Violences entre Turcs et Kurdes de Belgique, les Loups gris accusés : “Des individus turcs ultranationalistes désorganisés”
Des émeutes entre Turcs et Kurdes ce dimanche dans le Limbourg. Une manifestation pro-kurdes qui dégénère le lendemain à Bruxelles. L’organisation qui accuse les Loups gris turcs. Qui sont-ils ? Leur menace sur le territoire belge est-elle jugée croissante ?
- Publié le 27-03-2024 à 06h40
La manifestation pro-kurde de ce lundi à Bruxelles a dégénéré, violences et déploiement de policiers à la clé. L’organisation voulait dénoncer l’attitude passive de l’Union européenne à l’égard de la Turquie et du “dictateur” Recep Tayyip Erdogan. Cette manifestation faisait suite aux émeutes qui ont eu lieu dimanche soir entre des membres de la communauté turque et des partisans du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) à Heusden-Zolder (province du Limbourg). Des partisans du Parti des Travailleurs du Kurdistan se seraient déplacés dans le quartier avec des drapeaux. Des membres de la communauté turque se seraient alors sentis provoqués et sont descendus en masse dans les rues.
Selon Arife Soysuren, organisatrice de la manifestation et membre du Mouvement des femmes kurdes (lié au mouvement Progressive International), les bagarres à Bruxelles ont eu lieu à la suite d’une attaque préméditée des Loups gris, officiellement connus sous le nom de “Foyers idéalistes”, un mouvement turc ultranationaliste et d’extrême-droite. L’organisatrice a dénoncé une attaque orchestrée par le “dictateur”, le président turc Recep Tayyip Erdogan, à l’égard des Kurdes limbourgeois.
Les Loups gris en Belgique : “Il ne s’agit pas en Belgique d’une organisation paramilitaire ou terroriste.”
Qui sont ces Loups gris ? Quelle menace présentent-ils en Belgique ?
Il y a quatre ans, ils faisaient déjà l’actualité. Selon certains médias, les Loups gris, organisation armée ultranationaliste turque reliée au Parti d’action nationaliste (MHP), ou des organisations connexes essayaient d’infiltrer la Belgique. À l’époque, leur présence de ce mouvement était déjà une certitude. Depuis la fin des années 70 même, “dans le sillage du mouvement ultranationaliste MHP et des centres culturels dont les activités sont coordonnées par la FTB, la Fédération turque de Belgique”, avaient décrit il y a quatre ans le ministre Koen Geens.
Selon lui, l’adhésion directe au MHP et à la FTB avait toutefois fortement diminué depuis 2000. “La FTB continue à exercer un certain contrôle et interdit les actions violentes susceptibles de nuire à son image de marque. Des actions violentes commises par des individus radicaux ne sont cependant jamais totalement à exclure. Même si des membres du MHP et de la FTB sont toujours considérés comme les Loups gris, il ne s’agit pas en Belgique d’une organisation paramilitaire ou terroriste.”
La Sûreté de l’État (VSSE) jugeait que la menace représentée par la FTB était minimale. “Quelques individus radicaux sont toutefois surveillés. Des centaines de participants fréquentent les activités des sections locales de la FTB, mais celle-ci compterait tout au plus une centaine de membres actifs. La VSSE ne dispose pas d’informations concernant une infiltration possible des cercles politiques belges. Les responsables politiques d’origine turque sont cependant issus de toutes les catégories de la population et appartiennent à des courants différents et certains d’entre eux sont donc partisans du MHP.” Par ailleurs, pour le ministre, aucun indice n’établissait de lien structurel entre le MHP et des activités criminelles, “ce qui n’exclut toutefois pas des relations éventuelles entre des membres à titre individuel et des milieux criminels. “
Contactée par nos soins, la Sûreté de l’État nous indique qu’aujourd’hui, l’analyse de la menace exercée par les Loups gris reste là même, qu’elle est toujours d’actualité. Les relations entre Kurdes et Turcs de Belgique sont envenimées depuis longtemps. Traduction : les violences à Heusden-Zolder puis à Bruxelles sont, à ce stade, insuffisantes pour évoquer une menace structurelle à la hausse. Évidemment, si des faits de ce genre devaient se répéter, le signal d’alerte deviendrait rouge.
”Oui nous savons que des membres du MHB et de la FTB sont considérés comme des Loups gris. Mais ce sont des individus, il n’y a pas d’organisation proprement dite”, nous explique Peter Gorlé, porte-parole de la VSSE.
Violences à Cheratte : un règlement de compte pour rétablir les choses après Heusden et Bruxelles ou le début d’une escalade de violences entre Turcs et Kurdes ?
Ce lundi, vers 22 heures, à Cheratte dans la commune de Visé, une soixantaine de personnes, venues sur place à bord d’une vingtaine de voitures, ont débarqué dans une rue habitée par de nombreuses personnes d’origine ou de nationalité turque. La plupart étaient encagoulées, ont sorti des battes de baseball pour fracasser des voitures stationnées. Elles ont aussi sorti des cocktails Molotov pour les jeter sur plusieurs façades avant de s’attaquer à un café qui fait également office de centre culturel turc. Sept personnes ont été blessées. ” Ils scandaient des slogans kurdes”, a expliqué à la DH un témoin de la scène.
Une enquête est encours pour savoir qui sont réellement les protagonistes de cette scène. Cela dit, tous les avis récoltés par la DH sont unanimes : l’attaque serait l’œuvre de personnes kurdes qui auraient organisé une expédition punitive pour se venger de faits commis ce week-end dans le Limbourg.
Un règlement de compte donnant-donnant pour simplement rétablir les choses après Heusden et Bruxelles ou le simple début d’une escalade de violences entre Turcs et Kurdes ?