L'ONU appelle à un cessez-le-feu à Gaza avec le feu vert exceptionnel des Etats-Unis
Israël se retrouve isolé après le vote lundi d'une résolution du Conseil de sécurité. Le gouvernement Netanyahou fustige l'abstention américaine, qui matérialise la distance croissante entre les deux pays.
Par Yves Bourdillon
Un moment sans doute historique et un revers diplomatique pour Israël, isolé. Le Conseil de sécurité de l'ONU a voté ce lundi une résolution présentée par des membres non permanents appelant à un « cessez-le-feu immédiat » dans la bande de Gaza.
Le coup de tonnerre est venu des Etats-Unis qui se sont simplement abstenus, alors qu'ils avaient mis leur veto par trois fois à des résolutions appelant à un cessez-le-feu, depuis l'attaque menée par le groupe terroriste du Hamas , le 7 octobre, puisqu'eux-mêmes soutenaient une simple trêve.
C'est le signe d'une dégradation spectaculaire des relations entre la Maison-Blanche et le gouvernement dirigé par Benyamin Netanyahou, en raison du manque de précautions que prendrait ce dernier pour minimiser les victimes collatérales à Gaza. Le gouvernement israélien a estimé « que l'abstention nuit aux efforts de guerre et à la libération des otages », tandis que la Maison-Blanche assurait que son « abstention n'est pas un changement de cap ».
La résolution, fruit de négociations tout le week-end entre ses auteurs et les Etats-Unis, a été adoptée sous les applaudissements par quatorze voix pour (dont la France, la Chine et la Russie) et une abstention. Elle « exige un cessez-le-feu immédiat devant mener à un cessez-le-feu durable » et réclame la « levée de tous les obstacles à l'aide humanitaire ». La nouvelle résolution condamne d'autre part « tous les actes terroristes », mais sans mentionner le Hamas, omission qui aurait pu constituer une ligne rouge pour Washington. Un cessez-le-feu peut commencer « immédiatement » dès la libération d'un premier otage, a commenté l'ambassadrice des Etats-Unis à l'ONU.
Des alliés de plus en plus critiques
Certes, la résolution restera lettre morte puisqu'elle appelle, ce qui est la moindre des choses, à la libération de tous les otages, et que le Hamas n'a aucune intention de se débarrasser de ces boucliers humains sans de solides garanties sur une non-reprise des hostilités par l'armée israélienne et des libérations de centaines de Palestiniens emprisonnés en Israël. Le Hamas a toutefois affirmé qu'il était prêt à échanger un nombre non précisé d'otages contre des prisonniers palestiniens.
Mais le simple fait qu'elle soit votée illustre l'isolement peut-être sans précédent d'Israël, ce qui peut paraître paradoxal, voire choquant, puisque ce dernier a vu des terroristes tuer 1.200 civils, avec crimes de guerre. Mais la conduite des opérations, avec parfois des bombes de 250 kg sur des immeubles abritant des combattants du Hamas, là où certains experts militaires estiment que 50 kg seraient suffisants, a rebuté les alliés occidentaux de Jérusalem. Le Hamas affirme que les raids israéliens ont déjà tué 32.000 civils, bilan invérifiable.
Ces critiques sur la manière d'opérer proviennent de plus en plus des Etats-Unis, pourtant soutien inconditionnel jusqu'à très récemment. Autre point de contentieux entre la Maison-Blanche, critiquée par l'aile gauche démocrate pour la fourniture de munitions à Israël, et le gouvernement Netanyahou : ce dernier est déterminé à mener une offensive dans la ville de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, bien que s'y entassent 1,5 million de civils. Rafah constitue le dernier bastion du Hamas.
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Prélude à cette abstention américaine de ce lundi, qui suscitera certainement la colère de nombre d'Israéliens, les Etats-Unis avaient proposé un cessez-le-feu, vendredi, mais selon une formulation jugée trop ambiguë par Pékin et Moscou, qui y avaient mis leur veto. Sans doute afin de priver Joe Biden d'une victoire diplomatique.
Le gouvernement israélien a répondu que l'abstention américaine nuisait à ses efforts de guerre et à la libération des otages à Gaza car cela relâcherait la pression sur le Hamas, le Premier ministre israélien décidant dans la foulée de ne pas envoyer la délégation israélienne attendue à Washington cette semaine pour des concertations. « Il s'agit d'un net recul par rapport à la position constante des Etats-Unis au Conseil de sécurité depuis le début de la guerre le 7 octobre », a commenté le bureau de M. Netanyahou.
Yves Bourdillon