Alors que le phénomène Claude François était attendu sur le plateau de son fidèle ami Michel Drucker, le chanteur aimé de tous ne viendra pas… Et pour cause, il aura livré son dernier pas, dans sa salle de bain ce 11 mars 1978. Brutalement, en une seconde, Claude François n’est plus. L’histoire de son décès, unique en son genre, marquera à jamais le monde de la musique comme celle de Molière pour le théâtre. Et ce malgré un nombre incalculable de théories faites à ce sujet. Claude François est mort, un pied dans sa baignoire alors qu’il tentait, en tant que grand maniaque, de remettre en place une applique mal fixée sur son mur. Un geste qui ne lui pardonnera pas. 

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De l’Égypte à l’hexagone, un passage de l’ombre à la lumière  

Claude François est né en Égypte dans une famille très aisée. Un style de vie qui bascule totalement alors que le Canal de Suez que son père gérait est nationalisé. Les François sont alors contraints de venir vivre en France. Ils s’installent à Monte-Carlo alors que Claude François a l’âge d’aller au lycée. Là-bas, ses parents ainsi que sa sœur Marie-José connaîtront une vie bien plus modeste. 

Passionné de musique depuis son enfance, Claude François rejoindra rapidement, en 1958, le grand orchestre du Sporting Club de Monte-Carlo. Il intégrera ensuite l’académie nationale de musique pour y travailler sa voix et son talent de musicien. Un choix de carrière non sans conséquence pour le jeune homme à la chevelure blonde. En effet, son père décide de couper les ponts avec son fils ayant souhaité qu’il devienne comptable. Sa mère, elle, arrondira toujours les angles et le soutiendra dans cette aventure artistique.  

Claude François entre rapidement dans la vie active, gagne sa vie et trouve sa première moitié. En effet, c’est à l’âge de 21 ans qu’il épouse Janet Wollacott, une danseuse qu’il avait rencontrée lors d’un spectacle. Deux ans plus tard, sous le pseudonyme Koko, Claude François sort son premier single : « Le Nabout Twist ». Un succès en Égypte qui peine à se faire valoir en France. En parallèle de ce succès, côté amour, sa femme intègre l’Opéra de Paris où elle rencontre Gilbert Bécaud pour qui elle décide de quitter Cloclo. 

C’est en 1962 que la carrière de Claude François décolle. Sans jamais s’essouffler par la suite, c’est le titre qui raisonne encore dans toutes les têtes aujourd’hui « Belle ! Belle ! Belle ! » qui signe son premier succès en France. Le chanteur enchaîne alors les tournées, les scènes comme l’Olympia où il fait la première partie de Dalida. Disque d’or, plus rien n’arrête Claude. Un succès qui lui permettra de retrouver l’aisance connue à son enfance. Avec son argent, il investit dans un appartement parisien au 46 boulevard Exelmans mais aussi dans le Moulin de Dannemois dans l’Essonne en résidence secondaire où il installera sa mère et sa sœur. Tout au long de sa courte carrière, Claude François enchaînera les succès avec « Comme d’habitude », « Chanson populaire », « Cette année-là », « Le téléphone pleure », « le lundi au soleil », « Belinda » ou encore « Magnolias For ever ». 

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Un chanteur mais pas que…  

Claude François est un chanteur mais également un danseur. C’est notamment ce qui fera la différence dans ses spectacles : l’arrivée des Claudettes en 1966. Ces jeunes femmes seront ses danseuses attitrées et l’aideront à marquer un tournant dans sa carrière par le biais de leurs chorégraphies et de leurs costumes. Dani Borg s’était confié auprès de France Dimanche : « C'était tellement magique ce que nous vivions avec lui. Je suis déjà montée sur scène avec d'autres chanteurs que je ne citerai pas, mais ce n'était pas du tout pareil. Je n'ai jamais plus eu l'occasion de ressentir quelque chose d'aussi fort qu'avec Claude François. J'en ai encore la chair de poule rien que d'y penser ! J’ai mis beaucoup de temps à réaliser que je n'allais plus jamais le revoir ». Claude François portera aussi la casquette de producteur au côté de son ami Michel Drucker avec qui il présentera l’émission « Avec le cœur ».  

Véritable entrepreneur, il poursuivra la construction de son empire avec l’acquisition de deux magazines. Si le très connu « Podium » devient le sien pour un million de francs, ce magazine connaîtra un grand succès auprès des jeunes, tiré à plus de 400 000 exemplaires chaque trimestre. Il acquiert également « Absolu », en 1974, une revue de charme qu’il gérera et dont il sera le photographe sous le nom de François Dumoulin pour ne pas entacher son image. Il sera contraint de revendre ses parts deux ans plus tard. 

Claude François sera aussi à la tête d’une agence de mannequins : Girls Model qu’il créé en 1972. C’est là-bas qu’il rencontrera la dernière femme qui partagera sa vie : Kathalyn Jones. En 1976, Claude François commercialisera également un parfum, nommé « Eau Noire ». C’est cette même année que la carrière anglo-saxonne du chanteur débute. 

Un, deux ou trois héritiers ?  

Avant de rencontrer Kathalyn Jones, Claude François connaîtra l’amour aux côtés d’Isabelle Forest, rencontrée en 1968. Mère de ses enfants sans jamais devenir l’épouse du chanteur, elle donnera naissance à Claude François Junior le 8 juillet 1968 surnommé « Coco » puis à Marc François le 15 novembre 1969. Un second enfant qui sera caché à la presse durant les six premières années de sa vie. En effet, cette seconde paternité aurait pu nuire à l’image de Claude François le rendant plus vieux et inaccessible aux yeux de ses fans de la gent féminine. Sofia Kiukkonen, sa compagne de l'époque, révélait en 2008 avoir eu vent de l’existence de Marc trois ans après. Un choix qu’elle expliquait en dévoilant : « Claude François voulait conserver son image de séducteur, d'homme libre pour ses fans. Pour sa carrière. La seule chose qui comptait à ses yeux. »  

Cependant, c’est ce 11 mars 1978 à 14h45 que le destin de Claude François bascule. Alors qu’il avait rendez-vous avec Michel Drucker pour le tournage de l’émission « Le rendez-vous du dimanche », le chanteur connu pour ses retards, ne viendra pas. Et pour cause, il décède dans sa baignoire d’un œdème pulmonaire collé au mur de sa salle de bain électrocuté par le cuivre de son applique mural qu’il tentait de replacer. Il est découvert par Kathalyn Jones, et elle prend la décision de le décoller du mur. Ce sont ses sabots en bois qui la sauveront de l’électrocution. Malgré l’intervention des médecins sur place qui tenteront de le réanimer, il est trop tard… Claude François est décédé. Ce jour du 11 mars 1978, les journaux télévisés se transformeront en éditions spéciales. Dans son appartement parisien, les Claudettes et amis de la star se rendent à son chevet. Claude François sera embaumé selon les traditions égyptiennes dans un costume bleu nuit avant d’être enterré dans le caveau familial au moulin de Dannemois. Le jour de ses obsèques, le 15 mars 1978, marque aussi la sortie du 45 tours d’un de ses plus grands succès : Alexandrie Alexandra. 

Le mystère autour du testament de Claude François plane encore quarante-six ans après son décès. Dans son ouvrage « Les Héritiers » Bernard Pascuito affirme que le testament de Cloclo avait été rédigé auprès d’un notaire « Maître Danet » trois ans avant sa mort. Selon sa théorie, le testament qui devait être conservé dans le coffre du chanteur, aux côtés de diamants récemment achetés, aurait disparu. La réalité, aujourd’hui, est que l’existence d’aucun testament n’a jamais été officialisée. Une absence de dernières volontés écrites qui désigne systématiquement ses deux enfants comme seuls héritiers du chanteur.  

Une succession qui n’a cependant pas concerné le troisième enfant de Claude François. En effet, le chanteur avait une fille cachée. L’existence d’une cadette de la famille née sous X qui est révélée par le magazine « Voici » en 1988. Le lien de parentalité entre Claude François et Julie Bocquet sera rendu officiel en 2018 par le test ADN sur un mégot de l’artiste réalisé en 2012. Les deux fils de Claude François n’ont d’ailleurs jamais souhaité la rencontrer. Fruit d’une courte idylle entre Fabienne et Claude, Julie Bosquet se livrait auprès de « Paris Match » en révélant sa surprise lorsqu’elle apprit ses origines : « J’étais sous le choc. En principe, les adoptants ne connaissent pas le nom des parents biologiques. Dans mon cas, et même si le secret était bien gardé, ils savaient que j’étais le fruit d’une courte idylle entre Claude François, cette immense star, et Fabienne, l’inconnue de Flandre. J’ai pris connaissance de leurs identités assez rapidement. » Avant d’avouer avoir tenté de contacter ses demi-frères par une lettre à laquelle elle n’aura jamais de réponse : « Cher Marc, cher Claude, Je ne sais pas si vous allez pouvoir lire cette lettre. Je ne sais même pas si vous savez qui je suis. Mais j’espère de tout cœur que Fabien (Fabien Lecoeuvre N.D.L.R) vous a expliqué. Puisqu’on a un lien, je veux vous dire que j’aimerais faire partie (un peu seulement) de votre vie. Et pouvoir partager des moments vécus ou futurs. […] Votre petite sœur. » 

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Un héritage à prendre ou à laisser ? 

Pour Claude Junior et Marc, la question d’accepter la succession de Claude François s’est posée. En effet, même si le chanteur a laissé un patrimoine culturel vivant et fleurissant encore actuellement, le meneur des Claudettes avait aussi derrière lui de nombreuses dettes dues à son train de vie intense et sans privation. Claude Junior révélait lors d’une interview au « Parisien » : « Mon père avait laissé près de 10 millions de francs de dettes, ce qui était une somme énorme en 1978. Il faut savoir que des vedettes de la chanson comme mon père ou Johnny avaient un train de vie de star américaine connue dans le monde entier alors qu'ils n'ont du succès que dans leur pays. » 

À la mort de Claude François c’est Alain-Dominique Perrin, un homme d’affaires, PDG de Cartier et ami de Claude qui est nommé exécuteur testamentaire. C’est cet homme qui s’est occupé des affaires financières des enfants encore mineurs lors du tragique accident. Très rapidement, le Moulin de Dannemois et le magazine Podium sont vendus par la famille du chanteur afin de rembourser ses dettes. Claude Junior expliquait auprès du « Parisien » que la résidence comprenant « un jardin, une piscine, 100 m2 à chauffer, deux gardiens, des frais d'entretien abyssaux » n’a pas permis à la famille de conserver la demeure. Le Moulin a aujourd’hui été transformé en un musée sur la vie de l’artiste et reste visitable.  

Au niveau de l’héritage culturel et musical, ce sont les deux héritiers de Claude François qui ont bénéficié de ce trésor qui génère « un chiffre d'affaires à six zéros, plusieurs millions par an quand on compte tout : les ventes de disques, les droits d'exploitation, d'utilisation dans des films des publicités, les reprises » confie Claude Junior au « Parisien » sans oublier le succès mondial du titre « My Way ». Des droits que ses deux fils ont décidé de vendre : « En tant qu'héritiers, mon frère et moi avions à l'époque les droits d'auteur et d'interprète ainsi que les droits d'édition sur les chansons que nous avons finalement revendus », explique Claude Junior auprès du « Parisien ». Une décision contrainte en raison du climat tendu autour des décisions : « Les relations avec les héritiers de certains coauteurs des chansons de mon père devenaient explosives. Nous voulions donner l'autorisation d'utilisation des chansons et eux refusaient ou faisaient traîner. Je le regrette un peu aujourd'hui car c'était un trésor mais ça devenait ingérable. » Aujourd’hui, Claude Junior détient, à lui tout seul, grâce à la procuration faite par Marc, le droit moral sur les chansons de son père : « Je donne l'autorisation d'utiliser son répertoire, son image, son histoire dans un film, une publicité, un spectacle. L'idée est de créer des événements ou de l'actualité, mais pas trop. S'il y a des choses tous les ans, vous êtes sûrs de planter un projet sur deux. Je cautionne un projet tous les cinq ans. » expliquait-il au « Parisien ».  

Claude François c’est plus de 450 titres enregistrés en seize ans de carrière, 185 titres adaptés en chansons étrangères, 363 chansons commercialisées et selon ses enfants 61 millions de disques vendus dont 6 millions depuis sa mort. Les musiques de Claude François raisonnent encore aujourd’hui comme des hymnes à travers le monde. Cloclo était un passionné qui vivait avec énergie et entrain. Un parcours qui sera à redécouvrir cette année dans un documentaire « My Way » sur Canal+.