Le pape François fera samedi une rencontre hautement symbolique avec le grand ayatollah chiite Ali Sistani, approfondissant son dialogue fraternel mais prudent avec les dignitaires musulmans.
Le pape argentin de 84 ans se rendra dans la ville sainte de Najaf où est enterré l’imam Ali, gendre du prophète Mahomet et figure fondatrice de l’islam chiite. Dans ce "Vatican du chiisme", il sera reçu par le grand ayatollah Ali Sistani, dignitaire influent de 90 ans qui n’apparaît jamais en public.
Le tête-à-tête sera un événement phare pour la population musulmane d’un pays à 60% chiite et à 37% sunnite.
"Cette visite du pape constitue un message politique fort pour une figure très tournée vers la défense des Irakiens", insiste Myriam Benraad, politologue spécialiste du Moyen-Orient.
"C’est certainement un événement sans précédent", renchérit Marsin Alshamary, chercheuse à la Brookings Institution. Elle rappelle que Najaf s’est impliquée dans le dialogue interreligieux, dans la foulée de l’invasion américaine de 2003 et d’une guerre civile sanglante entre chiites et sunnites.
Un encouragement pour les chrétiens d’Irak
La communauté chrétienne d’Irak est l’une des plus anciennes et l’une des plus diverses avec notamment des Chaldéens -catholiques-, des Arméniens orthodoxes et des protestants.
Sous la dictature de Saddam Hussein (1979-2003), les chrétiens étaient environ 1,5 million, soient 6% des Irakiens. Aujourd’hui, avec grand maximum 400.000 membres, ils ne représentent plus que 1% de la population, estime William Warda de Hammourabi, une ONG locale de défense des minorités.
Certains sont partis lors de l’invasion américaine, d’autres pendant la guerre civile ou quand les jihadistes ont occupé leur village : au fil des drames, la communauté chrétienne d’Irak s’est réduite comme peau de chagrin, sous le regard compatissant d’expatriés pour qui le retour n’est pas une option.
"J’espère qu’en visitant l’Irak, le pape va demander aux pays qui reçoivent des réfugiés chrétiens de nous aider", résume Saad Hormuz, un ancien chauffeur de taxi de Mossoul, dans le nord de l’Irak, parti vivre en Jordanie. "Parce que retourner en Irak, c’est impossible !"