel apostolat par les relations quotidiennes avec le milieu social, à l'image de Priscilla et Aquila dans les Actes des apôtres.

L'eucharistie

adoration eucharistique

La spiritualité de Charles de Foucauld donne une très grande importance à l'eucharistie, dans laquelle il reconnaît la présence de Jésus caché dans l'hostie. L'imitation de la vie cachée de Jésus et l'eucharistie participent de la même logique pour Charles de Foucauld. Il place l'adoration eucharistique comme « l'œuvre caractéristique, spéciale » de l'Union des laïcs dont il a écrit les statuts. Pendant toute sa vie, il passe ainsi des heures à adorer le Saint-Sacrement et considère cette prière comme prioritaire sur toute autre activité. Il veut apporter l'eucharistie dans les lieux où celle-ci est la moins présente, c'est-à-dire dans le Sahara. Dans ses méditations, il affirme que c'est cette adoration de l'eucharistie qui le conduit à vouloir aller vers les autres. Il écrit lorsqu'il est à Nazareth : « L'âme voit qu'elle jouit, qu'elle jubile, qu'elle reçoit beaucoup. Mais elle ne rend rien, elle reste inutile. Et plus je jouissais, plus je désirais travailler ».

Après avoir été ordonné prêtre, Charles continue à accorder une importance primordiale à l'eucharistie. Dans sa solitude en plein Sahara, il écrit à Marie de Bondy qu'il est avec son « meilleur ami » et que « rien ne lui manque ». Il affirme « Quand on voit la sainte hostie, que dire sinon que la nuit de cette vie a perdu ses ténèbres?... À côté d'elle, tous les rois de la terre sont comme s'ils n'étaient pas, de purs néants ».

Charles de Foucauld développe une conception originale de l'eucharistie, qui constitue une nouveauté théologique. Il croit que la présence eucharistique rayonne, donne des grâces et permet, par sa simple présence, la sanctification de personnes qui vivent à proximité.

Cet amour de l'eucharistie se déploie au fil du temps : il écrit en 1907, à propos de sa dévotion à l'eucharistie : « Autrefois, j'étais porté à voir d'une part l'infini, le saint sacrifice, d'autre part le fini, tout ce qui n'est pas lui, et à toujours tout sacrifier à la célébration d'une sainte messe... Mais ce raisonnement doit pécher par quelque chose, puisque, depuis les apôtres, les plus grands saints ont sacrifié en certaines occasions la possibilité de célébrer à des travaux de charité spirituelle, voyages ou autres ». Il choisit de partir à Tamanrasset afin de vivre un plus grand amour du prochain, quitte à ne plus pouvoir célébrer la messe, ni adorer l'eucharistie, malgré la vraie souffrance que cette séparation entraîne. Il cherche alors à faire rayonner, dans la charité envers les autres, l'amour qu'il porte à l'eucharistie. Il veut voir « Jésus en tous les humains ». Il écrit quatre mois avant sa mort à Louis Massignon : « Il n'y a pas, je crois, de parole de l'Évangile, qui ait fait sur moi une impression et transformé davantage ma vie que celle-ci : « Tout ce que vous faites à l'un de ces petits c'est à Moi que vous le faites. » Si l'on songe que ces paroles sont celles de la Vérité incréée, celles de la bouche qui a dit :« Ceci est mon corps, ceci est mon sang », avec quelle force on est porté à chercher et aimer Jésus dans ces petits. »

Un apostolat novateur

Charles de Foucauld découvre très vite la limite de l'évangélisation classique sur les populations touarègues. Celles-ci sont de nature assez indépendante, ce qui conduit Charles à refuser d'employer la prédication comme moyen principal des conversions. Son désir d'imiter la vie cachée de Jésus le conduit à innover de façon radicale dans l'apostolat, qui n'est dès lors plus conçu comme une stratégie, mais consiste alors à essayer d'être, dans sa vie quotidienne, un exemple de vie chrétienne. Ceci se traduit par une présence chrétienne auprès des populations non-chrétiennes en menant une vie semblable à celles-ci, tout en cherchant à imiter la vie de Jésus.

Progressivement, Charles considère qu'il ne faut pas chercher à tout prix des conversions, encore moins des conversions forcées. Il faut aimer son prochain, même si sa religion est différente, le respecter, et essayer de le comprendre. L'étude de la langue touarègue par Charles de Foucauld entre pleinement dans cette démarche d'acceptation, de compréhension et d'aide aux populations pour lesquelles on ne fait « pour ainsi dire rien ».

Cette connaissance de l'autre doit conduire, pour Charles de Foucauld, à rechercher son bien-être matériel, par l'éducation et le progrès technique, mais aussi à développer l'intelligence de l'autre et sa dignité, et cela sans rien attendre en retour, afin de faire des populations indigènes « nos égaux ». Il écrit à Marie de Bondy : « Il faudrait instruire d'abord, convertir ensuite. On ne peut pas en faire d'abord des chrétiens et civiliser ensuite ». Cette démarche conduit ainsi à se faire aimer, pour mieux amener à la religion en la faisant aimer et apprécier par le comportement quotidien, qui est celui de l'imitation de Jésus. Comme il l'écrit à Mgr Guérin : « Prêcher Jésus aux Touaregs. Je ne crois pas que Jésus le veuille ni de moi ni de personne. Ce serait un moyen de retarder, non d'avancer leur conversion. Cela les mettrait en défiance, les éloignerait, loin de les rapprocher. Il faut y aller prudemment, doucement, les connaître, nous faire d'eux des amis ».

Charles refuse pendant longtemps le terme de missionnaire : « Ma vie n’est point ici celle d’un missionnaire, mais celle d’un ermite », écrivait-il à Henry de Castries le 28 octobre 1905. Le 2 juillet 1907, il écrivait encore à Mgr Guérin, en soulignant les mots : « Je suis moine, non missionnaire, fait pour le silence, non pour la parole ». Ce refus d'être appelé missionnaire le conduit à vouloir développer un apostolat de la présence silencieuse, « incognito ». Dans sa correspondance, Charles est convaincu que cette présence est essentielle afin de « défricher », première étape à la conversion. Pour Charles de Foucauld, le premier apostolat que doivent poursuivre des missionnaires isolés est celui qui passe par « de la bonté, de l'amour et de la prudence », même si cette étape peut prendre des « siècles » avant la conversion.

L'abandon à Dieu

Charles de Foucauld développe une véritable spiritualité autour de l'abandon à Dieu, symbolisée par la Prière d'abandon issue de ses méditations.

La logique de l'abandon à Dieu l'amène à vouloir se donner à Dieu en lui offrant sa liberté. Cela se traduit par l'obéissance à ses supérieurs, dans lesquels il voit la main de Dieu. Cette conception radicale de l'obéissance l'amène à considérer que « tous les actes deviennent des purs actes d'amour ». L'obéissance aux supérieurs est ainsi un moyen de s'abandonner à Dieu et de faire sa volonté ; c'est aussi un moyen de vivre l'imitation de Jésus.

Cet abandon à Dieu est pour Charles un cheminement qui unit la miséricorde de Dieu, son amour et la souffrance. La dévotion au Sacré-Cœur, qu'il prend comme ornement sur son habit de religieux, symbolise l'amour de Dieu, avec le cœur, et la souffrance par la présence de la Croix. Ce don à Dieu nécessite une volonté, un combat : pour Charles, « il n'y a pas d'oblation sans immolation ».

Cet abandon de sa liberté, et la recherche de l'oubli, par le choix de la dernière place et les mortifications, s'approfondit à la fin de 1908. Il n'a alors encore entraîné aucune conversion. De plus, pendant cette année, il ne peut célébrer la messe. Il doit même sa vie au secours matériel apporté par des pauvres. Charles abandonne alors tous ses désirs de fondation, de conversions, et s'offre comme un pauvre à Dieu. Cet abandon complet de lui-même et l'offrande de sa vie à Dieu est pour lui le seul moyen de porter du fruit, à l'image du « grain de blé » qui tombe en terre dans l'Évangile, et qu'il médite à de nombreuses reprises.

Vision de l'islam

Le regard porté par Charles de Foucauld sur l'islam évolue au fil du temps. L'exploration du Maroc et la ferveur qu'il observe chez les populations musulmanes et juives joue sans doute un rôle essentiel dans le début de sa conversion. Il est un temps attiré par le Coran, avant de définitivement s'en écarter. Toute sa vie est toutefois marquée par la proximité des populations musulmanes, tant à la trappe en Syrie qu'à Nazareth et enfin en Algérie.

L'approche qu'il développe est non celle de la conversion immédiate, mais celle de la découverte et de l'apprivoisement des autres en qui il voit des frères. Charles cherche de même à prêcher ce qu'il appelle la « religion naturelle » : cette conception tend à amener à l'« amour de Dieu » et à l'« acte d'amour parfait ». Elle le conduit à développer ce qu'il appelle le « chapelet de l'amour », qui peut être récité tant par les musulmans que les chrétiens. Il pense que les musulmans ne peuvent pas comprendre le christianisme sans être ouverts à une éducation « égale à la nôtre », afin qu'ils puissent juger par eux-mêmes leur religion. En attendant, il est persuadé qu'ils accèderont au Paradis, même non baptisés, s'ils le méritent par leur vie. Cette idée est reprise par l'Église catholique, lors du Concile Vatican II, dans la déclaration Dignitatis Humanae.

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