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© Henry Nicholls/AFP

Proposition de loi visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile

Temps de lecture  7 minutes

La proposition de loi prévoit plusieurs mesures pour réduire la pollution engendrée par la mode jetable appelée aussi "fast fashion" : introduction d’une définition, sensibilisation des consommateurs, création d’un malus écologique et interdiction de la publicité.

Où en est-on ?

  1. Étape 1 validée

    Dépôt au parlement

    30 janvier 2024

  2. Étape 2 en cours

    Examen et adoption

    14 mars 2024

    1ère lecture

  3. Étape 3 à venir

    Promulgation

Qu'est-ce que la procédure législative ?

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Le 14 mars 2024, l'Assemblée nationale a adopté, avec modifications et à l'unanimité, en première lecture la proposition de loi.

La fast fashion, dite "mode éphémère", "mode éclair" ou encore "mode express" en français, se caractérise par la mise sur le marché d'un très grand nombre de nouveaux modèles et un renouvellement quasi permanent des collections. L'entreprise de prêt-à-porter chinoise Shein, avec en moyenne plus de 7 200 nouveaux modèles de vêtements par jour et plus de 470 000 produits différents, propose 900 fois plus de produits qu'une enseigne française traditionnelle et est représentative de la fast fashion. Le chiffre d'affaires de l'enseigne a progressé de 900% en seulement trois ans. Il en est de même du site chinois d'achats en ligne Temu.

Cette mode éphémère, qui conjugue augmentation des volumes, prix bas, création de pulsions d'achat et besoin constant de renouvellement, a des conséquences sur les plans environnemental, social et économique.

L'industrie textile est responsable de près de 10% des émissions de gaz à effet de serre (GES) mondiales, soit plus que les secteurs aérien et maritime réunis, et pourrait atteindre 26% d'ici à 2050. Cette industrie textile à bas prix, lointaine et délocalisée, est aussi problématique sur le plan social (travail forcé, travail des enfants...). Le secteur de l'habillement français fait difficilement face à une telle concurrence (nombre d'emplois divisé par trois depuis 1990). 

Devant les conséquences environnementales de cette industrie, la loi "Anti-gaspillage" de 2020 a introduit un bonus à la réparation des produits pour favoriser l'économie circulaire et la loi "Climat et résilience" de 2021 a prévu un affichage environnemental, dit Eco-score, dans certains secteurs. 

Toutefois ces efforts sont insuffisants. La proposition de loi envisage d'aller plus loin en encadrant la pratique de la fast fashion avec l'objectif de freiner la tendance actuelle de surconsommation de vêtements et de limiter son impact négatif sur l’environnement. 

Définition de la fast fashion et information des consommateurs

La proposition de loi introduit dans le code de l'environnement une définition de la pratique commerciale de la fast fashion ou mode express. Il s’agit de la mise à disposition ou de la distribution d’un nombre élevé de nouvelles références de vêtements ou d’accessoires neufs sur un temps donné dépassant certains seuils. Ces seuils chiffrés seront fixés par décret. 

Par amendements, les députés ont élargi le périmètre des activités pouvant entrer dans la définition afin d’y inclure les interfaces internet (places de marché comme Temu...) qui permettent d’acheter des produits de différents vendeurs. En revanche, ils ont exclu les pratiques de déstockage de produits invendus (lorsque les vendeurs ne les possédaient pas à l'origine).

Les entreprises de vente en ligne de mode jetable devront afficher sur leur site des messages :

  • sensibilisant à l'impact environnemental de leurs produits ;
  • et encourageant à la sobriété, au réemploi, à la réparation ou au recyclage.

Ces messages d’information devront être disponibles à proximité du prix. En cas de manquement, l’entreprise encourra une amende (jusqu’à 15 000 euros).

Une autre disposition, introduite par amendement, complète l'affichage environnemental de l'article L941-9-11 du code de l'environnement pour y intégrer le critère de la durabilité. L’éco-score (méthode de notation des produits et services en fonction de leur impact environnemental) a été expérimenté dans le secteur du textile entre 2020 et 2022 et devrait être mis en place d’ici fin 2024.

Renforcement du malus écologique

Actuellement, le dispositif d'éco-modulation des contributions versées par les producteurs soumis au principe de responsabilité élargie des producteurs (REP) dans la filière textile repose sur la notion de durabilité physique du produit (résistance à l'usure et au vieillissement), la certification par des labels environnementaux et l'incorporation de matières premières issues du recyclage.

La proposition de loi insère deux nouveaux critères d’éco-modulation pesant sur l’ensemble des produits concernés par la REP : l'impact environnemental et l'empreinte carbone.

Elle oblige les entreprises étrangères commercialisant leurs produits en France de désigner un mandataire chargé du respect des obligations découlant de la REP.

Elle prévoit de plus que les producteurs de la filière textile ne pourront s'opposer au montant de la prime ou de la pénalité qui leur est appliqué par leur éco-organisme Refashion sur leur éco-contribution que si celui-ci dépasse 50% du prix de vente hors taxe (et non plus 20% comme pour le reste des filières REP). Il s'agit d'envisager des pénalités plus élevées pour cette filière. 

Le texte introduit surtout la possibilité de moduler, sous forme de primes ou de pénalités, les contributions financières pour les produits textiles et accessoires en fonction notamment de leur éco-score. Les produits ayant le plus mauvais impact environnemental ne pourront pas bénéficier de primes mais seront soumis à des pénalités dissuasives dès 2025. Ce malus écologique sera de 5 euros par produit en 2025, 6 euros par produit en 2026, 7 euros par produit en 2027, 8 euros par produit en 2028, 9 euros par produit en 2029 et 10 euros par produit en 2030. 
Ces malus devront contribuer à financer des bonus au bénéficie des entreprises vertueuses de l’industrie textile.

Par amendement, les députés ont prévu que l’éco-organisme de la filière textile Refashion consacre une partie de son budget pour financer des infrastructures dans des pays étrangers qui prennent en charge des textiles usagés (collecte et recyclage). 

Afin d'accompagner la mise en œuvre de ces dispositions, un autre amendement renforce le cadre de contrôles des producteurs, entre autres pour mieux lutter contre ceux qui chercheraient à contourner la pénalité applicable à la mode éphémère.

Interdiction de la publicité sur la fast fashion

Le texte interdit enfin à partir du 1er janvier 2025 :

  • la publicité pour les produits de la mode express ;
  • la promotion des entreprises, enseignes ou marques de fast fashion.

Cette interdiction a été étendue par les députés aux influenceurs commerciaux.

En cas de violation de ces interdictions, des amendes maximum de 20 000 euros (pour les personnes physiques) et de 100 000 euros (pour les personnes morales) pourront être prononcées. Les agents de la répression des fraudes seront habilités à constater ces infractions.

Pour l’auteur de la proposition de loi, cette restriction à la liberté d’entreprendre est justifiée par la nécessité de limiter la surproduction de vêtements afin d’en limiter les conséquences environnementales. 

La proposition a été complétée par deux demandes de rapport au gouvernement :

  • un rapport étudiant l'opportunité d'un élargissement du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières aux produits textiles fabriqués hors UE ;
  • un rapport dressant un bilan de la mise en œuvre de mesures miroirs aux frontières du marché intérieur européen pour imposer ces nouvelles normes de la mode express. 

Les sénateurs doivent à présent examiner la proposition de loi.

Où en est-on ?

  1. Étape 1 validée

    Dépôt au parlement

    30 janvier 2024

  2. Étape 2 en cours

    Examen et adoption

    14 mars 2024

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  3. Étape 3 à venir

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